Un soubassement transparent et ouvert, un étage en retrait et protégé, des combles opaques et fermés, un patio et jardin intérieur pour protéger l’intérieur de la rue, des terrasses à tous les étages… Ce ne sont que quelques-unes des bonnes idées pour cette maison de ville à Rennes (35) réalisée par l’architecte Jacques Pichon.
Présentation de Jacques Pichon, architecte (Dinan (22) et Rennes (35).
“La silhouette de la maison – 9m de haut sur deux niveaux surplombés d’une ‘petite boîte’ (rires) – s’inscrit dans la logique architecturale de la rue, tant en gabarit qu’en hauteur. La seule contrainte que le quartier imposait était de ne pas créer de faille entre les maisons existantes, les accroches sont donc un peu différentes selon les côtés. Cela dit, aussi longtemps que nous respections cette cohérence par rapport à la rue, nous avons eu toute liberté pour nous exprimer dans le cadre du permis de construire.
Les contraintes du client n’étaient pas complètement abouties, dans le sens où il demandait ce qui est ‘chez tout le monde’. Notons quand même le désir d’une maison légèrement retirée, en creux, par rapport à la rue et l’exigence d’un petit patio pour la porte d’entrée qui offre une transition entre la rue et la maison proprement dite. Pour le reste, la maison telle qu’elle est construite est donc le résultat d’un dialogue très poussé entre l’architecte et le client. Ce dialogue a pour but tant de dévoiler les souhaits réels des clients que de recadre ces derniers dans le cadre des contraintes des règles d’urbanisme et du budget. C’est en essayant de trouver les bonnes objections (rires) que nous avons peu à peu élaboré le ‘programme’ de la maison.
De cette façon, nous avons choisi le zinc en façade arrière sur le jardin, après avoir pris le parti d’une petite boîte avec terrasse au troisième étage – plutôt qu’une structure en deux étages -, ce niveau supplémentaire permettant d’offrir une vue sur l’horizon malgré l’implantation en ville. Le même échange a eu lieu pour ce qui concerne les matériaux. L’architecte et le client cherchent à être en phase de personne à personne au niveau de l’architecture, les compromis devant respecter les désirs du client sans pour autant nier à l’architecte une certaine honnêteté “artistique”, à charge pour lui d’être pédagogue et d’expliquer sa démarche.
En l’occurrence la discussion a été d’autant plus facilitée que ce client nous a contacté après avoir vu notre travail, lequel nous permet de capter des amoureux de l’architecture. C’est un détail important car, alors que les mutations professionnelles et géographiques se font plus courantes, les gens privilégient parfois une recherche d’efficacité – en clair pouvoir revendre vite et au meilleur prix – au détriment du plaisir d’habiter une maison vraiment à soi. Ici nous avions affaire à une famille qui voulait ‘Sa’ maison. Comme les maîtres d’ouvrage avaient peu de temps à y consacrer du fait de leur activité, nous avons tenté de répondre à toutes leurs questions et proposé au final cette maison (prête à finir en ce cas) de 214m² + 50m² en annexe pour un coût final de 258.000 euros.
C’est une maison ‘classique’ au sens où il s’agit d’un enduit sur parpaings. Mais tous les restaurants peuvent acheter des pommes de terre et des carottes, cela ne signifie pas que l’on mange partout la même cuisine (rires). Plusieurs particularités en font une maison intéressante. Les propriétaires sont notamment très heureux du troisième étage – qui compte une chambre, une salle de bains, un bureau et une terrasse -, des combles opaques ouvrant sur le jardin. Le petit patio, doté d’un jardin intérieur, est une vraie bonne idée. Il permet de se couper du bruit de la rue. De plus, il s’agit d’un endroit psychologiquement important ; en effet, quand quelqu’un sonne à la porte, nul n’a ainsi le sentiment de “l’envahissement” de son intimité. C’est enfin un endroit où les enfants peuvent ranger les vélos.
L’intérieur offre des volumes classiques. Un grand espace cuisine, salon, séjour donnant sur la terrasse au rez-de-chaussée, qui compte par ailleurs une bibliothèque. A l’étage, trois grandes chambres ainsi qu’un espace polyvalent donnant sur la terrasse (plus une salle d’eau et une salle de bains). Dans ce cadre, nous avons souhaité offrir des perspectives intérieures. Par exemple, l’on voit au travers de l’escalier même si cela, en contrepartie, a quelques inconvénients d’un point de vue acoustique. Cette conception permet au soleil de rentrer dans la maison ici ou là selon la saison ou le moment de la journée, créant des halos d’ombre et de lumière et des vues sans cesse renouvelées. La cheminée en métal, bien visible, est conçue comme un élément de décoration. En façade nous avons opté pour un habillage en bois (red cedar) qui permet de ‘réchauffer’ l’ensemble d’autant que les menuiseries de couleur foncée offrent un contraste complet entre les baies et les murs. Les balustrades ont été fabriquées en métal car ce matériau offre une vraie souplesse de conception”.
Propos recueillis par Christophe Leray
Cet article est paru en première publication sur CyberArchi le 30 mai 2007