L’agence parisienne Atelier D (Mattias Piani, Vanessa Grob), en association avec AR architecture, signe le siège de la communauté européenne à Bujumbura, la capitale du Burundi. Bâtiment de bureaux de 1 800 m², pour un budget de 2 M€, le programme comprend bureaux, accueil de public et salle de conférences. Pour la Délégation Européenne, dans la lignée de sa «stratégie de partenariat» en matière de sécurité et de développement entre l’Union Européenne (UE) et l’Afrique à l’horizon de la prochaine décennie, l’ouvrage devait correspondre à sa volonté de créer un signal fort. Communiqué.
Cette stratégie de l’UE fait écho à une démarche globale dans la région de développement durable répondant aux besoins en matière de paix, de sécurité, de gouvernance, de commerce, de cohésion sociale et de viabilité écologique. Ce qui, au Burundi, peut-être le pays le plus pauvre du monde, n’est pas gagné.
Atelier D a gagné le concours en 2010 mais les travaux n’ont débuté qu’en janvier 2017.
Contexte
Le terrain se situe dans le quartier asiatique qui date de l’ancienne époque coloniale allemande. Il accueille des bâtiments des années 50 et des établissements plus récents.
La structure urbaine est très peu dense. La rue du 13 octobre, où est construit le bâtiment, est large, donnant une lecture de «quartier périphérique», avec un espace de circulation piétonne qui n’est pas traité de façon continue, se confondant avec les zones de stationnement et les à coté végétalisés.
Le bâtiment proprement dit, dans son implantation, son gabarit et son traitement vient compléter et affirmer de façon forte la dimension à la fois institutionnelle, stable, ouverte et transparente des services de l’Union européenne.
Le projet occupe une implantation centrale dans la parcelle. Il est positionné délibérément en retrait de l’alignement afin de préserver l’intimité du lieu mais également le front végétal constitué de manguiers très valorisant pour le site.
Parti pris architectural
Ce projet exprime tout à la fois :
– via une occupation équilibrée de la parcelle, l’ancrage au sol de ce pays,
– via sa masse la solidité des liens avec ce dernier,
– via sa matière, son engagement pour la viabilité écologique et la valorisation des cultures locales.
Le bâtiment a été conçu avec la matière terre, à l’image de nombreuses constructions africaines. Construire en terre, au Burundi, c’est répondre de façon pertinente aux contraintes climatiques et à la préservation des ressources locales.
En effet, construire en terre confère aux lieux un grand confort climatique grâce à son inertie thermique : elle garde une température constante et écrête les pics de chaleur.
Sur le plan hygrométrique, les parois en terre peuvent absorber une quantité d’humidité plus importante que la plupart des autres matériaux de construction. En absorbant l’humidité quand elle est en excès, puis en la restituant quand elle manque, la terre permet d’améliorer le confort intérieur, d’empêcher les phénomènes de condensation et le développement de moisissures.
Sur le plan esthétique, la terre permet une grande variété d’aspects de surface selon les modes de mise en œuvre choisis, des parois brutes aux surfaces finement travaillées. La gamme des couleurs est très large : on trouve non seulement les classiques allant du blanc et beige aux ocres jaunes et rouges voire bruns, mais aussi tout le spectre des verts et des gris, dans des nuances claires ou sombres.
Les juxtapositions et les contrastes obtenus avec différentes terres, ou entre la terre et d’autres matériaux naturels, sont toujours harmonieux.
La structure poteau-poutre en béton est remplie en briques de terre cuite pleines moulées sur place. Les murs double-brique ventillée, la ventilation naturelle et la climatisation d’appoint permettent un rafraîchissement par évaporation (évapotranspiration des végétaux) favorisant un microclimat frais durant les heures les plus chaudes de la journée tandis que les panneaux solaires photovoltaïques offrent une autonomie de fonctionnement impérative dans un pays sujet aux coupures d’électricité.
Le projet propose une trame régulière, un tracé simple et une modularité qui permettent une redistribution des espaces au cours de la vie du bâtiment. Les cloisons séparatrices des locaux, en plaques de plâtre avec isolant phonique, sont décloisonnables et recloisonnables en cas de changement, car elles ne comporteront pas de réseaux ni d’équipements fixes. Ceux-ci seront implantés en façade ou en cloison sur circulation, ou en faux plafond ou plancher.
L’ensemble du bâtiment est accessible aux personnes à mobilité réduite.