L’agence caennaise L2 a livré en 2017, à Chasseneuil-sur-Bonnière, l’Eco-CFA de la Charente (16). Sur une surface de 7300m², et pour un coût travaux de 22,5M€, le parti de l’agence fut de combiner plusieurs perceptions pour en faire un tout cohérent, pertinent et constructif. Communiqué.
Quatre approches structurent ici le projet :
L’approche symbolique qui donne du sens et une dynamique au projet. Ainsi, la lecture du programme se traduit par une succession de strates chacune marquées par des seuils qui en conditionnent les accès. Le premier seuil est le hall d’entrée général qui desservira les locaux dédiés à l’entreprise, à l’administration et aux stagiaires et leurs espaces de vie. La deuxième strate sera l’enseignement général qui conduit naturellement vers la troisième, l’enseignement technologique.
Là existe un second seuil celui des vestiaires qui conditionnent l’accès aux ateliers : quatrième strate du projet. Ces quatre couches sédimentaires sont réparties sur l’ensemble du projet d’est en ouest et sont traduites par autant d’éléments constructifs spécifiques comme une métaphore de l’enseignement et de l’apprentissage.
L’approche contextuelle offre un point de vue plus large englobant le programme dans son site, le site dans son environnement et l’environnement dans le territoire. Au nord le projet est bordé par la ville avec son ordonnancement urbain qui masque le site et y interdit toute visibilité tandis qu’au sud s’étalent les champs et leur paysage ouvert. Ainsi, dans l’angle sud-ouest, depuis la RN141, s’ouvre le seul point de vue dégagé sur ce projet. C’est donc dans cet angle que le projet devient remarquable. Cette approche contextuelle nourrit le projet et l’approche symbolique. Cet épanouissement des volumes marque l’entrée du site, laquelle est lisible depuis la fenêtre visuelle existante depuis la route nationale mitoyenne.
L’approche technique vise à rendre visibles et lisibles les fluides et la structure du projet afin qu’ils fassent réellement partie du quotidien des stagiaires, lesquels pourront suivre à travers l’ensemble du projet le cheminement des réseaux identifiés selon un code couleurs établi préalablement avec les utilisateurs.
Participant à la conception des espaces la structure doit intégrer à la fois des problématiques d’inertie et l’approche bio-sourcé du projet. A chaque volume correspond donc une structure appropriée : ateliers, gymnase, restauration et locaux d’hébergement, de performance passive, sont réalisés en structure bois tandis que la périphérie des locaux d’enseignement est réalisée en béton.
L’approche par l’usage est au centre du tout car à l’origine même de la conception du projet. C’est à la lecture et à la relecture de ce programme, à son appréhension, à sa compréhension, que les approches symboliques, contextuelles, et techniques trouvent tout leur sens. Les strates évoquées plus haut sont ordonnées coté ville, en limite nord du projet. Cet ordonnancement correspond au pôle enseignement car il permet la modularité des espaces pour répondre aujourd’hui mais surtout demain aux besoins des utilisateurs. Ces strates se plient vers la limite sud. Elles se déforment autour d’un espace atypique: le foyer.
Il résulte de ces trois approches une organisation extrêmement lisible du projet où les différentes fonctions sont regroupées en trois pôles qui se partagent le site, un pôle enseignement au nord, un pôle espaces de vie au sud-ouest, proche du chêne existant préservé, et un pôle administration-entreprise au sud-est autour du hall d’entrée…
Les ateliers : Le métier du bâtiment est un métier en perpétuelle évolution. C’est pour cette raison que l’agence L2 a souhaité rassembler l’ensemble des ateliers sous une nef où chaque atelier trouve son autonomie mais peut évoluer car la structure même de cette nef a été abordée afin d’accompagner cette interconnexion professionnelle: le jeu de redents de toiture organisés en pente simple propose un pré-découpage des locaux et une évolution aisée de ceux-ci.
Au-delà de cette nef, au nord, s’organisent les plateformes extérieures avec leurs abris spécifiques, puis une voirie de desserte en contre bas qui permet aux véhicules lourds le contournement du bâtiment et l’accès à chacune des aires extérieures par des quais de déchargement. Cette logique de séparation des flux permet de sécuriser les déplacements des stagiaires : entre ateliers et bordure de voirie, piétons et engins de levages pourront évoluer tandis que les véhicules seront contenus au-delà des quais…
Les salles d’enseignement s’organisent autour de patios qui jouent aussi ici un rôle pédagogique. Chaque pôle métier suppose un certain nombre de pratiques en extérieur qui pourront y trouver leur place dans les patios. On se retrouve ainsi dans une synergie pédagogique mêlant à la fois exposition pratique et réalisation. Cette démarche concourt aussi à la transversalité des métiers évoqués plus haut.
La circulation centrale : épine dorsale du CFA, cette circulation est largement dimensionnée et naturellement éclairée par des ouvertures zénithales et des sorties vers l’extérieur. Elle innerve l’ensemble du projet, permet la visite des différents équipements techniques qui constituent ce centre de formation. Elle se superpose à la galerie technique placée en sous-sol du bâtiment, elle aussi dimensionnée pour permettre la visite des locaux techniques par les stagiaires.
La canopée : en contrepoint de cette circulation intérieure principale, partant du hall d’entrée vers les locaux d’hébergement et la restauration, s’organise une promenade extérieure protégée et ombrée qui propose un parcours alternatif entre les locaux de détente. La canopée est caractérisée par sa dentelle de bois qui se plie, s’élargie, contourne, accompagne les espaces de vie du projet pour traverser le hall d’entrée où elle devient faux plafond pour rejaillir à l’est et former un signal d’entrée pour les visiteurs.
Le CRAF, l’administration et les locaux d’entreprise s’organisent autour du hall d’entrée qui est pensé comme espace de transition et le point de départ de la promenade qui conduit les stagiaires vers les locaux d’hébergement et de restauration.
L’hébergement est réalisé en ossature bois pour une optimisation de son isolation afin de prétendre à une labellisation passive. L’organisation sur trois niveaux permet d’adapter l’usage du volume en fonction de son taux d’occupation. L’accent a été mis ici sur la résidentialisation, ainsi les chambres triples sont divisées chacune en trois alvéoles pour proposer à chacun des occupants une intimité optimale.
Les choix structurels accompagnent et servent l’organisation fonctionnelle du projet caractérisée par trois matériaux : l’acier pour les ateliers, le béton pour l’enseignement et le bois pour la canopée et les volumes environnants. Ces matériaux sont simples, ordinaires, régulièrement utilisés et mis en œuvre par l’ensemble des entreprises locales. Mais L2 démontre ici, par une mise en œuvre exemplaire que chaque matériau possède une noblesse intrinsèque qui ne demande qu’à être révélée.
Le bâtiment trouve ainsi cohérence et lisibilité à travers une organisation rigoureuse mêlant au quotidien pédagogie, complémentarité et convivialité des espaces.