
À Rouen (Seine-Maritime), pour Matmut Immobilier maître d’ouvrage, les agences CBA architectes (Clément Blanchet) et Espace Libre – Paysagiste ont livré en septembre 2024 la spectaculaire transformation de l’ancienne école des institutrices (ENI) en un lieu ouvert, en belvédère sur la ville. Surface : 13 650 m². Montant des travaux (architecture + paysage) : 42 M€ HT. Communiqué.
Les architectes aiment expliquer construire des bâtiments paysage, les paysagistes se targuent de paysages architecturés. Rarement pourtant les deux assertions se rejoignent pour ne faire qu’un seul projet, architectural et paysager, aussi admirablement qu’avec la restructuration de l’ancienne École Normale d’Institutrices de Rouen. Un bâtiment paysage, au sens propre.
Le bâtiment originel, construit par l’architecte Lucien Lefort et ouvert en 1887, est devenu en 2024 un grand hôtel 4* de 85 chambres et un hôtel d’entreprises de 8 000 m² de bureaux. Surtout, CBA architectes et Espace Libre – paysagiste signent ensemble une étonnante métamorphose qui ouvre la parcelle avec une vue imprenable sur Rouen et souffle, à l’échelle du quartier et de la ville tout entière, un vent de fraîcheur régénératif et inspiré.



Conjuguer le passé au présent
Si le bâtiment et les éléments les plus emblématiques du site sont révélés et magnifiés par la restauration, c’est l’intention architecturale et paysagère globale, tirant parti de la pente, qui fait aussi bien oeuvre de mémoire que de création contemporaine. Conjuguant le passé au présent, le dialogue instauré entre le programme et le site, l’existant et le nouveau, raconte une nouvelle identité dotée d’un genius loci contemporain. Ainsi, si les façades, le clocheton, l’horloge, la porte cochère ont été restaurés, la toiture est aujourd’hui composée de panneaux solaires qui semblent invisibles parmi les ardoises.


L’architecture épouse la déclivité du terrain avec un jeu de lignes étirées et de pliages qui met en scène l’ancienne école. Avec ce parti pris, l’hôtel d’entreprises est intégré horizontalement dans la pente en toute discrétion vis-à-vis du bâtiment historique ou des constructions voisines. Son vaste atrium central apporte un maximum de lumière naturelle aux plateaux de bureaux qu’il dessert tout autour. Ce grand espace commun irrigue les espaces de travail au travers d’un jeu d’escaliers et de coursives généreuses.
À l’intérieur de l’hôtel, les qualités spatiales existantes – notamment les grandes hauteurs dans les chambres – ont été conservées tandis que l’aménagement reprend le vocabulaire sans faute d’orthographe ni de goût des institutrices qui hantaient les lieux, l’histoire et le confort moderne ne faisant plus qu’un.


L’extension de l’établissement, qui accueille les espaces communs, est également déployée horizontalement, à la façon d’un ruban, et semble s’encastrer, telle une lame, dans les fondations du bâtiment existant. Le parking de 187 places est lui-même souterrain pour n’altérer en rien le dessein. Cette conception sensible, compacte et furtive, a libéré l’espace d’un « Jardin des oeuvres » au centre du projet et l’invention, en contrebas, d’un vaste parc urbain aux ambiances singulières développé dans un principe d’espaliers alliant minéraux et végétaux.


Au travers de l’architecture et du paysage, il s’agit bien ici d’une régénération : un mot qui caractérise la renaissance aussi aboutie qu’inattendue de ce site emblématique de la Métropole Rouennaise devenu belvédère, carrefour d’accueil de publics divers et véritable lieu de mémoire.
