Route de Maussane, à Fontvieille (Bouches-du-Rhône), l’Atelier Architecture Perraudin a livré en 2024 Jardin d’Eve, le pavillon d’accueil de la Carrière de Provence Fontvieille maître d’ouvrage. Surface 70 m². coût total : n.c. Communiqué.
C’est un petit édifice éphémère, démontable, sans prétention ni programme précis. À la fois lieu d’accueil et de présentation de l’activité des carrières de pierre de taille, il complète l’existence de deux édifices faisant fonction de bureaux établis depuis plusieurs décennies. La sobriété de leur architecture pourrait laisser penser que, pour l’un d’entre eux, la rigueur de l’architecte Fernand Pouillon s’y serait appliquée au moment où celui-ci puisa dans les entrailles du sol le matériau nécessaire à ses gigantesques programmes de logements.
Comme lui, il fallait empiler des blocs de construction pour assurer la démonstration d’une faisabilité constructive certes, mais au-delà de cette activité triviale, le travail de l’architecte, du créateur est de tenter de lui apporter du sens. Mais comment inscrire une pensée dans la durée d’un bâtiment éphémère ? Où comment inscrire du temps dans le fugitif puisque cette construction est démontable ?
Existe-t-il des bâtiments indémontables ? Non car tous les bâtiments sont à l’image de nos vies, condamnés à mourir. Pourtant l’architecture peut traverser le temps de l’humanité par la pensée des architectes. Chaque expérience spatiale nourrit nos sens qui les prolongent dans la pensée. La lumière des cathédrales, la pesanteur du Roman, les effluves des jardins monastiques, guident le créateur vers de nouveaux lieux établis dans de nouvelles contingences.
Ainsi face à la cavité creusée dans la carrière pour tenter de rassasier l’appétit féroce de Fernand Pouillon, l’architecte aux millions d’abris humains, l’Atelier Perraudin a édifié un enclos de lumière, lanterne éphémère au soleil du midi. Le midi, cet instant fragile entre essor et déclin, au soleil bienfaiteur et assassin de toute vie.
Les carrières écorchent la terre. Leur lente scarification, par l’action combinée du soleil et de l’eau, engendre des jardins primitifs. L’eau, substance miraculeuse gaspillée à des fins industrielles, éparpille ses molécules dans les interstices de la roche et pousse à la vie.
« Dans cet enclos nous avons composé un jardin minéral, métaphore d’une carrière au sol tranché et parcouru par l’eau qu’accompagnent quelques sobres cactées. La lumière éclaboussée, le parfum minéral et le bruissement de l’eau nous transportent vers un lieu originel : celui d’un jardin du paradis. Là où se situe l’origine du monde, celui des enfants et de celle qui les engendra, Eve. En donnant la vie, nous mourons. Comme Eve, cette jeune paysagiste qui perdit la vie en donnant son sang. Des murs se dressent pour enclore ce paradis. Des murs démontables où chaque pierre se superpose aux autres par la seule vertu de l’équilibre. Toutes les pierres sont sur le même module composant des figures auto stables qui produisent un langage nouveau et intemporel », indique Gilles Perraudin.