L’hôtel est un lieu de passage où confort et services sont attendus. Etre de passage en ville, professionnellement ou touristiquement, demande un peu d’attention.
Pour autant, le regard de l’habitant des villes se porte peu sur cet objet. Le logement, les transports, les écoles, même les bureaux, sont des objets valorisés, l’hôtel bien moins… Erreur réparée avec l’exposition Hôtel Métropole – depuis 1818* au Pavillon de l’Arsenal dont le commissariat a été confié à deux journalistes, Catherine Sabbah et Olivier Namias.
L’hôtel, une histoire métropolitaine ? Pas tout à fait, ou du moins pas encore. Les chiffres qui ouvrent l’exposition donnent le vertige : en 2018, 52,5 millions de nuitées pour 2053 hôtels et 121 677 chambres dans le Grand Paris. A noter à ce propos le seul volet non exploré par l’exposition, celui de l’hébergement social, un sujet peu porteur d’images de voyage mais un hébergement d’urgence où la durée moyenne de séjour est de 28 mois…
La place de l’hôtel dans la ville n’est pas remarquable car elle ne procède pas de l’exceptionnel mais bien d’une intégration douce à la forme urbaine et son contexte. Sur le mur de photos de 1848, date d’ouverture du Meurice, et 1932, rien ne distingue les façades des hôtels des immeubles de rapport à proximité, l’hôtel est un immeuble bourgeois surmonté d’un fronton ou d’une marquise signalant son nom. Les hôtels suivent les styles de l’architecture et s’intègrent dans l’espace urbain avec naturel.
La seconde partie de cette frise se fait plus diverse, les voyageurs deviennent plus nombreux et le tourisme de masse va en augmentant. Les hôtels se standardisent pour répondre à la demande et sortent des classiques du luxe pour ouvrir des franchises et des concepts adaptés à tous les budgets. Les hôtels ne seront plus concentrés dans les centres urbains mais aussi à proximité des aéroports, des portes de villes, et des espaces de loisirs comme Disneyland.
Au-delà de l’insertion urbaine de l’hôtel, l’exposition montre encore que les implantations suivent le développement des territoires et il paraît normal que le Grand Paris adapte son offre hôtelière et que les promoteurs développent leur actif. C’est l’effervescence dans le mini monde de l’hôtel !
En dehors de la fonction d’hébergement, l’hôtel développe volontiers les nouvelles inventions. Les deux premiers ascenseurs sont mis en service en 1874, au Grand Hôtel. Le Régina couvre, en 1904, un de ses salons avec un plafond vitré amovible doté d’un système hydraulique. En 1908, les porte-serviettes du Chatham sont déjà chauffés à l’eau tiède.
L’intérêt d’un hôtel se cache à l’intérieur – que l’on voit peu dans cette exposition – une petite ville en miniature. L’hôtel a toujours apporté des services supplémentaires à ses visiteurs : bibliothèque, salon de coiffure, tailleur, cordonnier, piscine, boutiques, autant de service pour se démarquer. Ces services étaient avant tout destinés à être consommé par les clients.
Aujourd’hui, tiers-lieux en rez-de-chaussée, toits-terrasses avec brunch et bar, espaces de coworking, ou des jardins sur le toit pour les restaurants… A l’instar de la société elle-même, Les fonctions offertes par les hôtels suivent les mutations de la ville et s’ouvrent sur ses habitants.
Depuis 2001, 116 hôtels et 14 770 chambres ont été ouverts dans le Grand Paris, dont une grande partie résulte, pour le compte d’investisseurs ou d’exploitants, de la transformation d’immeuble tertiaires. D’ici 2024, pour les Jeux Olympiques, sur les terrains du concours ‘Inventons la métropole du Grand Paris’ et dans les quartiers de gare, l’Atelier parisien d’urbanisme (APUR) prévoit l’ouverture de 150 hôtels. Loin d’être caduc face à l’offre Airbnb, l’hôtel est un actif financier rentable que les investisseurs semblent apprécier et qui semblent pouvoir s’adapter face aux risques. La taxe carbone sur les voyages risque-t-elle de modifier les comportements ?
Le tour d’horizon que propose cette exposition permet de pénétrer dans ces lieux parfois remplis de mystère où finalement les Parisiens, et plus largement les habitants des grandes villes, ne vont jamais, ou si peu.
Julie Arnault