LafargeHolcim a dévoilé le 14 juin 2021 les lauréats européens de son concours triennal, quatre projets imaginés en Suisse, en Espagne, en Belgique et au Royaume-Uni qui mettent chacun en lumière un aspect différent de la construction durable.
Tous les trois ans, le concours LafargeHolcim – doté de deux millions de dollars – se déroule dans cinq régions du monde. La dernière édition était consacrée à la construction durable. Au total, 4 742 projets de 134 pays ont été soumis. Environ la moitié d’entre eux ont pleinement satisfait aux exigences du concours et ont ensuite été examinés lors de vastes réunions de jury en ligne dans les cinq régions du concours. Les lauréats européens.*
Infrastructure de reconstruction des dunes en Espagne
Javier Estebala Alández, architect, Madrid, Spain
Un projet où les forces de la nature sont exploitées par un aménagement paysager créatif et une architecture emblématique pour régénérer la côte nord de Cadix.
La crique de La Punta de San Felipe dans la ville portuaire andalouse de Cadix est exposée à des vents forts qui provoquent l’accumulation de grandes quantités de sable. L’architecte madrilène Javier Estebala Alández propose de redessiner la zone côtière avec une plage de dunes.
« Le parti-pris du projet est une transformation à grande échelle utilisant la puissance de la mer et du vent pour créer une nouvelle géographie dans la ville », explique-t-il.
La conception se compose de trois éléments principaux. Une imposante structure high-tech sert de brise-vent et capte les particules de sable portées par le vent qui se déposent au pied de la structure. Cela crée le deuxième élément, une dune qui s’étendra progressivement sur une structure existante. Le troisième élément est une jetée adjacente à transformer en parc public.
« Le projet joue avec toute une gamme de sujets : les arts, les notions d’abri et de confort et les principes bioclimatiques de base. Le jury a par ailleurs été impressionné par l’utilisation des phénomènes naturels dans le cadre de la reconfiguration du littoral », explique Marilyne Andersen (Professor of Sustainable Construction Technologies, EPFL Lausanne, Switzerland), membre du jury.
Le projet, selon l’avis unanime du jury, présente des avantages pour la population, l’écosystème et le tourisme. « Il essaie de tout ramener dans une proposition utopique mais il a tous les ingrédients qui montrent une prise de conscience convaincante de ce qui fait un projet durable », conclut Marilyne Andersen.
Processeur thermique en Suisse – Valorisation énergétique des déchets à usage résidentiel
Yufei He, architecte et assistant scientifique, ETH Zurich, Suisse
Un projet de conversion de la chaleur perdue d’un centre de données à Zurich en énergie « gratuite » pour le chauffage et le refroidissement.
Il existe en Suisse plus de 4000 datacenters, lesquels nécessitent beaucoup d’énergie et dégagent une immense quantité de chaleur. Avec son projet, Yufei He, architecte et assistant scientifique à l’EPF de Zurich, prévoit d’utiliser cette chaleur perdue.
Il a conçu un bâtiment qui fournit de l’énergie au réseau de chauffage et de refroidissement de Zurich. La structure longue et élancée qui sera construite sur les rives de la rivière Sihl est à la fois une centrale thermique de récupération et un immeuble résidentiel. Des modules solaires sur les façades alimentent le datacenter en énergie. La chaleur perdue à 60°C est refroidie à 35°C ou 12°C, températures idéales pour le chauffage et le refroidissement.
« Le projet soulève des questions contemporaines à différentes échelles, du développement du réseau énergétique à Zurich à une nouvelle forme de vie dans le processus de numérisation et de densification », explique Yufei He
Le jury a été intrigué par les qualités visionnaires d’un projet qui offre des solutions esthétiques et fonctionnelles aux problèmes environnementaux causés par les datacenters. « Il semble naturel d’utiliser les déchets pour autre chose », déclare Marilyne Andersen. « Mais ce n’est pas si facile à mettre en œuvre de manière efficace. Il faut un réseau pour que le gaspillage de l’un devienne l’input de l’autre. Mais dans ce projet, la valeur réside également dans la matérialité et dans le design audacieux », conclut-elle.
En Belgique, des logements communautaires pour une vie socialement autonome
Annik Keoseyan, architecte et urbaniste, Mexico, Mexique
Un concept de logement social à Bruxelles où transformation, partage et accompagnement sont les prémisses d’une vie plus durable et socialement responsabilisée.
Réinterprétation des structures existantes. La croissance démographique a entraîné une pénurie d’espaces de vie dans des villes comme Bruxelles. Répondre à la densification urbaine est donc de plus en plus important. Le projet d’Annik Keoseyan, architecte et urbaniste mexicaine, propose une mise à niveau de l’infrastructure des logements sociaux.
Le concept repose sur le principe du partage : les immeubles proposent de nombreuses typologies d’appartements différentes pour s’adapter à toutes les tailles de ménages. L’espace de vie personnel est minimisé, tandis que les espaces qui peuvent être partagés, par exemple les cuisines et les salons, sont agrandis. Cela augmente l’espace utilisable par habitant. Dans le même temps, les besoins globaux en espace et la consommation d’énergie sont optimisés et l’interaction sociale est intensifiée.
Le jury a salué la maturité et le caractère pragmatique du projet, qui aborde deux questions fondamentales de durabilité : la réinterprétation des structures existantes et la promotion de la durabilité sociale. « C’est un projet complexe car il aborde de nombreuses dimensions différentes d’un mode de vie durable mais c’est aussi un projet pragmatique dans le sens où cela semble faisable. Il embrasse la réalité. Il excelle par son adaptabilité et sa flexibilité », souligne Marilyne Andersen.
« Ce prix donne au projet une visibilité qui aidera à pousser l’idée dans la prochaine dimension », se réjouit Annik Keoseyan.
Carreaux de bioremédiation pour la purification de l’eau au Royaume-Uni
Shneel Malik, architecte et chercheur en biodesign, Bartlett School of Architecture, Londres, U.K.
Une tuile nervurée utilise la biorestauration des microalgues pour nettoyer l’eau polluée et autonomiser les communautés locales dans les pays en développement.
Microalgues pour le traitement des eaux usées. La pollution de l’eau est un problème dans de nombreux pays, souvent en raison d’un manque d’infrastructures adéquates pour le traitement des eaux usées.
Shneel Malik, doctorante à la Bartlett School of Architecture de l’University College London, propose un système pour purifier l’eau à l’aide de microalgues : « Ce n’est pas seulement durable, c’est bio-intégré », dit-elle. « Nous visons à mettre en place de nouvelles formes de pratiques quotidiennes en repensant notre rapport à nos ressources naturelles, l’eau en particulier ».
Le projet repose sur la capacité des microalgues à convertir des organismes complexes et des déchets inorganiques en produits moins toxiques. Les algues sont cultivées sur des carreaux de céramique et isolent les métaux lourds de l’eau qui les recouvre. Le design des carreaux est inspiré des feuilles et peut être réalisé avec des matériaux disponibles localement. Les tuiles doivent être renouvelées périodiquement pour maintenir l’efficacité du système et la production et le remplacement des tuiles offrent de nouveaux emplois.
Le jury a salué l’approche efficace du projet, une technologie biosourcée d’une production simple se prêtant à une application généralisée. « Ce qui distingue ce projet, c’est le prototype très élégant et soigneusement conçu. Le projet se confronte à la réalité. Il a en fait été conçu pour voir comment il fonctionnerait à l’échelle 1 », relève Marilyne Andersen.
* Le jury pour l’Europe : Jeannette Kuo (Swiss architect and founding partner of Karamuk Kuo Architects), présidente ; Kristiaan Borret (Chief Architect, Brussels-Capital Region, Belgium) ; Nuno Brandão Costa (Brandão Costa Arquitectos, Portugal) ; Hélène Lombois-Burger (R&D Project Manager for Digital Design & Fabrication, LafargeHolcim Innovation Center, France) ; Eva Pfannes (Ooze Architects, The Netherlands) ; Sergei Tchoban (SPEECH architectural office, Russia) ; Alexandre Theriot (BRUTHER, Switzerland/France) ; Marilyne Andersen (Professor of Sustainable Construction Technologies, EPFL Lausanne, Switzerland); Dirk Hebel (Dean of Architecture & Professor of Sustainable Construction, Karlsruhe Institute of Technology, Germany).