Souvenez-vous, les Jeux Olympiques ? L’exposition universelle ? Le point G occidental (G2, G8, G20, etc.), titillé, condescendait à octroyer ces évènements planétaires à la Chine promise à un bel avenir commercial. La Chine au rang des nations à travers le prisme occidental. La Chine maître de son destin à travers le prisme chinois.
A Shanghai, ne jamais sous-estimer l’humiliation des guerres de l’opium. Le quartier de l’ancienne concession française est couru, les belles n’en pensent pas moins. Quatre mil ans, la Chine a la mémoire longue.
Et courte.
La Chine devait s’ouvrir au monde à l’occasion des Jeux. Ah le nid d’oiseau ! Et en accepter l’amour courtois. Idem avec l’expo de Shanghai. Deux évènements au succès planétaire.
Le Tibet reste inaccessible. Chacun se tait à propos du prix Nobel. Google, comme tant d’autres, fait des courbettes.
Les Jeux Olympiques et l’Exposition universelle n’avaient pas de message pour le monde ; ils étaient conçus pour les Chinois. Ce sont eux qu’il fallait convaincre. La conquête de l’espace procède de la même politique intérieure.
Cela écrit.
En 1925 avait lieu l’Exposition internationale des Arts Décoratifs et Industriels Modernes de Paris. D’aucuns se souviennent de son influence. Léger, Picasso, Max Meldrum, Le Corbusier entre autres y furent plus que de simples visiteurs. Shanghai était la ‘Perle de l’Orient’.
Après l’expo universelle 2010, qui dans cent ans ?
Shanghai est depuis des siècles l’avant-garde chinoise. Quelle autre ville en ce pays s’enorgueillit d’un ‘Bund’ ? Un nom commun anglais qui plus est. Elle fut un havre durant les guerres mondiales.
Beijing possède bien sûr le pouvoir politique mais l’ouvrière d’une usine de jouets à Shanghai, si elle est native, pensera toujours que ce cadre pékinois qui lui fait la leçon n’est qu’un paysan. Le dialecte de Shanghai, incompréhensible pour quiconque n’y est pas né, est d’une ironie acérée.
Après tout, au-delà de l’histoire, dès 1992, Shanghai faisait appel aux Français pour organiser, sous l’égide de Joseph Belmont, un concours international sur l’aménagement du quartier Lujiazui, le coeur financier et économique de Pudong, projet auquel avait d’ailleurs participé Dominique Perrault. Le Master plan de l’expo fut conçu par Architecture Studio.
Et puis, la Chine actuelle, depuis que Deng Xiaoping, en 1984, puis Li Peng réintroduisirent les lois du marché et la libération des prix et avant Hu Jintao, l’actuel président chinois, ce sont Jiang Zemin puis Zhu Rongji, qui furent tous deux maires de Shanghai, qui ont œuvré pour les Jeux Olympiques et l’Expo universelle.
Bref, la Chine de demain est à Shanghai aujourd’hui.
Christophe Leray
Cet article est paru en première publication sur Le Courrier de l’Architecte le 17 novembre 2010