Brigitte Métra (METRA+ASSOCIES), avec ARTEO Architectures (Anne Forgia, Didier Leneveu) pour la conception des espaces intérieurs, ont livré en août 2018 dans le XXe arrondissement de Paris l’extension du collège Lucie Faure et l’ouverture d’une crèche. Particularité de ce projet de 3 420 m² d’un coût de 10 M€, il repose sur un centre bus industriel de la RATP et partage l’affiche avec le ministère de l’Intérieur. Communiqué.
Le grand projet mixte de remodelage urbain regroupant un centre bus glissé sous un vaste jardin entouré de bureaux et de bâtiments publics à Paris dans le XXe arrondissement, s’achève avec l’ouverture de la crèche et de l’extension du collège. La livraison des deux équipements publics pour la rentrée 2018 met un point final à cette opération de reconfiguration urbaine qui a changé la face et la vie du quartier.
Au sein de ce morceau de ville de 84 800 m2, se superposent un centre-bus* avec des ateliers et parkings pour 190 bus, 30 000 m² de bureaux, un collège et une crèche de 4 300 m² autour d’un jardin de 2 600 m² en cœur d’ilot, immergeant de végétation la dalle du centre bus et les façades.
Les enjeux
La ville de Paris, partenaire du projet dès l’origine, souhaitait réunir les deux parties du collège Lucie Faure – l’une était délocalisée près du périphérique – en construisant 13 classes, une cour de récréation et un gymnase. Elle désirait également créer une crèche de 66 berceaux.
Le projet de centre-bus au sud du collège Lucie Faure entre les rues de la Plaine, des Pyrénées, des Maraîchers et de Lagny offrait une belle opportunité pour la ville. Le site a été reconfiguré en remplaçant le bâtiment industriel du XIXe par un ensemble urbain. La valorisation de son terrain lui a permis de s’agrandir pour en augmenter la capacité d’accueil, en pérenniser l’implantation et le moderniser, en construisant 30 000 m² de bureaux occupés par les sept directions du ministère de l’Intérieur et deux équipements publics au-dessus du centre bus RATP.
Ainsi le Garance est-il une histoire globale de vie et de ville.
Insertion urbaine – l’architecture outil de revitalisation – disparition
Le défi architectural était de taille : insérer harmonieusement ce très grand projet de 84 800 m² aux fonctions multiples et complexes – industrielles, scolaires et tertiaires – dans ce quartier résidentiel de l’est parisien.
Entre projet urbain et architectural, l’architecte s’est attachée à transformer les contraintes de différents programmes en atouts. Les ateliers, les parkings de bus et de voitures se glissent discrètement sous un socle qui devient le support d’un grand parc urbain autour duquel se déploient les bureaux du ministère de l’Intérieur et les deux équipements publics.
Ces «strates» contemporaines supplémentaires «effacent» les contraintes de l’équipement industriel situé en son sein et offrent à chacune des entités une vraie qualité de vie pour chacun des usages.
Afin d’assurer une intégration sensible au maillage urbain existant et d’offrir une respiration dans les 160 m occupés en pied de façades par le centre bus, un passage urbain qui traverse le site dans le prolongement de la rue Philidor a été aménagé.
Afin de permettre au collège et à la crèche situés au-dessus du centre bus d’être de plein pied avec les rues adjacentes, la rampe d’accès des bus à leurs parkings a été «enfoncée» au maximum dans le sol. Ce passage urbain traversant l’îlot a amené la ville de Paris à déclasser la rue de la Plaine pour la transformer en cour du collège qui relie ses deux entités enfin regroupées.
Depuis le concours, gagné en 2005 par MÉTRA+ASSOCIÉS, treize années de travail auront été nécessaires pour mener à bien la construction de cet ensemble de bâtiments qui superpose des fonctions tertiaires et publiques à un centre bus enterré, projet prototype et premier du genre en Europe.
Dialogue avec la ville – Le passage
Le bâtiment abritant le collège et la crèche s’identifie par sa couleur blanche, en harmonie avec l’enduit du collège existant. Dans la continuité des autres parties du projet où les façades reflètent la couleur des bâtiments en vis-à-vis, la couleur est utilisée comme support d’insertion urbaine. Le dialogue entre le nouveau bâtiment et son environnement se poursuit tandis que les règles du PLU sculptent la masse construite.
Tel un rocher «fissuré», les failles brutes et irrégulières créent un passage urbain à travers l’îlot et une percée visuelle dans le prolongement de la rue existante. La rampe du centre bus s’enfonce dans le sol au profit d’un passage piéton qui traverse l’ilot.
Le jardin
En cœur d’îlot, le projet disparaît pour laisser place au vaste jardin. Le bâtiment devient paysage. Cette nature foisonnante de 2 600 m² constitue une oasis urbaine, une respiration dans la ville, un écrin de verdure qui s’étend horizontalement en cœur d’îlot et remonte le long des façades de l’édifice.
L’administration centrale du ministère de l’Intérieur avec sept directions, le collège – classes, bibliothèque et espaces d’accueil – et la crèche se déploient autour de ce jardin qui génère une exceptionnelle qualité d’usage. Le jardin, invisible de l’extérieur, à l’abri de la ville, est un univers en soi, un microcosme. Cette «parenthèse» dans la ville de Paris et son mouvement est le symbole d’une qualité de vie retrouvée en centre-ville.
Les façades
La peau minérale du bâtiment, à la fois paisible et génératrice de vibrations, évocation de couches géologiques, symbolise la stratification de la ville et la représentation de la fonction publique du bâtiment dédié à l’enseignement des adolescents et à l’éveil des tout petits.
Côté rue des Maraichers et cour du collège
Déployée en lignes horizontales texturées, la façade évoque la stratification de la ville qui se reconstruit sur elle-même. Les façades minérales sont traitées par des strates horizontales de panneaux de béton composite matricé blanc. L’ondulation des matériaux les fait vibrer par un jeu d’ombre et de lumière qui contraste avec l’aspect lisse de la façade des bureaux.
Côté jardin et passage dans l’îlot
Dans le prolongement des façades en panneaux d’acier anodisé verticaux des immeubles de bureaux, des panneaux de CCV blancs et lisses enveloppent la façade arrondie du collège et des terrasses de la crèche à l’intérieur de l’îlot. Dans la continuité des façades et du grand jardin du ministère de l’Intérieur, la végétation créée grimpera le long des façades du collège.
Le collège et la crèche
Le collège occupe les trois premiers étages du bâtiment. Il intègre au rez-de-chaussée un gymnase ouvert à la ville. L’ancienne rue de la Plaine, transformée en cour de récréation, relie l’extension du collège au bâtiment existant. Les 4ème et 5ème étages sont occupés par la crèche. Deux terrasses ouvertes au sud sur le cœur d’îlot végétal ont vocation d’aires de jeux pour les enfants.
L’architecture des espaces intérieurs conçus par ARTEO, architectes associés, articule les différentes fonctionnalités du collège autour d’un vaste escalier central, la crèche se situe au-dessus. A l’intérieur les tons utilisés font écho à la couleur blanche de la façade, ils reflètent la lumière et accentuent l’impression de pièces spacieuses. Grâce aux matériaux, aux formes et aux couleurs les collégiens, les enfants et les professeurs évoluent dans des espaces généreux et apaisés.
*Lire à ce sujet notre article Superpositions fonctionnelles : les friches en volume de la RATP à Paris