Santiago Calatrava, pour parler de ses projets, parle de lui. «Il m’a été difficile de ne pas succomber en partie à l’autobiographie», écrit-il. L’historien de l’art Giulio Carlo Argan analyse l’œuvre et, plus largement, la pensée et la personnalité de Walter Gropius. Henri Raymond, après avoir convoqué les grands noms de l’histoire de l’art, de l’ethnologie et de la philosophie se penche sur le grand paradoxe de l’architecture.
Walter Gropius et le Bauhaus, par Giulio Carlo Argan
Grand architecte et théoricien moderne, Walter Gropius fut aussi le fondateur et le premier directeur de l’école du Bauhaus de 1919 à 1928. Inscrite dans la crise allemande de l’entre-deux-guerres, cette institution se propose comme un instrument de réforme visant à créer un modèle social inédit pour fonder un rapport positif entre l’artiste et la société, entre l’art et la technique.
Cette recherche d’une finalité sociétale et éducative différente est perçue comme l’indispensable outil de construction d’une nouvelle civilisation, plus juste, plus équitable et moins violente. En 1933, le régime nazi mettra un terme à cette expérience intellectuelle et artistique qui marquera néanmoins en profondeur tous les domaines de la création au XXe siècle.
L’historien de l’art italien Giulio Carlo Argan analyse avec enthousiasme l’œuvre et, plus largement, la pensée et la personnalité de Walter Gropius pour qui design industriel, architecture et urbanisme sont unis et traversés par une même valeur civique. Depuis sa première publication en 1951, cet essai n’a cessé de susciter des exégèses qui en font l’ouvrage historique et critique de référence sur l’une des figures centrales du Bauhaus.
«Nous formons une nouvelle communauté d’ouvriers, sans distinction de classe. Distinction qui dresserait un mur d’arrogance entre l’artisan et l’artiste. Nous concevons et créons ensemble le nouvel édifice de l’avenir qui embrassera archi¬tecture, sculpture et peinture dans une seule unité et qui, s’élançant vers le ciel, surgira des mains de millions de travailleurs, comme le symbole cristallin d’une foi nouvelle». (Manifeste du Bauhaus, 1919)
A propos de l’auteur : Giulio Carlo Argan (Turin, 1909 – Rome, 1992), historien, critique d’art, écrivain, est connu pour son engagement dans la critique de l’art, son enseignement, l’analyse et la sauvegarde du patrimoine, mais aussi dans l’action politique : membre de la gauche indépendante, il fut maire de Rome (1976-1979), puis sénateur (1983-1992). Qu’ils traitent d’architecture, d’urbanisme, d’art, de muséologie, de design, du rapport entre l’art et la technique ou encore de la fonction éducative de l’art, ses écrits ont donné lieu à plus d’un millier de publications.
Edition Parenthèses ; Walter Gropius et le Bauhaus, par Giulio Carlo Argan ; Traduction de l’italien par Elsa Bonan, présentation de Marie Bels ; Collection : Eupalinos / A+U ; Broché ; 224 pages ; format : 15 × 23 cm ; illustrations, liste des œuvres, bibliographie ; Prix : 18 €
L’architecture, les aventures spatiales de la raison, par Henri Raymond
Lorsqu’on parle d’architecture en France, il semble qu’on affronte un inextricable imbroglio ; de quoi parle-t-on en effet ? Des plans produits à la suite de concours internationaux, des logements fabriqués en France depuis 1945, des idées des architectes sur le bonheur de vivre, des maisons sur catalogue ?
Des faits bien établis montrent que l’architecture ne se produit pas dans le vide de l’esthétique et même, qu’elle nous renseigne sur la société dans laquelle elle surgit. Aspect de l’activité humaine hautement spécialisé, elle nous fait entrevoir une «raison spatiale» dont les fantaisies commencent à la Renaissance italienne et ne cessent plus, depuis, de nous confondre d’admiration et d’inquiétude.
Dans la première partie de l’ouvrage, Henri Raymond convoque les grands noms de l’architecture, de l’histoire de l’art, de l’ethnologie, de la philosophie – de Léonard de Vinci à Bourdieu, en passant par Ferdinand de Saussure, Bruno Zevi, Le Corbusier, Francastel, Emmanuel Kant, Françoise Choay, Claude Lévi-Strauss… Il expose leur idéologie de l’espace à travers les différentes conceptions de l’architecture.
Dans la seconde partie, il se penche sur le grand paradoxe de l’architecture, activité qui porte principalement sur la vie quotidienne et qui, dans le même temps, s’efforce de toutes les manières de s’en évader. Il part ainsi du constat que les habitants d’un ensemble ne sont jamais invités à faire connaître leur point de vue, sinon lorsque l’essentiel est fait. Or, la banalité, fait-il remarquer, dissimule souvent la découverte, l’insignifiance, le sens véritable.
Surtout, Henri Raymond oblige à se poser la question de la validité des formes produites par l’architecte et l’urbaniste, qui guident inconsciemment la production d’un espace dans lequel les habitants sont priés de s’adapter.
«La parole des habitants semble un mélange peu discernable de banalité et de contradictions. Quand on entend des habitants d’un grand ensemble situé sur un terrain complètement gazonné se plaindre du manque ‘d’espaces verts’, on est porté à mettre sur le compte de la bêtise, de l’emploi incontrôlé du vocabulaire, ce que l’on enregistre. Or, le manque d’espaces verts, ici, c’est l’absence de squares, la déficience des équipements comme les jardins, bref, ce qui fait la ville. La parole de l’habitant est bien plus subtile qu’il n’y paraît au premier abord».
A propos de l’auteur : Henri Raymond, né en 1921. Professeur émérite de sociologie, université de Paris X. Il est un disciple d’Henri Lefebvre, qui fut son professeur au lycée avant de devenir son maître à penser tout au long de sa carrière. Spécialiste en sociologie de l’urbanisme et de l’architecture, le parcours d’Henri Raymond emprunte à d’autres disciplines. Il traverse des champs aussi divers que l’urbain, le loisir, l’architecture et la méthode mais aussi la philosophie et la poésie.
Edition Parenthèses ; L’architecture, les aventures spatiales de la raison, par Henri Raymond ; Présentation de Jean-Pierre Frey ; Collection : Eupalinos / A+U ; Broché ; 256 pages ; format : 15 × 23 cm ; bibliographie, index ; Prix : 18 €
Santiago Calatrava : Force, mouvement, forme, Entretiens
«Je n’ai pas trouvé de meilleure façon de vous présenter mes réflexions sur la construction qu’à travers mes propres projets. Comme un auteur qui écrirait son premier livre, il m’a été difficile de ne pas succomber en partie à l’autobiographie…»
Santiago Calatrava recherche sans se cacher l’unité entre l’art et la science. L’observation et l’analyse de la géométrie des formes de la nature (en particulier du corps humain), son ouverture à l’approche métaphorique et le brio de ses représentations stimulent une exploration créative des volumes, de l’espace, de la lumière et même de la cinétique.
L’usage théorique de l’ingénierie lui permet non seulement de maîtriser ses projets de la conception à la réalisation, mais il se voit sans cesse remis en cause dans un fécond dialogue entre invention formelle et principes scientifiques.
Dans ces trois entretiens avec les étudiants du Massachusetts Institute of Technology, l’architecte partage sa connaissance des matériaux en revenant sur les principaux ouvrages de ses premières années de praticien.
A propos de l’auteur : Santiago Calatrava est l’un des plus importants praticiens actuels, œuvrant au carrefour de l’architecture et de l’ingénierie. Né en Espagne en 1951, il dirige une agence à Zurich et une autre à Paris. Novateurs et résolument expressifs, ses ouvrages d’art et croquis démonstratifs ponctuant les phases de conception sont la marque d’une œuvre où architecture et construction sont intimement liées.
Edition Parenthèses ; Santiago Calatrava : Force, mouvement, forme, Entretiens ; Traduit de l’anglais par Jacques Bosser, Collection : Eupalinos / A+U ; Broché ; 96 pages ; format : 15 × 23 cm ; photographies et dessins ; Prix : 11 €