L’agence parisienne Olivier Palatre architectes a livré en mars 2020 à Béthune (Pas-de-Calais) Etoile Cinéma, un multiplex de neuf salles incluant un restaurant et l’aménagement du parvis. Une surface de 5 742 m² sdp et un budget de 7,2M€ HT pour un plateau interconnecté en cœur de ville. Communiqué.
Située avenue de Lens, en prolongement de la place François Mitterrand, face à la gare SNCF, au commencement d’un nouveau quartier, la parcelle à bâtir constituait un endroit stratégique. Localisé à proximité d’axes majeurs de circulation et de flux de personnes (gares routière et ferroviaire, centre-ville, etc.), immédiatement visible des passants, le vaste terrain de 5 600m² de plancher, plat et dégagé, possédait un fort potentiel constructif, offrant de nombreuses variantes de programme.
Sur l’esplanade le multiplex s’épanouit désormais sur un périmètre de 53m de côté. La haute silhouette du bâtiment, compact, à volumétrie découpée, aux tonalités neutres et claires en fait un cube de projection caractérisé par une architecture au style urbain raffiné et contemporain et une sobriété qui sonnent comme des invitations à y entrer.
En termes d’insertion urbaine, l’aménagement des abords extérieurs est intervenu dans la valorisation de la volumétrie du bâtiment, par ailleurs respectueux du contexte en constituant un front urbain de 15 m de haut face aux bâtiments de l’avenue de Lens.
L’implantation du bâtiment sur le terrain, en retrait de la rue et en oblique, est pensée par rapport à la gare et le mail planté qui y mène, favorisant la desserte par circulations douces depuis ceux-ci, en vue de la création d’un parvis connecté à la place François Mitterrand. Le parvis générant un carrefour de circulations se constitue ainsi en un espace public apaisé et continu qui, associé à la disposition en oblique, oriente les pas des promeneurs vers le cinéma.
Une théâtralité fonctionnelle. Respect de l’urbanisme et adaptation aux pratiques cinéphiles
Au détour de l’avenue de Lens, le bâtiment apparaît, monolithe épuré mis en scène sur la toile de fond du contexte urbain. Par contraste avec la transparence discrète de l’enveloppe de métal perforé en journée, la nuit, grâce à un dispositif de rétro-éclairage, le bâtiment devient étincelant tel un ciel étoilé.
Le point de vue sur l’arête saillante insuffle un dynamisme incisif et attractif. La façade principale vitrée et ouverte sur le parvis attire vers l’architecture et porte le regard vers l’intérieur du cinéma, avec ses circulations et ses jeux de volumes. Le décollement de la façade crée des interstices, des auvents pour accueillir et protéger le spectateur. A mesure qu’on pénètre à l’intérieur de la structure, son ambiance feutrée mais dynamique emmène jusqu’aux salles de projection.
La mise en scène reposant sur ces effets de porosité favorise la communication entre le dedans et le dehors et invite dans le cinéma. Le spectacle du cinéma transfigure l’espace urbain extérieur et engendre un tout spatialement et visuellement homogène.
Le public pénètre dans un grand hall donnant sur le parvis, desservant la mezzanine, menant aux salles. Ce hall fonctionne comme un foyer de théâtre, adapté aux usages actuels : avec ses grandes baies vitrées et ses dimensions généreuses, il offre un espace lumineux et confortable propice à la rencontre, en prolongement de l’espace public extérieur.
Les locaux accessibles au public se répartissent sur trois niveaux (RDC bas, RDC haut et R+1 bas). Ils comprennent la billetterie, les comptoirs de vente de confiseries et de boissons, ainsi que les salles et espaces de détente. La surélévation en mezzanine permet de gagner en superficie pour aménager neuf salles et de répartir les locaux techniques en RDC. Le niveau de régie séparé en R+1 haut bénéficie d’une accessibilité restreinte qui assure un calme nécessaire aux besoins du personnel technique et administratif. Enfin, l’organisation des espaces permet l’insertion discrète des locaux techniques et sanitaires, évitant les nuisances.
La mezzanine fonctionne comme un déambulatoire, une coursive pour voir et être vue. Elle articule les flux et met en valeur cette mécanique fonctionnelle en ménageant des vues sur le hall, les aménagements intérieurs, le parvis et leurs occupants. Depuis le hall, elle dessine une seconde ligne de sol suspendue sur laquelle le public semble flotter. La mise en scène des déplacements attire le regard et offre une belle visibilité sur les escaliers et escalators. Depuis ces hauteurs, dominant le hall, il bénéficie d’un autre point de vue sur le cinéma et son animation, spectateur singulier d’un cinéma dont la théâtralité lui confère son originalité.
La structure intérieure du cinéma est constituée d’une structure mixte de béton et d’acier. Cette méthode constructive par éléments préfabriqués en béton (pré-murs et prédalles) participe d’une esthétique brutaliste, puissante dans sa matérialité, subtile dans son intégration des couleurs, des textures et de la lumière, qui en exposant la structure rend perceptible la force primaire du bâtiment, noble et monumentale.
Depuis l’extérieur, le visiteur est attiré par la légèreté de la façade perforée. Celle-ci dissimule le béton de la coque du bâtiment et masque les éclairages. A l’intérieur, les dalles préfabriquées en béton sont laissées apparentes. Le matériau brut volontairement dévoilé insuffle au bâtiment puissance et prestance. Par contraste, les espaces de circulation et d’attente aux teintes orange et bleu électrique deviennent des lieux de convivialité, où échanger, se rencontrer et se donner rendez-vous, des lieux d’interactions où prendre le temps, et non plus de simples lieux de passage.
Les autres éléments de structure laissés visibles renforcent cet effet. Poutres et escaliers se croisent et s’entrecroisent en un maillage aérien qui rayonne dans l’espace de béton, valorisant le « brut ». La mezzanine ouverte sur le hall dispense un éclairage naturel sur lequel repose l’ambiance agréable des espaces de circulation, généralement sombres ou éclairés artificiellement. Techniquement, l’apport de lumière naturelle permet de réduire la consommation du bâtiment. Visuellement, la mezzanine marque le passage entre l’espace du réel et l’espace du rêve, du cinéma.