Le photographe Antoine Duhamel fournit aux architectes une trace saisissante et permanente de leur projet dès lors que demeure la liberté du photographe.
Libre comme un feu qui danse
Encouragé par le souffle du vent
J’ai retrouvé mon errance
Qui m’attendait sous un ciel criblé d’étoiles
Sanglée de ténèbres et le mors aux dents
N’attendant qu’un signal.
Jacques Higelin
J’ai fait ma première photographie le jour de mes huit ans, avec un appareil en plastique noir et bleu qui fonctionne encore. C’était le cadeau de mes grands-parents ; je suis sorti de notre maison et j’ai imprimé sur un film micro 110 le soleil, le vent et le toit des pavillons en contre-jour. Ma première photo. Sur le même film on voit plus loin les volcans d’Auvergne et un gratte-ciel à New York.
Au départ, j’étais jeune et immortel. C’était certain, j’allais être à tour de rôle astrophysicien, peintre, philosophe, sociologue, sculpteur, architecte et botaniste. Il faut commencer par quelque chose et le « métier » de photographe m’est apparu comme le passeport idéal pour être tout à la fois. Si je désirais participer à une expédition en Amazonie ou accompagner un peintre dans ses recherches, j’en aurais la possibilité. C’était vrai.
Dix ans plus tard, avec un bac S et des aptitudes pour le dessin, je pars étudier la photographie à Milan. Les commandes d’architectes se sont enchaînées dès la fin de mes études en 2004 et m’ont très vite offert de beaucoup voyager. J’ai profité de ces missions autour du monde pour découvrir et photographier ces villes et leurs habitants qui m’étaient inconnus. Stockholm, Cracovie, Zadar, Nairobi, Shanghai, Delft, Lisbonne, Hambourg, Bucarest, Hong Kong, Istanbul, Longyearbyen, la Nouvelle-Orléans, Cape Town…
Vingt ans plus tard, je pense aux hasards qui m’ont mené dans ces lieux. L’insatiable curiosité qui a fait de moi un photographe, un penchant évident pour l’aventure, le besoin de savoir, de découvrir toujours plus.
J’enfonce certainement une porte ouverte mais, à l’heure du télétravail, la mobilité et la liberté qu’offre la photographie sont un précieux trésor.
Libre de pouvoir sauter dans un train, un avion, avaler les kilomètres et changer d’horizon. Parler à des inconnus, dans une langue étrangère. Libre de pouvoir s’arrêter aussi. Parfois longtemps, pour saisir la bonne lumière ou l’événement – passant, nuage – qui équilibrera l’image et lui donnera du sens. Comme sur cette photo du New York Times qui ouvre l’album. Trois heures dans le froid du mois de février, à attendre qu’un camion Coca-Cola traverse le cadre.
Libre de revenir sur ses pas, libre d’aller sur l’autre rive. Libre de cadrer horizontal ou vertical, libre d’opter pour le noir et blanc ou la couleur et autres choix : quelle dominante, quel contraste ? Une infinité de possibles qui donne le vertige.
Vingt ans ont passé, comme cela, à voyager, à faire des photos. Beaucoup de photos. Elles parlent à chaque fois de la liberté qui restera toujours pour moi la grande force du photographe.
Antoine Duhamel
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