En novembre 2013, Unibail-Rodamco a obtenu un nouveau bail emphytéotique de 50 ans à partir de 2015. C’est dans cette échelle de temps que s’inscrit la rénovation du Parc des Expositions de la Porte de Versailles et la reconstruction, signée Valode & Pistre, du Pavillon 7, rebaptisé Paris Convention Centre et inauguré fin novembre 2017. Visite.
«L’ambition est de construire un nouveau quartier de ville à l’opposé d’un site fermé et de lui donner un caractère de modernité», explique à cette occasion Christophe Cuvillier, président du directoire d’Unibail-Rodamco. Ce projet à 500 M€, entièrement privé, est financé par Viparis, filiale à 50-50 de la Chambre de Commerce et d’Industrie (CCI) de Paris et d’Unibail-Rodamco.
Jean-François Martin, adjoint à la maire de Paris, chargé notamment des questions liées au tourisme, pouvait donc, lors de l’inauguration, se féliciter que soit mis en œuvre «l’un des grands enjeux urbains, un nouveau quartier de ville en cœur de ville». C’est lui qui explique d’ailleurs que le tourisme d’affaires lié aux congrès rapporte 1,2Md€ par an en Ile-de-France, «l’équivalent de ce qu’a rapporté l’Euro 2016 de football», précise-t-il. Bref, les enjeux financiers sont immenses et pour Paris c’est tout bénef.
Mais un quartier de ville ?
Le concept semble important pour les maîtres d’ouvrage qui expliquent que la localisation de l’équipement en cœur de ville est un avantage compétitif, «la plupart des concurrents [étant] hors la ville, près des aéroports». Ici, quand le Novotel et le Mama Shelter auront été construits, à l’horizon 2019, les congressistes «iront à leur hôtel à pied». Avant sans doute de profiter de l’accueil du ‘gay Paris’. Bref, en l’occurrence, faire la ville correspond à des intérêts bien compris.
N’empêche, force est de constater que le parc des expositions, qui ressemblait il n’y a pas encore si longtemps à une zone industrielle, est en train – du moins l’intention est là – de redonner au mot parc son sens jardin du terme.
Le 22 novembre 2017, la presse était conviée pour découvrir la restructuration menée par Valode&Pistre de l’ancien Pavillon 7 devenu le Paris Convention Centre. L’évolution du vocabulaire dans la description même de l’ouvrage est significative puisqu’il faut bien prononcer à l’anglaise ‘conventionne center’ et ne pas se laisser abuser par l’orthographe de ‘Centre’. De fait un journaliste s’en est ému. Il lui fut alors expliqué que les Anglais écrivent ‘centre’, qu’ils prononcent ‘center’ quand les Américains écrivent directement center, comme ça se prononce. Chacun comprend bien les nuits blanches des communicants pour passer de Pavillon à Convention Centre. Toujours est-il que le bâtiment, de par son nom même, est parfaitement représentatif de son époque. Ce qui est déjà pas mal et la moindre des choses pour un bâtiment contemporain.
«Il y avait un double enjeu pour ce projet : comment intégrer ce bâtiment monumental au Parc alors qu’il en est séparé par le périphérique, et comment donner à cette architecture monumentale de l’époque brutaliste, construite en 1969 par les architectes Raymond Gravereaux et Gilles Thin, une image et des usages contemporains tout en respectant et en mettant en valeur son caractère historique ?» explique Jean Pistre.
C’est finalement l’impressionnante mégastructure en béton brut de 20 m X 20 m sur trois niveaux qui va permettre l’expression de la transparence au travers d’une façade composée d’une ondulation de verrières. «Une gageure», souligne Jean Pistre. «Il n’y avait aucune isolation, des ponts thermiques partout !».
La prouesse technique est notable aussi bien dans le domaine de l’énergie (les promesses du BREAM) que dans l’organisation des espaces puisque, dans cette trame, au niveau 3, les architectes ont créé un centre de convention de 15 000 places, désormais le plus grand d’Europe, avec une salle plénière de 5 200 places assises, connecté à 44 000 m² d’exposition. Trois grandes poutres de 60 m de portée ont permis de concevoir des espaces modulables quasiment à l’infini, les cloisons (il y en a pour 1,5km !) astucieusement rangées autour des poteaux.
Halls d’exposition, salles de réunion, salles de conférence, unités de restauration fixes et mobiles, salle événementielle, etc., la modularité est telle qu’il est envisagé là des manifestations sportives ou autres évènements exceptionnels. Du handball ou du badminton au Paris Convention Centre pendant les Jeux Olympiques ? D’autant que la salle plénière, élégance d’architecte, dispose d’un toit ajouré, permettant d’assister à des conférences avec une lumière du jour naturelle.
«Le Paris Convention Centre bénéficie des dernières technologies et d’une modularité permettant l’organisation d’évènements sur-mesure. C’est également l’unique centre de convention au monde avec vue imprenable sur la tour Eiffel ! Paris, capitale mondiale des congrès est désormais capable d’accueillir les plus grands événements au monde», s’enthousiasme Christophe Cuvillier. La terrasse paysagée, qui offre cette vue panoramique sur Paris, est bien entendu privatisable. Tout comme l’ensemble du site pour des évènements d’envergure, type salon de l’agriculture. Le Paris Convention Centre est dimensionné pour accueillir jusqu’à 35 000 personnes à la fois.
Restait à intégrer ce bâtiment au parc. En effet, la restructuration du Pavillon 7 s’inscrit dans un vaste plan de rénovation commencé par la reconstruction des Pavillons 4 et 5. Il prévoit la refonte totale des espaces extérieurs pour le public et pour la logistique, ainsi que la reconstruction des Pavillons 6 et 8, qui est en cours, et la reconstruction des Pavillons 2 et 3.
L’allée centrale du parc est devenue «un grand boulevard», doté de ‘travelators’ recouvert de facettes de miroir, permettant de guider le visiteur, à travers un site de plus en plus paysagé et végétalisé, vers des pavillons et équipements dessinés par «les plus grands» – outre Valode & Pistre, Dominique Perrault, Christian de Portzamparc, Jean Nouvel et Jean-Michel Wilmotte ont chacun un pavillon à rénover ou construire. Adieu la zone industrielle donc, et c’est tant mieux sans doute.
Sauf que le Pavillon 7 venait clore brutalement la perspective et la structure ne pouvait être déplacée. L’idée des concepteurs fut, via l’atrium et le toit, de prolonger le cheminement piéton à travers le bâtiment et au-delà pour ainsi relier la porte de Versailles à Issy-les-Moulineaux et Vanves, de l’autre côté du périphérique.
«Avec les allées traversantes et la séparation des flux piétons et logistiques, le Parc devient un véritable Parc «à vivre». Les cheminements des promeneurs sont ponctués de jardins, de parcours sportifs et courts de tennis, de services et de commerces», explique la brochure de Viparis.
Il y a certes encore du chemin avant que ce parc ne devienne en soi une destination de promenade et un «lieu d’agrément» pour les Parisiens et les visiteurs, mais l’intention est là, telle qu’exprimée dans le schéma directeur de Valode & Pistre puisque trois nouvelles portes d’accès au Parc seront créées pour les piétons. «Un architecte apporte la poésie et le confort à un projet financier», explique le chef de projet du Convention Centre.
Un lifting à 500 M€, – «sans aucun financement public», précise encore Didier Kling, président de la CCI Paris Ile-de-France – soit autant que le coût de construction estimé de la tour Triangle, prévue au même endroit avec les mêmes maîtres d’ouvrage et dont les travaux finiront bien par être lancés.
Pour mémoire, le permis de construire de la tour a été obtenu en mai 2017. Même si de nouveaux recours sont apparus depuis, le processus juridique semble toucher à son terme.
Alors quartier de ville ? Parc ?
Christophe Leray