Dix ans après l’incendie qui l’a détruit en avril 2008, le Manège militaire Voltigeurs de Québec a été réhabilité par un consortium d’architectes – A49 / DFS / STGM -, lequel a établit un dialogue entre architecture patrimoniale et contemporaine. La restauration de ce joyau historique de 12 000 m² a été achevée en mai 2018, pour un coût de104M$ CA. Communiqué.
Services publics et Approvisionnement Canada, maîtres d’ouvrage, a mandaté l’équipe d’architectes pour concevoir et exécuter des travaux de reconstruction favorisant la protection du patrimoine et le respect de l’intégrité architecturale et des esquisses élaborées en 1885 par Eugène-Étienne Taché (1836-1912). Le mandat était également d’ouvrir l’édifice patrimonial, maison du Régiment des Voltigeurs de Québec de l’Armée canadienne, à la population de la Ville de Québec et ses visiteurs.
Amorcé en 2011, le projet de reconstruction du Manège militaire inclut quatre principales interventions : la restauration de l’aile est datant de 1913-14 qui abrite des bureaux pour les Voltigeurs de Québec, l’ajout d’un pont menant au Parc des Champs-de-Bataille et d’une nouvelle aile à l’ouest comprenant des bureaux du gouvernement fédéral, la reconstruction de la salle d’exercice convertie en une salle multifonctionnelle, la construction d’un nouveau foyer au sud de l’immeuble pour supporter les fonctions de cette nouvelle salle ainsi que la création d’un hall commémoratif pour les Voltigeurs.
Ces interventions ont nécessité à la fois des travaux de restauration majeure des murs de maçonnerie extérieurs et intérieurs, des plâtres, des portes et fenêtres en bois, la construction d’une nouvelle toiture avec couverture de cuivre et l’agrandissement complexe du bâtiment existant.
Situé à proximité de l’Arrondissement historique du Vieux-Québec, site du patrimoine mondial de l’UNESCO, le Manège militaire Voltigeurs de Québec ouvre sur les plaines d’Abraham, théâtre de l’affrontement des empires français et britannique qui changea le sort de l’Amérique en 1759.
La mise en valeur des couches d’histoire du Manège militaire
L’approche de conservation patrimoniale propose une valorisation claire et honnête des couches d’histoire du Manège : la construction d’origine de 1887, l’agrandissement de 1913-14, l’incendie de 2008 et le nouveau projet de réhabilitation. Le consortium s’est donc engagé à conserver, stabiliser et assurer la pérennité de tous ces moments importants du Manège militaire, et ce dans un ensemble cohérent et dynamique qui bonifie la valeur culturelle du lieu pour les générations futures.
L’incendie de 2008 et les activités de curetage ont mis à jour des vestiges, des marques du temps et des anciennes traces qui méritaient d’être exprimées et mis en valeur à travers ce projet de réhabilitation. L’intention d’une telle approche vise donc la rétention de l’histoire, de la forme architecturale et de l’aura des lieux.
Il ne s’agissait pas de faire une restauration superficielle et sélective de certaines composantes, mais plutôt de révéler les traces et les intentions d’origine de chacune des strates du passé pour atteindre une compréhension globale des caractéristiques du Manège. Ainsi, à titre d’exemples, les plâtres ont été stabilisés et la maçonnerie, exposée par l’incendie et le retrait des finis intérieurs endommagés, est restée à nu.
Le Manège militaire est l’un des meilleurs exemples du style château au Canada avec ses fenêtres passantes, ses tourelles à poivrière, ses contreforts, sa maçonnerie massive et sa toiture imposante en cuivre surplombée d’une crête faitière. Tous ces éléments ont été reconstruits en respectant les plans d’origine tout en s’assurant de répondre aux exigences techniques d’aujourd’hui.
Une cohabitation harmonieuse entre architecture contemporaine et patrimoniale
Afin de favoriser le maintien des désignations patrimoniales, d’optimiser les installations et de les rendre plus utiles à la communauté ainsi qu’au gouvernement, l’édifice a été agrandi par l’ajout d’éléments contemporains, tel que l’aile ouest pour accueillir des bureaux fédéraux de même qu’un foyer d’accueil du côté du Parc des Champs-de-Bataille. Pour ces éléments, l’équipe a maintenu le parti d’une architecture contemporaine se distinguant de l’existant en prenant soin d’utiliser des matériaux compatibles avec le bâtiment d’origine.
Les entrées et le pont
Le programme remis aux architectes prévoyait l’accès aux espaces publics du Manège et au Parc des Champs-de-Bataille à partir de l’avenue Wilfrid-Laurier. Les concepteurs ont ainsi créé un élégant pont traversant l’aile de 1913-14, se voulant une transition permettant aux visiteurs d’apprécier les murs de maçonnerie de part et d’autre et d’entrer dans le hall commémoratif. L’aile est a été entièrement rénovée pour accueillir les bureaux des Voltigeurs de Québec.
Le hall commémoratif
Après avoir emprunté le pont, le public pénètre dans le hall commémoratif, un vaste espace présentant les couleurs régimentaires des Voltigeurs. Au centre de cet espace se trouve un escalier menant au sous-sol où sont mises en valeur les cibles d’une ancienne salle de tir ainsi que des images d’archives.
Le foyer
D’une volumétrie simple, le foyer sert d’aire de transition pour les occupants de la salle multifonctionnelle, de déambulatoire et de lieu pour des évènements de type cocktail ou conférence de presse. Le foyer est porté par une structure de colonnes et un pontage en bois d’ingénierie avec connexions dissimulées et possède une enveloppe aux matériaux nobles faite de maçonnerie de pierre calcaire de taille et muni d’une grande fenestration en murs rideaux.
Des zones commémorant l’histoire militaire du bâtiment et des Voltigeurs à travers divers objets sont également intégrées à cet espace public.
La salle multifonctionnelle
L’espace principal du bâtiment central, où se trouvait la salle d’exercice avant l’incendie, a été converti en salle multifonctionnelle avec des dispositifs scénographiques à la fine pointe de la technologie. Cette salle, d’une très grande polyvalence, permet la tenue d’évènements corporatifs, privés et culturels pouvant accueillir jusqu’à 1 300 personnes.
La décision de reconstruire le toit de la salle multifonctionnelle avec une structure de bois apparente permet un rappel des conditions de la salle d’exercice lors de sa construction en 1885. Les ingénieurs et les architectes ont conçu une structure de fermes en bois d’œuvre apparentes et sans colonnes adaptée aux nouvelles contraintes d’opération de la salle. Les murs de brique intérieurs ont été laissés apparents et les nouveaux finis contribuent à la mise en valeur des éléments d’origine, tout en demeurant sobres.
L’ensemble de ruines s’est transformé en quelques années, avec l’effort concerté des architectes, ingénieurs et de ses spécialistes, en scénographie et acoustique, en une salle aux qualités techniques impressionnantes.
L’aile ouest
Cet ajout contemporain accueille aujourd’hui des bureaux fédéraux. Son langage réside en grande partie dans la réinterprétation des matériaux et des jeux volumétriques de la toiture de cuivre du Manège. Inspiré par l’aile est, le parement choisi est de maçonnerie de pierres et les ouvertures sont en baies de dimensions similaires. Celles-ci sont simples et régulières, sans ornementation typée, conservant un langage sobre et subordonné. En écho à la forte présence des toitures de cuivre, de fins pare-soleil verticaux en cuivre ont été stratégiquement insérés devant les murs rideaux en retrait de l’enveloppe inférieure de l’aile, favorisant ainsi l’ouverture sur le paysage tout en réduisant l’impact trop direct des rayons du soleil.
Un travail d’équipe complexe et de longue haleine
Reconstruit à partir d’une ruine incendiée, les exigences fonctionnelles, les travaux de décontamination, les interventions minutieuses à caractère patrimonial, les consolidations structurales, la mise aux normes ont représenté autant de défis pour l’ensemble des professionnels impliqués. Ainsi, près de 700 personnes ont œuvré à toutes les étapes du projet, de la planification à la réalisation, et près de 70 000 heures furent requises pour les services en architecture seulement.
Le Consortium
Architecture49 (bureau de Montréal)
DFS Architecture & Design
St-Gelais Montminy + Associés / Architectes (STGM)