Qu’à donc fait le flamboyant Jean Nouvel de son pouvoir de conviction ? Quoi, lui sont promises deux nouvelles tours, nommées DUO (sic), à Paris intramuros – excusez du peu – et le New York Times n’en parle pas ? Même pas en page intérieure ?
De fait, à part quelques sarcasmes, la presse étrangère et française ne s’est guère émue de l’annonce du dernier premier projet de tours de Jean Nouvel à Paris.
En 2008 pourtant, The Independant, quotidien anglais, faisait grand cas de la tour Signal à la Défense. Aujourd’hui, en 2012, c’est Luc le Chatelier qui, dans Télérama, signe avec ironie l’acte d’indifférence*.
Opération de com’ pour la Ville de Paris, assurent les médisants.
Non !
Comment sinon imaginer qu’un tel fiasco ait été pensé et organisé ?
Et DUO ! Elle a pris combien l’agence de com pour aboutir à cette poésie ? 25 000 € ? 200 000 € ? 2M€ ? D’aucuns murmurent que ça aurait pu être TWIN mais que l’anglicisme n’est pas passé. JUMELLES était trop long. Va pour DUO. Paris ville de culture.
Les ménagères de moins de 50 ans, qu’en pensent-elles ?
En vrai, un DUO d’honneur à la banlieue et voilà pour le Grand Paris et celui qui pleurait sur Billancourt.
Non, vraiment, la communication version Nouvel n’est plus ce qu’elle était tandis qu’on a connu celle de Delanoë en meilleure forme.
Ce qui n’enlève rien à leurs réussites, avérées, d’hier.
En résumé, à Paris, au bout de l’avenue de France, DUO, c’est retour vers le passé. Demain, Vauban ! What else ?
Pendant ce temps, une architecte qui avait l’estime de tous ceux qui la connaissaient – c’est un euphémisme – fut inhumée au cimetière du Montparnasse, lors de l’une des plus belles journées de ce printemps pluvieux.
Cette architecte construisait des hôpitaux. Chaque homme ou femme de l’art ayant jamais bâti un hôpital connaît la difficulté de l’entreprise.
Voici ce qu’elle pensait :
«L’architecture est indissociable des relations humaines. Faire de l’architecture est une philosophie de la vie, de l’action, laquelle peut améliorer la vie des gens ou détériorer les rapports sociaux. C’est un acte social et, en ce sens, elle est au coeur de la politique. La non architecture, de grands gestes qui écrasent l’individu, est caractéristique de certaines dictatures par exemple», disait-elle.
Elle savait le venin pernicieux de l’arbitraire.
En un mot comme en cent : «l’homme est au centre de la pensée», résumait l’architecte pour laquelle il ne s’agissait pas, et de loin, d’un vœu pieux.
A l’aune de cet engagement, et de celui du grand nombre de ses confrères, la communication de l’un et de l’autre – un sacré DUO en effet ! – n’est que pathétique gesticulation.
Voilà qui est triste.
Christophe Leray
*Lire Jean Nouvel, architecte à tout prix ? – Luc le Chatelier – TELERAMA n° 3254 daté du 24 mai 2012.
Cet article est paru en première publication sur Le Courrier de l’Architecte le 6 juin 2012