Pour un photographe d’architecture, la période du confinement au printemps pourrait être une aubaine !
De belles et douces lumières, l’horizon est dégagé sans pollution, sans ce halo jaune et gris qui brouille le lointain. Les rues désertes permettent de cadrer les bâtiments sans la sempiternelle camionnette blanche garée en premier plan. Le fâcheux est absent. Celui qui au moment où toutes les conditions sont réunies, ombres, lumières et perspectives dégagées, surgit hors champ d’un doigt accusateur, revendique son droit à l’image et exige illico d’effacer le cliché que vous n’avez pas encore pris…
J’aurais aimé être confiné à Paris, face à une gare habituellement animée et illustrer la disparition, le vide, le « co-vide ».
Je ne me plains pas, j’ai la chance d’être en Normandie dans mon atelier entouré de bocages. J’ai pu photographier au fil du temps l’évolution, chez les vaches, du respect des distances sociales, sans masque comme il se doit.
J’ai eu le temps d’ouvrir des boîtes d’archives et de retrouver des tirages oubliés.
Une série réalisée à la gare de Lyon. Celle-ci a retenu mon attention, tout d’abord parce qu’elle n’était pas datée. J’ai comme habitude de dater mes tirages.
2003, 2005, 2008, 2011 ?
Ces années correspondent à une longue série d’images en mouvement réalisées à bord du TGV, intitulée «Travelling».
J’aurais pu tenter une recherche systématique dans mes disques durs, les fichiers numériques auraient livré toutes les informations, date, heure, ISO, focale, vitesse, ouverture, type de l’appareil… cela me rappelle les débats d’actualité sur le ‘tracking’.
Je préfère laisser deviner, les indices sont nombreux et le doute est encore permis.
Ces planches kaléidoscopiques révèlent une envie de foule, de croisement, d’évitement, de frottement, d’insouciance et le bonheur de retrouver l’être aimé au bout du quai.
Jean-Pierre Porcher
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