A Toulouse, il y a une formidable collection de 200 000 affiches qui étaient jusqu’à peu réunies dans un Centre de l’Affiche de Toulouse : le CAT. A l’occasion d’une banale mise en sécurité, Harter architecture a transformé ce CAT en MATOU élégant, le Musée de l’Affiche de Toulouse, livré en 2017. L’histoire peu banale de ce nouveau musée toulousain. Communiqué.
Par le biais d’un accord-cadre de son agence avec la municipalité toulousaine, Jérémie Harter s’était vu confier une mission de mise en sécurité du CAT, soit s’assurer de la sécurité des salariés et visiteurs du lieu et faciliter l’accès des personnes à mobilité réduite, des tâches essentiellement techniques.
Pourtant, l’architecte a d’emblée compris qu’il était possible de tirer un nouveau parti du lieu. Il en a bien sûr assuré la sécurité mais de telle manière qu’il est parvenu à donner aux petits espaces qui lui étaient confiés le lustre d’un musée. Il s’agit certes d’un tout petit projet de 180m² mais la fluidité de l’ensemble et la capacité à mettre son contenu – les affiches – en valeur, lui confèrent les qualités d’un grand musée.
Première grande transformation : l’entrée du CAT s’opérait par l’arrière, de manière cachée, celle du MATOU est clairement identifiée, imprimée dans la grande façade de briques qui donne sur l’allée Charles de Fitte.
Inspirée des oeuvres du grand maître italien Carlo Scarpa, la grille d’entrée affiche l’ambition du lieu tout en laissant le regard pénétrer à l’intérieur, de façon à ce que le passant puisse en jauger la profondeur. De grandes lames métalliques des parois du couloir vitré modifient l’échelle des deux courettes avant et arrière et révèlent le mur du fond. Ce dispositif, qui donne à voir le lieu en transparence, est aussi adapté à l’information des visiteurs.
Ces derniers, une fois la grille franchie, rentrent dans le musée par une porte à leur droite qui donne accès à une banque d’accueil et d’information, d’où ils sont aiguillés soit vers la salle d’exposition qu’ils atteignent en empruntant le couloir de verre et d’acier, soit vers les bureaux ou les salles de conservation. Les transparences rendent la circulation intuitive, renouant avec une fluidité qui s’était perdue avec le temps.
Se conformant aux exigences du secteur sauvegardé où il est situé – le MATOU est, en effet, un élément important du patrimoine du quartier Saint Cyprien, à proximités des célèbres Abattoirs – la cour datant du XVIIIe siècle est libérée de toutes les constructions qui l’avaient envahie.
Pour les expositions, Jérémie Harter a mis au point un système de grands panneaux suspendus, en acier noir mat, cimaises que les commissaires des expositions peuvent combiner de nombreuses manières selon la répartition de l’espace qui leur convient. Le dispositif d’éclairage est conçu pour se coordonner avec les multiples possibilités d’accrochages de ces panneaux. De façon à ne pas les endommager, les affiches seront tenues par des aimants.
Deux autres surfaces d’exposition sont également accessibles : celle de chevalets conçus dans le même esprit que les panneaux suspendus et le mur aveugle qui borde l’allée Charles de Fitte, volontairement laissé dans un état brut – les briques ont été simplement badigeonnées à la chaux – de façon à ce que des collages successifs lui donnent une allure de mur urbain transposé à l’intérieur.
D’une banale mise en sécurité est ainsi né un musée.
L’affiche a désormais un lieu à sa mesure, dans une architecture qui étonne par la capacité transformatrice qu’elle a déployée, instillant de la grandeur là où la place manquait, offrant avec très peu de moyens une parade juste et précise à des contraintes rigides. L’impossibilité de repousser les murs est généralement admise comme une donnée intangible. Pourtant le MATOU n’est plus corseté comme l’était le CAT et il invite au voyage, thème de la première exposition qui s’y déploie avec les affiches de Roger Broders.
F. L.