
Projectiles (les architectes Reza Azard, Daniel Meszaros et le designer Hervé Bouttet) construit le nouveau musée du débarquement sur le site du ‘D-DAY’ à Arromanches (Calvados). Une surface de 1 740m² pour un coût estimé de 7,42 M€HT, avant que ne disparaissent les vestiges. Livraison prévue 2023. Communiqué.
Le défi technologique du port artificiel « Mulberry b »
6 juin Juin 1944. Profitant d’une accalmie après plusieurs jours de tempête, une armada de 6 939 navires s’approche des côtes normandes. Celle-ci déploie alors l’impressionnant système de quais en caissons de béton armé et de routes flottantes en plateformes métalliques. Ils ont été construits en secret en Angleterre pour permettre la circulation, à hauteur constante malgré les fortes marées de la Manche, de véhicules lourds assurant le déchargement des navires accostés.

Dès le 12 juin, 54 000 véhicules transitent par le port artificiel d’Arromanches, qui devint pendant deux mois le plus grand port du monde en tonnage débarqué. L’armada s’étale sur un front de 80 km et transporte pas moins de 132 000 hommes, Britanniques, Étasuniens ou Canadiens pour la plupart. 11 590 avions la protègent. Dans la nuit, 23 500 parachutistes ont été lâchés derrière les lignes allemandes. Leur mission est de dégager la plage baptisée Utah et de couper la route nationale qui relie Caen à Cherbourg et à Sainte-Mère-Église.
Au matin du Jour J, à 5h30, les avions alliés et une flotte de cuirassés bombardent les fortifications des plages et des falaises. Une heure plus tard, cinq divisions commencent à débarquer sur les plages normandes aux noms codés : de l’Ouest vers l’Est, Utah et Omaha (troupes américaines), Gold (troupes britanniques), Juno (troupes canadiennes) et Sword (troupes britanniques et détachement français). Au soir du 6 Juin, les Aillés ont finalement réussi à établir une tête de pont sur la côte et peuvent mettre en place toute la logistique Indispensable à la longue offensive de reconquête qui commence.

Ou comment Arromanches, entre dans l’histoire
C’est à ce moment que le petit port d’Arromanches, rade naturelle nichée entre deux falaises, entre dans l’Histoire. Il a été choisi pour accueillir un des éléments centraux de l’opération : Le port artificiel « Mulberry B », à partir duquel s’organisera une grande partie de la logistique anglo-canadienne du Débarquement. Les vestiges du port artificiel d’Arromanches sont les seuls témoins aujourd’hui de l’Incroyable Innovation technique qui a facilité le Débarquement et contribué au succès de la Bataille de Normandie. Ces vestiges sont visibles depuis le musée à travers les baies vitrées faisant écho aux maquettes présentées dans l’exposition, et depuis la promenade aménagée derrière le musée, près de la plage.
« Quand les vestiges auront disparu, il restera le musée ». Cette phrase, extraite du programme, dit bien les enjeux majeurs de ce projet que sont le souvenir, la connaissance et la transmission de cette histoire commune ainsi que notre devoir de mémoire au-delà de la disparition certaine des vestiges du port artificiel dans un futur proche.

Cette double immersion dans l’Histoire et les histoires des personnes l’ayant vécu a marqué de très nombreux visiteurs depuis l’ouverture du musée. Ce lieu pionnier en Normandie n’est pas uniquement un mémorial. Lorsqu’il est inauguré par René Coty en 1954, ce musée de site à vocation mémorielle innove et se distingue par sa justesse à aborder un évènement majeur de la seconde guerre mondiale. Dès lors, comment doit se transmettre cette histoire ? Pour qui et pourquoi ? Comment rendre intelligible à un public hétéroclite un ensemble complexe de faits et de thématiques ? Et qu’est-ce qu’un musée ouvert sur son environnement ?

Plusieurs niveaux de lecture
Le projet de scénographie de Projectiles présente les ressources du musée d’Arromanches de manière claire et compréhensible, en proposant différents niveaux de lecture pour être en phase avec le degré de connaissance des visiteurs. Mais avec un objectif clair : la prise de conscience du caractère exceptionnel de ce site et de son histoire.

Parce que le Musée du Débarquement est aujourd’hui un lieu d’histoire, il est impératif d’équilibrer le rapport entre émotion et réflexion, en hiérarchisant et en contextualisant les informations à l’appui des vestiges. Tantôt immersifs, tantôt ouverts sur le site, les aménagements combinent les dimensions territoriale, historique, mémorielle et sociétale. Enfin, la qualité de la médiation humaine et la vocation pédagogique du musée permettront de redynamiser son image et ainsi d’attirer un public toujours plus diversifié.

D’autre part, les vestiges du port artificiel se détériorent progressivement. Chaque visiteur doit pouvoir s’approprier ces traces qui s’étiolent au fil du temps. En les invitant à se pencher sur cet événement marquant de la seconde guerre mondiale, les visiteurs sont engagés dans une double perspective de compréhension et d’appropriation de cette mémoire collective. Contempler le site et comprendre les enjeux majeurs qu’il portait en lui (la réussite du débarquement et le soutien à la bataille de Normandie), c’est aussi recevoir en héritage une part d’histoire qui nous concerne tous. Afin de ne pas oublier et de transmettre à notre tour aux générations futures.

Le traitement architectural et scénographique du nouveau musée, ainsi que les aménagements paysagers de ses abords contribueront non seulement à marquer d’avantage la présence du musée au sein du site, à offrir de meilleures conditions d’accueil à l’ensemble des visiteurs mais, aussi et surtout, à établir une relation accrue entre les vestiges, les engins et les collections présentées dans les salles d’exposition.

La sensibilisation à cet événement majeur de l’histoire de la seconde guerre mondiale tire toute sa cohérence de ce rapport étroit entre les différentes échelles qui forment un tout indissociable.

Le projet présenté par Projectiles vise ainsi à faire côtoyer la grande et les petites histoires, afin de faire émerger une part d’humanité. Le Musée du Débarquement d’Arromanches est également un musée de société.

La visite ne s’achève pas encore. Les visiteurs sont invités à se rendre sur le toit du musée où s’étend l’horizon, immense. Des jumelles sur pied, disposées vers la mer le long du garde-corps, leur permettront de regarder les vestiges plus en détail. A défaut, ils pourront tout simplement contempler ce site unique et magnifique.