En réaction à notre article « L’architecte, cerné de toutes parts par ses nouveaux métiers ? », la rédaction a reçu le courrier suivant de l’architecte Augustin Colcombet. Que dire ? Comment le dire ?
À l’attention de la rédaction de Chroniques
À la lecture de certains de vos articles et éditos je remarque une certaine désespérance quant à la reconnaissance (ou simplement à la connaissance) du métier d’architecte par le grand public. Je ne peux qu’abonder dans votre sens.
Quotidiennement confronté à une ignorance (a minima) ou à une méconnaissance orchestrée par d’autres acteurs du bâtiment, voire par l’ordre des architectes lui-même (voir votre article « »), je cherche désespérément à clarifier mon métier d’architecte pour l’expliquer toujours plus simplement à mes interlocuteurs.
Or notre métier est complexe par essence. Nous sommes Maître d’Œuvre par excellence, maniant le concept et le bâti, l’idée et le concret au service d’un interlocuteur ignorant de l’expertise pluridisciplinaire que nous allons déployer. Expliquer jour après jour mon métier à mes prospects (je conçois et réalise des maisons individuelles) me permet de mesurer cette ignorance.
Nous sommes souvent mis en concurrence avec des métiers bien éloignés du nôtre : constructeurs, contractants, maître d’œuvre (d’exécution, mais ce qualitatif a disparu depuis bien longtemps), et même courtiers en travaux…
Viens alors le besoin de conceptualiser notre propre métier pour le cerner et l’expliquer. Mais comment synthétiser un métier multiforme, un savoir-faire qui se renouvelle à chaque projet, puisque chaque projet est différent du précédent ? Concepteur – réalisateur (à l’image du cinéaste) de prototypes urbains, chef d’orchestre de l’ensemble formé par les différents intervenants de la construction, psychologue ou conseiller conjugal, analyste financier… Là où le titre d’architecte définit d’autres métiers (architectes réseaux…), nous sommes obligés de convoquer d’autres métiers pour définir le nôtre.
Le seul fait que nous devions justifier que notre travail puisse avoir une valeur financière montre à quel point celui-ci est incompris. Les écoles d’architecture ne sont elles-mêmes pas étrangères à ce que les jeunes diplômés se sabordent sans avoir besoin de l’aide de quiconque par ignorance de leur propre valeur. Incapables de savoir à quel salaire prétendre à l’embauche, ils ne sont pas meilleurs pour défendre leurs honoraires une fois à leur compte.
Je ne suis malheureusement pas aussi habile que vous avec les mots et les phrases, à chacun son métier. J’ai encore beaucoup à dire dans la doléance qui trouve écho dans vos articles, aussi je tenais simplement à vous remercier pour votre combat pour la sauvegarde de notre métier et même pour sa promotion auprès du public.
Bien cordialement,
Augustin Colcombet
2ACB Architectes