Après avoir assisté le 3 avril 2023 à l’assemblée générale (AG) des étudiants de l’école d’architecture de Malaquais*, Chroniques a été recontacté pour témoigner d’une action coup de poing contre l’administration de la prestigieuse école. Reportage.
Insatisfaits de la tournure que prend leur blocus, les élèves de Malaquais ont cette fois envahi la rue Bonaparte, en plein quartier de Saint-Germain-des-Prés à Paris (VIe), avec pour objectif de porter leur message au-delà de leur établissement.
Vendredi 7 avril, midi. Le printemps commence lentement à s’installer dans les rues de la capitale. La veille au soir, message de la part de la commission étudiante de Malaquais. Apparemment, il y a du mouvement. La mobilisation contre la réforme des retraites a, en effet, laissé place à la contestation en interne. Apparemment, tout n’est pas rose au sein de l’établissement, les apprentis architectes ont l’air remonté.
Chroniques est accueilli par Baptiste et Xavier, étudiants en deuxième année et engagés dans ce blocus qu’ils veulent exemplaire : pas de débordements, pas de souk inutile. Les jeunes sont là pour faire comprendre à quelques-uns de leurs professeurs que l’école va mal. A l’entrée, des panneaux de toutes les couleurs et des slogans ornent le grillage. Une trentaine d’étudiants motivés incitent les automobilistes à klaxonner pour exprimer leur soutien. Cela marche plutôt pas mal, nombre de conducteurs lambda heureux de montrer leur support du moment qu’il s’agit d’une lutte. Légalement, ils ont tous un gilet jaune dans le coffre.
Question pour les deux accompagnants : qu’est-ce qui a bien pu provoquer une telle évolution de la situation, sachant que quelques jours auparavant, ils assistaient pacifiquement à une réunion en compagnie de quelques profs engagés ?*
Réponse de Baptiste, caftan et cravate : « En fait, ce qu’il s’est passé est qu’’hier, ils ont fermé des bâtiments et des espaces en nous faisant porter le chapeau. Nous sommes tous un peu déçus et étonnés car jusqu’ici, nos actions se passaient vraiment bien avec les professeurs. Mais là, on assiste à un retournement de veste, c’est très désagréable », dit-il. Ils ? Qui sont-ILS ?
Baptiste explique que, lors des AG précédentes, il avait été en bonne intelligence décidé de deux jours de mobilisation des étudiants par semaine. « Nous ne voulons pas d’un blocage bête et méchant, nous ne sommes pas en vacances. Nous voulons aller en cours, tout en montrant bien que nous sommes plus que jamais mobilisés. Le problème est que l’administration a exigé un vote, auquel ont d’ailleurs pris part 400 étudiants sur 700, mais malgré le résultat en notre faveur, tout nous a finalement été refusé par veto ».
Diantre !
49.3 ?
« Exactement ! », s’exclame Xavier. « C’est absurde vu comme ça mais c’est exactement ce à quoi nous assistons ! Des étudiants n’adhèrent pas forcément à nos actions coup de poing mais finissent eux aussi par penser que cela commence à bien faire ! L’administration exige de nous que l’on fasse les choses proprement et quand on s’organise, ils nous refusent tout, c’est n’importe quoi ».
Il faut évidemment se méfier d’ouï-dire et de radio-trottoir mais la frustration de Baptiste est patente. Ce dernier me guide au sein de l’école. « Rendez-vous compte, il n’y a ici aucune poubelle ici, aucun tri sélectif, c’est un paradoxe dans une école d‘architecture ! Il nous revient de trier des montagnes d’ordures pour les jeter ailleurs, c’est n’importe quoi ! ». Du réemploi en guise de concept pédagogique
Un détail sans doute mais, pendant la visite, ne sont-ce pas là des poules sur la pelouse ? « Ah bah si, c’est ce que nous avons trouvé de mieux pour faire comprendre à l’administration l’absurdité de la situation ; les poules sont là pour manger les épluchures de carottes et de patates, vu qu’on n’a nulle part où les jeter ». L’ENSA Malaquais avec bientôt des airs de Z.A.D ?
Le vendredi 14 avril est prévue une journée générale de blocage des ENSA. Le ministère de l’Education supérieur et de la recherche, ou est-ce celui de la Culture ?, a sans doute prévu ce jour-là une réunion quelque part à ce sujet.
Kyrill Kotikov
*Lire notre article À l’ENSA Malaquais, la révolte pacifique des étudiants