À Paris (XIXe), pour Dcpa/Samo, DAC, DSOL (Ville de Paris) maîtrise d’ouvrage, associer (atelier Philippe Madec) a livré en avril 2025 la médiathèque James Baldwin,* la réhabilitation en centre culturel et Maison des Réfugiés d’un ancien lycée hôtelier. Surface : 4 406 m². Coût des travaux : 17,50 M€ HT. Communiqué.
Au cœur du XIXe arrondissement de Paris, dans un site enclavé environné de barres et de tours, à deux pas de la Place des Fêtes, la réhabilitation de l’ancien lycée hôtelier Jean Quarré transforme les bâtiments existants, datant des années 1970.
Le programme accueilli est unique au monde, à haute valeur culturelle et sociale. Il assemble un équipement culturel de proximité et un lieu dédié à l’intégration des personnes exilées sur le territoire parisien. La médiathèque porte le nom de l’auteur, poète, essayiste et dramaturge américain James Baldwin, né en 1924 à Harlem (New-York) et mort en 1987 à Saint-Paul-de-Vence (France). Elle a rejoint les quatre médiathèques de la ville de Paris qui disposent d’un « pôle sourd » pour accueillir le public en langue des signes.


La Maison des réfugiés réunit en son sein toutes les dimensions du parcours d’intégration, dans un lieu convivial, de rencontres et d’échanges de temps, de connaissances et de savoir-faire entre réfugiés, habitants du quartier, de la ville, professionnels et partenaires. Elle est pilotée par Emmaüs Solidarité et Singa, association ayant pour objet l’intégration des personnes réfugiées et migrantes.
Les deux équipements partagent une salle polyvalente (270 m²), un espace de colearning / coworking (210 m²) et un jardin.

La structure existante redécouverte
Les structures de l’ancien lycée ont été préservées, nettoyées, désamiantées et désencombrées d’éléments parasites. Fruit d’une construction industrialisée, sa réalisation assemblait des éléments préfabriqués en béton armé, poteaux, poutres, dalles de planchers et panneaux de façade. Une déconstruction très sélective a été opérée : des dalles, murs et panneaux de façade ont ainsi été découpés. Leurs pièces tranchées sont restées sur place pour être réemployées dans le projet, notamment les 135 dalles réemployées sur le parvis planté. Le bâtiment est devenu la carrière de son propre avenir.
La régularité de la structure a été retrouvée et la qualité de la mise en œuvre du béton armé mise à jour. Les poteaux, les poutres et les panneaux des structures existantes sont mis en valeur. Les espaces utiles aux usages d’une médiathèque et d’une maison d’accueil ont été ainsi ouverts. Des doubles hauteurs tournent dans la médiathèque et permettent de percevoir les étages supérieurs.
La déconstruction sélective a permis un réemploi in situ et ex situ, par des preneurs au sein de la ville de Paris, des dons aux associations de l’économie sociale et solidaire (La Rquincailletrie, La Parole Errante, la Ruche du Kremlin Bicêtre, RéaVie) et par des dons aux particuliers (créneaux de deux heures par semaine pendant un mois).


Bois et terre coulée
Dans une démarche écoresponsable, pour une réalisation à faible impact environnemental, la réhabilitation soignée de l’existant est complétée par une nouvelle construction en matériaux biosourcés et géosourcés. Les bâtiments, carré de la médiathèque et allongé de la maison des réfugiés, sont reliés par un volume vertical, dit « le lien », permettant de desservir les différents niveaux et espaces des établissements. Construit en bois, ce bâtiment non chauffé, espace tampon bioclimatique, accueille des murs préfabriqués en terre coulée, garantissant une inertie thermique et une régulation de l’humidité. Le bois massif et la terre laissés brut augmentent l’expérience tactile de l’espace.
Une mantille en bois enveloppante le recouvre et fait office de filtre à haute protection solaire. En Douglas pré-grisé, faite de petits éléments obliques assemblés avec des écarteurs, elle intègre la coursive d’accès pour l’entretien et le nettoyage des façades vitrées. Et elle permet également de signaler et de donner une présence à la médiathèque et à la maison des réfugiés depuis la place des Fêtes dès la sortie du métro.

Le bois et les matériaux biosourcés sont privilégiés :
– ITE en fibre de bois de 24 cm d’épaisseur ;
– cloisons en Fermacel généralisé et isolant en fibre de bois ;
– sol souple en Linoléum et caoutchouc ;
– chape sèche du volume lien avec un résident en laine de bois ;
– panneaux acoustiques en lin et fibres végétales ;
– isolant en verre cellulaire issu du recyclage des pare-brise ;
– isolant généralisé en laine de bois.

Le bois est utilisé pour :
– menuiseries intérieures et extérieures en pin traité classe IV ;
– structure du lien en CLT ;
– façades à ossature bois ;
– escaliers de desserte intérieure de la médiathèque.
La terre mise en œuvre est :
– issue des excavations du Grand Paris, de Cycle terre ;
– coulée en modules préfabriqués selon les principes de la mise en œuvre du béton armé de ciment ;
– armé d’une ossature bois ;
– composée de terre argileuse, de paille hachée, de sable et d’eau.

Hospitalité
La haute structure poteau / poutre existante accueille avec facilité les activités dédiées aux réfugiés et aux riverains : offrir une boisson d’accueil, apprendre le français, cuisiner, bouger, accéder aux droits, participer à des spectacles, se parler, aider aux diverses démarches administratives. Elle offre des grands volumes porteurs d’aisance et riches de lieux différenciés, dans une acoustique soignée qui préserve chacun. La musique d’un piano à queue offert par Mélody Gardot en occupe l’espace au gré des pianistes de passage. Une longue terrasse tournée au Sud favorise des moments de détente et permet l’accès au jardin partagé.
*Lire notre article Philippe ou la bonne fortune de la vertu
