Parmi la moisson éditoriale de cette année 2023, la rédaction a retenu un destin, celui de l’architecte Simone Guillissen-Hoa, un essai de Richard Neutra, une boîte à outils réversibles d’Anne Démians, une conversation entre Chemetov et Mimram, une histoire d’Architecture Studio, un traité d’urbanisme et un ouvrage savant. Bonne lecture !
Un destin
Simone Guillissen-Hoa 1916 – 1996
Née à Pékin en 1916, d’un père chinois, ingénieur, et d’une mère polonaise, écrivaine ; scolarisée à Paris à l’âge de 12 ans, étudiante en Angleterre puis en Belgique, diplômée à Bruxelles en 1938, Simone Guillissen-Hoa participe à l’aventure architecturale du XXe siècle.
Caroline Mierop raconte la vie hors normes de cette femme, eurasienne, militante, résistante, déportée, mère célibataire, auto-entrepreneuse. Elle évoque ses amis et ses amours, ses doutes et ses avancées, ses clients et ses réalisations. Elle présente la première monographie de cette « grande dame de l’architecture » à laquelle, jusqu’ici, aucune publication n’a été consacrée.
Plume avertie et souple, l’auteure propose à la fois un récit intense et un travail fouillé, rassemblant de nombreux témoignages et documents d’archives inédits, et sept « portraits-souvenirs » signés Jean-Pierre Hoa.
À propos de l’auteur : Caroline Mierop est architecte et urbaniste. Avec la participation de Jean-Pierre Hoa, architecte
Editeur : Prisme Editions ; Simone Guillissen-Hoa 1016 – 1996, de Caroline Mierop ; 240 pages ; Format : 17,00 x 24,00 cm ; Broché ; Prix : 35€
Un essai
Vie et forme, Richard Neutra
Depuis un demi-siècle, toutes sortes de projets destinés à accueillir l’homme, la femme et l’enfant, leurs activités et la communauté tout entière, ont occupé mon esprit : quartiers d’habitat, écoles, hôpitaux, églises, théâtres, collèges, ambassades à l’étranger, bâtiments pour les entreprises et les compagnies d’assurance et jardins d’enfants. Mais rien n’est plus instructif pour un architecte qu’un client qu’il peut voir en chair et en os. Un architecte n’acquiert nulle part autant d’« expérience clinique », comme la qualifierait un médecin, que lorsqu’il voit les membres d’une famille pour laquelle il conçoit une habitation et prend toutes les dispositions matérielles pour que celle-ci ait un long avenir.
Le bonheur pour toujours n’est pas facile à assurer, mais il ne peut être atteint que par le plus grand dévouement et la plus grande perspicacité dans la compréhension de ce qui rend les êtres humains heureux – ou de ce qui les perturbe. Un architecte qui applique concrètement les sciences de la vie à la vie elle-même apprend mieux lorsqu’il conçoit des maisons. Cette pratique l’aide et lui permet de développer l’ensemble des autres projets liés à l’être humain. Tout ce qu’il crée est destiné à réaliser le bien-être humain organique.
À l’avenir, l’architecture, telle que je l’ai considérée dans le passé, dépendra d’une connaissance approfondie de la nature et surtout de la nature de l’homme, même si elle est envahie par ses créations artificielles brevetées. Nous devons aimer l’être humain et le comprendre si nous voulons le servir.
Richard Neutra, Life and Shape, 1962
À propos des auteurs :
Architecte américain d’origine autrichienne, Richard Neutra (1892-1970) est considéré comme l’un des plus importants architectes du Mouvement moderne. L’architecture de ses maisons individuelles a pour ambition d’établir de nouveaux rapports entre l’espace intérieur et l’environnement.
Pierre Lebrun est architecte, docteur en histoire de l’art et chercheur au Laboratoire architecture, conception, territoire, histoire, matérialité (Lacth) de l’École nationale supérieure d’architecture et de paysage de Lille. Il est le traducteur des trois ouvrages de l’architecte et historien de l’architecture canadien Peter Collins (1920-1981).
Editeur : Editions Hermann ; Vie et forme, Richard Neutra, traduit par Pierre Lebrun ; 300 pages ; Format : 17,00 x 24,00 cm ; Broché ; Prix : 29€
Des solutions
La Réversibilité des bâtiments pour une ville décarbonée
Concevoir des bâtiments réversibles, par Anne Démians Architecture
La ville de demain devra s’adapter à des modes de vie en perpétuelle mutation tout en étant peu émissive en carbone. Dans cet objectif, cet ouvrage – qui s’inscrit dans le prolongement d’une réflexion initiée par Anne Démians dès 2008, à travers le projet Basic Carbon, lauréat du concours lancé par EDF, et qui s’est concrétisée en 2019, avec la livraison des célèbres Black Swans à Strasbourg – propose de faire évoluer les mécanismes de décision et la réglementation, afin que soient considérés l’évolution rapide des usages des bâtiments et les rythmes économiques de plus en plus soutenus dans la construction d’une ville et d’architectures durables.
Pour cela, deux approches sont considérées : la transformation des immeubles existants et la conception de bâtiments neufs réversibles. La réversibilité est l’« aptitude d’un ouvrage, neuf ou existant, à changer facilement d’usage plusieurs fois dans le temps » (source : AQC), grâce à une conception qui permet de limiter l’importance et le coût des futures adaptations nécessaires à son changement de destination.
À propos de l’auteur : Diplômée de l’École Nationale Supérieure d’Architecture de Versailles, Anne Démians crée sa première agence en 1995. Dix ans plus tard, elle fonde l’agence Architectures Anne Démians qui compte aujourd’hui 30 collaborateurs. Elle conçoit et réalise des ouvrages de nature et de destinations différentes, accompagnée par des équipes d’architectes élargies à des ingénieurs et designers.
Editeur : Editions Le Moniteur ; La Réversibilité des bâtiments pour une ville décarbonée, par Anne Démians Architecture ; 136 pages ; Format : 19,10 x 27,00 cm ; Broché ; Prix : 29€
Une conversation
Construire Paul Chemetov Marc Mimram
Dans Construire, Paul Chemetov et Marc Mimran poursuivent un dialogue entamé il y a plus de 45 ans. « Construire, c’est donner forme. Construire, ce n’est pas seulement assurer la stabilité et la tenue dans le temps de tout bâtiment, le rendre étanche aux intempéries, l’adapter aux évolutions climatiques ; construire ce n’est pas seulement répondre à un programme, respecter un budget, se conformer aux normes. Ces conditions ne sont pas suffisantes pour donner forme au projet. D’autant que l’architecture, par ce qu’elle révèle et rend possible, est un art social qui ne peut être réduit à l’esthétisation des situations ».
À propos des auteurs :
Paul Chemetov, né le 6 septembre 1928 dans le XVIe arrondissement de Paris, est un architecte et urbaniste français.
Marc Mimram, né le 6 février 1955 à Paris, est un ingénieur et architecte français qui s’est illustré dans de nombreuses réalisations, aussi bien d’ouvrages d’arts que de logements ou d’équipements publics.
Editeur : Editions du Linteau ; Construire, Paul Chemetov et Marc Mimram ; 80 pages ; Format : 11,20 x 17,50 cm ; Broché ; Prix : 21€
Memory Lane
Architecture Studio en liberté
L’agence-époque, par Jean-Louis Violeau
« Agence-époque », Architecture Studio a grandi avec son temps, depuis sa fondation en 1973, en exprimant toujours les grands moments des périodes qu’elle a traversées, qu’ils soient empreints d’espoir ou signes de préoccupation. Les années soixante-dix, l’effervescence du militantisme, le mouvement Mars 76 et la création du syndicat de l’architecture, le contre-concours des Halles, l’élaboration de logements sociaux avec la participation des habitants… Viennent ensuite les années Mitterrand, l’Institut du monde arabe et les grands projets issus de la décentralisation. Dix ans plus tard, le Parlement européen de Strasbourg annonce une mondialisation qui passera d’abord par la Chine et l’Asie avant d’atteindre le continent africain. L’ouverture d’une maison commune à Venise en 2010 ainsi que le scénario et le plan d’une ville verte pour le nouveau centre de Kaboul en Afghanistan marquent le point culminant de cette époque.
Les scènes et les géographies s’y emboîtent : d’abord Paris, sa région, puis la France, l’Europe, le monde enfin.
Attentive aux cultures traversées et au diapason des époques, porteuse et portée par elles, Architecture Studio met en forme des programmes et des imaginaires variés. Fondateurs de l’agence, Martin Robain, Jean-François Bonne et Rodo Tisnado, ont voulu ce livre pour transmettre un passé qui nous traverse. Mieux connaître notre histoire dans l’histoire nous rendra toujours un peu plus talentueux.
À propos de l’auteur : Jean-Louis Violeau est sociologue, professeur à l’École nationale supérieure d’architecture de Nantes et enseignant à Sciences-po Paris, il travaille depuis une trentaine d’années sur les architectes, leur histoire, les élites, leur formation et la succession des générations, et les multitudes, les destinataires à travers leurs usages et leurs pratiques.
Editeur : Editions Hermann ; Architecture Studio en liberté, par Jean-Louis Violeau ; 200 pages ; Format : 17,30 x 23,00 cm ; Broché ; Prix : 20€
Urbanisme
Plus loin, plus proche – Planifier une ville durable et solidaire
Par Jean-Louis Subileau, Guillaume Hébert, Anna Cremnitzer, Sébastien Harlaux
La ville et les territoires sont sous tension. Il y a quinze ans, il était coutumier d’affirmer, face aux utopies urbaines déclarées et aux récits journalistiques enflammés, que l’essentiel de la ville du futur était déjà là. L’objectif était de faire » la ville sur la ville « , de réhabiliter les centres, de prolonger raisonnablement (et avec talent) le canevas de la trame et des réseaux existants.
Nous savons aujourd’hui que cet urbanisme sage, équilibré, raisonné, n’est pas une réponse à la mesure du changement climatique et des mutations technologiques. Même si la démarche de décarbonation pousse à la conservation de l’existant, l’ampleur des défis écologiques va produire à grande échelle des bouleversements spatiaux, sociaux et sociétaux que nous pressentons sans pouvoir encore en mesurer la nature, le rythme et la dimension systémique. La conscience de l’incertitude invite à l’expérimentation, à la mobilisation des sciences et de l’imaginaire.
La recherche de réponses requiert une œuvre collective et une haute exigence, intégrant un éventail de disciplines de plus en plus large dans une combinatoire urbaine originale. Cette ligne de conduite est depuis 2008 celle d’Une Fabrique de la ville. Ce livre en est le reflet au travers de quelques exemples de missions urbaines et territoriales caractérisées par une temporalité longue et une grande diversité des échelles et des lieux d’intervention. Avec une conviction constante : la ville est le bien commun par excellence.
Plus loin, plus proche : tenir le cap environnemental et climatique impose de regarder au loin dans le temps et dans l’espace et, simultanément, d’être plus attentif à la proximité, aux usages, aux conditions de vie, en particulier des personnes les plus vulnérables. Cette double injonction, rendre la ville durable et solidaire, est un grand défi démocratique.
À propos des auteurs :
Jean-Louis Subileau est diplômé de l’Institut d’études politiques de Paris.
Guillaume Hébert est diplômé de l’École d’architecture de Lyon et titulaire du mastère Management urbain, environnement et services de l’ESSEC
Anna Cremnitzer est diplômée de l’ENSA Paris-la Villette et titulaire du master spécialisé Aménagement et maîtrise d’ouvrage urbaine de l’École nationale des ponts et chaussées.
Sébastien Harlaux est diplômé de l’Institut d’études politiques de Rennes et d’un master de l’Institut français d’urbanisme
Editeur : Editions La Découverte ; Plus loin, plus proche – Planifier une ville durable et solidaire ; 192 pages ; Format : 21,00 x 28,00 cm ; Broché ; Prix : 35€
Savant, solide et passionnant
Les architectes et la fonction publique XIXe-XXIe siècles
Sous la direction de Catherine Bruant, Chantal Callais et Guy Lambert. Préface de Jean-Yves Andrieux
L’exercice libéral des architectes est souvent le seul identifié. Pourtant, nombre de ces professionnels assument des missions publiques, qu’ils soient « fonctionnaires » ou non. L’ouvrage analyse ces aspects moins connus du métier en France, dans une perspective diachronique depuis le XIXe jusqu’au XXIe siècle. Quelle est la nature des échanges entre les pratiques publiques et les pratiques privées ? Quel est le sens des concepts de création et de droit d’auteur dans le cadre public ? Quel avenir pour les rares corps ou groupes d’architectes exerçant aujourd’hui des missions publiques ? Telles sont les questions principales abordées par cet ouvrage. Il explore l’actualité brûlante des pratiques architecturales, interrogeant ainsi la manière dont la société (professionnels, élus, citoyens) s’empare de son environnement et met en œuvre la valeur d’intérêt public accordée par la loi à l’architecture.
Avec le soutien de l’IPRAUS-AUSser (ENSA Paris-Belleville), du LéaV (ENSA Versailles) et l’ UMR 5319 Passages (ENSAP Bordeaux)
Les directeurs de publication sont chercheurs dans les Écoles nationales supérieures d’architecture et de paysage.
À propos des auteurs :
Catherine Bruant est architecte DPLG, sociologue et diplômée de la FNSP, laboratoire de recherche de l’ENSA de Versailles (LéaV).
Chantal Callais est architecte DPLG, docteur en histoire de l’art, laboratoire Passages, UMR 5319, ENSAP de Bordeaux.
Guy Lambert est maître de conférences en histoire et cultures architecturales, ENSA de Paris-Belleville, IPRAUS, UMR AUSser 3329.
Editeur : Presses Universitaires de Rennes ; Les architectes et la fonction publique XIXe-XXIe siècles ; 472 pages ; Format : 17,00 x 24,50 cm ; Broché ; Prix : 32€