Diplômée en 2020, Margaux* travaille dans l’agence autrichienne Dietrich – Untertrifaller où elle fait son HMONP en CDD. Elle a fait ses études pour devenir architecte et entend à terme créer son agence. Verbatim.
[Devenir architecte du XXIe siècle]
Je travaille dans une agence fondée en Autriche dans l’héritage de l’école de Vorarlberg, une agence s’étant ainsi construite avec la volonté de poursuivre une pratique architecturale dans la continuité d’un enseignement.
L’agence compte maintenant une centaine de personnes, et ses quatre architectes associés sont également enseignants. Elle prend des stagiaires et des étudiants en alternance qui restent un an ou plus et intègrent ensuite l’équipe d’architectes ; en Autriche les études d’architecture sont étalées sur une dizaine d’années : on travaille en même temps qu’on apprend.
C’est ce fonctionnement que l’agence tente d’exporter en France au travers du bureau parisien de dix personnes dans lequel je travaille. Or il s’agit de deux modèles qui ne sont pas toujours compatibles. En Autriche dans la région du Vorarlberg, l’architecte dans la société est considéré au même niveau qu’un charpentier qui aura son propre savoir-faire, ils vont travailler tous les deux dans une dimension horizontale ; à Paris, il n’y a pas cette horizontalité.
En France, on n’accède pas à la commande de la même manière non plus. Ici, nous travaillons beaucoup en co-traitance, parce que les conditions d’accès à la commande publique engendrent des montages d’équipes complexes, où les acteurs du projet se multiplient – ce qui n’est pas toujours compatible avec le modèle autrichien et la figure de l’architecte qui est à l’agence, qui forme ses employés et qui leur donne une méthodologie, des clés, des processus de conception, pour défendre ses idées.
Certes cette différence de fonctionnement est source de créativité mais quand une agence s’appuie sur des convictions très fortes, il lui devient difficile de s’associer avec d’autres qui ne partageraient pas son approche théorique du projet.
[De la commande]
Je partage cette inquiétude d’accès à la commande, parce que j’ai envie plus tard de me lancer. Or je vois la complexité du processus d’accès à la commande pour l’agence dans laquelle je travaille, une agence bien implantée pourtant, je n’imagine donc pas y parvenir seule. Encore faut-il trouver les gens avec qui bien travailler tout en gardant le cap de ses convictions. A plusieurs, ce cap est difficile à maintenir parce que sa propre force de persuasion se dilue dans le nombre des acteurs du projet.
Propos recueillis par Christophe Leray (avec A.L.)
*Les prénoms n’ont pas été modifiés.
Retrouver les interventions …
– d’Estelle : « J’ai fait mes études en me disant que j’allais être architecte »
– de Raphaël : « Le champ disciplinaire de l’architecte passe par la fabrique du projet »
– de Marie et Melissa : « Au-delà de l’agilité à concevoir le projet, j’ai acquis de l’assurance »
– de Dimitri : « Enseignant, chercheur, praticien : j’ai envie d’être les trois ! »