Le Prix Versailles a dévoilé à Paris le 30 septembre sa liste 2024 des plus beaux aéroports du monde : six aérogares et terminaux récemment ouverts ou rénovés, qui témoignent d’une empreinte exceptionnelle. Découverte des lauréats dont un terminal conçu par Boiffils Architectures en collaboration avec l’artiste Patrick Blanc.
« Les infrastructures du transport aérien évoluent en prenant davantage conscience du rôle éminemment culturel qui est le leur. En tant que premier lieu d’accueil dans une destination, l’aérogare devient un emblème. En mettant en avant les atouts culturels, sa conception et son aménagement s’inscrivent dans les principes d’un tourisme où le voyageur se fait respectueux et attentif. La préservation des ressources patrimoniales (naturelles, culturelles, sociales) d’un territoire est indispensable pour construire un tourisme durable. Il est louable que les communautés aéroportuaires soient à la racine de ces changements », souligne Jérôme Gouadain, secrétaire général du Prix Versailles.
Aéroport international Zayed, Abou Dhabi, Émirats arabes unis
L’aéroport international Zayed, renommé en février 2024 en référence à Cheikh Zayed, fondateur de la fédération des Émirats arabes unis, est un trésor d’architecture moderne et de technologie avancée.
Organisé en X, selon un plan imaginé par Kohn Pederson Fox et reprenant les thèmes du désert, de la mer, de la ville et de l’oasis, il permet d’assurer un flux continu allant jusqu’à 11 000 passagers par heure, tout en proposant une expérience aéroportuaire des plus agréables.
Pour représenter l’émirat et la ville d’Abou Dhabi, la conception cherche à refléter l’environnement naturel et culturel, notamment grâce à ses formes géométriques. Sana Al Nour, une sculpture unique de 30 m de diamètre, totalement intégrée au bâtiment, dirige la lumière du jour de l’espace des départs vers le hall des arrivées. Elle contribue également à une gestion de l’air faiblement consommatrice d’énergie, montrant un bel exemple de combinaison entre l’artistique et le fonctionnel.
L’aéroport s’illustre enfin dans le choix de ses ressources, une large part de l’acier et du bois étant issue du recyclage. Autant dire que le site semble vivre une autarcie vertueuse, accueillant plus de 1 100 arbres et plantes indigènes, dans un paysage appelé à prospérer, et 7 500 panneaux solaires qui alimentent une centrale électrique de 3 MW. Monumental.
Aéroport international Felipe Ángeles, Zumpango, Mexique
Avec sa tour de contrôle dont la forme rappelle le macuahuitl, le nouvel aéroport, situé au nord-est de Mexico, annonce la couleur, ou plutôt les couleurs, comme un hommage fraternel aux différents États du pays. À l’image de la pierre du soleil, située au centre du terminal, son design propose une iconographie travaillée, inspirée de la culture et des traditions.
Par des scénographies intérieures mettant en relief le riche patrimoine historique du Mexique, les passagers sont invités à découvrir les différentes galeries et espaces sanitaires dans un voyage aussi esthétique qu’original. Un enracinement fort, une créativité puissante, mis au service d’un projet à l’ambition détonante.
S’étendant sur une superficie de 21 km², l’aéroport possède deux des pistes les plus longues du Mexique. Le terminal, composé de 18 modules indépendants et de 1 316 colonnes, chacune montée sur des isolateurs sismiques à pendule inversé, est le plus grand bâtiment du continent américain doté de ce type de technologie. Cette attention pour le contexte naturel, le site en tire aussi habilement partie en optimisant l’exposition à la lumière naturelle de ses portes d’embarquement, et en ménageant la présence d’un jardin central de 4 300 m² ainsi que de nombreux espaces verts, propices aux activités et à la détente.
Un paysage unique pour une réalisation en parfaite osmose avec son environnement.
Aéroport Changi Terminal 2, Changi, Singapour
Singapour est une ville-jardin aussi à l’aise dans ses jungles vertes que dans la jungle artificielle des mégastructures. En témoignent l’hôtel Oasia ou le Pan Pacific Orchard, listé cette année, ou bien encore le National Stadium, avec son dôme en portée libre le plus large du monde, qui ont redéfini au XXIe siècle l’architecture en milieu tropical humide.
L’extension du Terminal 2, imaginée par Boiffils Architectures en collaboration avec l’artiste Patrick Blanc, s’inscrit dans cette perspective et redéfinit à son tour l’expérience passager. Élément phare du projet, le Wonderfall est une immense chute d’eau numérique jaillissant en cascade depuis des murs luxuriants. C’est aussi de cette manière, en dissimulant les éléments techniques et en créant un parcours permettant de guider les passagers sans effort à travers l’espace, que Dreamscape a été conçu. Magnifique jardin intérieur immersif, il offre ce qui dans un aéroport est le plus rare – un sentiment d’intimité. Un ciel numérique imite les conditions météorologiques en temps réel, paradoxe d’une interaction harmonieuse entre technologie contemporaine et nature stylisée.
Spacieux, panoramique, le nouveau T2 révèle un naturel fantastique et enchanteur.
Aéroport Suvarnabhumi, Satellite central 1, Bangkok, Thaïlande
Le Hall satellite 1 de l’Aéroport Suvarnabhumi a été conçu comme une extension naturelle du terminal existant, au centre du site, apportant à la fois jeunesse et maturité à l’ensemble. Il s’agit en effet d’un large bâtiment à quatre niveaux, disposant de 28 portes d’embarquement, agrémenté d’un nouveau système souterrain performant et automatisé le reliant au terminal principal.
Pour autant, la structure excelle par sa légèreté et sa conception innovante, son attrait verdoyant et sa luminosité naturelle. On retient notamment l’intérieur ultra-contemporain du hall, équilibré par des références culturelles subtiles. Le plafond à motifs de diamants, avec ses nervures arquées entrecroisées remplies de lattes de couleur bois, rappelle les motifs traditionnels des tissus de soie de la Thaïlande et les textures régionales du tissage de paniers. Les jardins intérieurs, enfin, renvoient un bel écho du paysage tropical du pays.
Une réalisation exemplaire de l’agence HOK pour cet aéroport international, principal de Bangkok, inauguré en 2006 et dont le nom signifie en sanskrit « Terre de l’Or ».
Aéroport international Logan, Terminal E, Boston, États-Unis
À première vue, le nouveau visage de l’Aéroport Logan de Boston a de quoi surprendre : le Terminal E, d’une envergure horizontale de 410 m de long, ne passe pas inaperçu, que l’on soit sur terre ou dans les airs. Une onde rouge, horizontale et singulière, semble enflammer Downtown dès que brille le soleil. Son aspect ne vient pas du hasard, mais d’un parti pris contextuel audacieux.
Les quartiers historiques de Boston sont en effet en grande partie constitués de briques rouges, à l’origine de l’expression « Boston Red », autant un code couleur qu’un signe de ralliement, qu’utilisent d’ailleurs notamment les fameux Red Sox, fleuron du baseball local.
Le toit du terminal se dévoile délicatement incurvé, emblématique et éclatant, énergique et prismatique puisque, aligné sur la course du soleil, l’ouvrage sur toute la façade passe du pourpre à l’orange au fil du jour. Il connecte également les voyageurs avec des vues sur l’horizon animé de la ville et le front de mer.
Une nouvelle icône signée AECOM et luis vidal + architects qui dynamise le skyline de Boston.
Aéroport international de Kansas City, Kansas City, États-Unis
L’agence SOM (pour Skidmore, Owings and Merrill), dont la vocation première est la construction de gratte-ciel, fait partie des plus prestigieux cabinets au monde. Fondée en 1936, elle a accompagné l’évolution de l’aviation civile quasiment depuis ses débuts. Une profondeur historique qui lui a permis de s’adapter aux exigences du temps avec l’Aéroport international de Kansas City, Missouri, puisque la ville, maître d’ouvrage, avait exigé que l’aéroport soit « le plus accessible au monde ».
Ainsi, avec la rapidité et la sécurité, l’inclusivité est devenue le principe directeur de la conception, comme en témoigne la grande consultation réalisée auprès des habitants. Pour autant, rendre aisé le parcours des personnes en mobilité réduite, n’est-ce pas rendre le parcours facile pour tous ? De l’universalité donc, qui se lit à travers la structure même du nouveau terminal, érigé sur seulement deux niveaux, et l’architecture intérieure, légère et chaleureuse, qui sert l’accueil de tous.
Mission éminemment remplie pour ce plus grand projet d’infrastructure de l’histoire de Kansas City, qui ne manque pas d’offrir au détour une véritable démonstration esthétique.