Living in the Leaves, un projet écologique et « Manifeste contre la déforestation » au coeur d’une forêt millénaire… Le projet d’Elizabeth de Portzamparc est lauréat en avril 2021 d’une compétition internationale en Chine. Communiqué.
Contexte
Le concours international The Ancient Tree Civilization and Residence Future, lancé en janvier 2021 à l’initiative du RIBA* (Royal Institute of British Architects) vient d’être remporté par Elizabeth de Portzamparc qui s’est aussi vue décerner le prix du RIBA à Shangaï le 11 juin 2021.
Cette compétition internationale** avait pour objet l’aménagement de toute une vallée à travers le thème de la relation entre l’homme, l’arbre et la nature. Il était demandé de proposer un concept général, décliné selon les typologies de constructions – éco-hôtel/centre de bien-être, maisons de différentes échelles, dans un environnement unique d’arbres millénaires qu’il s’agissait de préserver et de protéger.
Le site retenu pour le concours – le jardin des arbres millénaires de Kaisen – fait partie de la réserve naturelle nationale de Guandong Xiangtoushan, près de la ville de Huizhou, dans la province du Guangdong, et compte trois villages, Gudong, Pingnan et Jiaomu. Dans ce paysage exceptionnel, les constructions seront réparties sur environ 1333 hectares.
Le programme spécifiait de s’attacher à la relation entre les bâtiments et les nombreux arbres anciens présents sur un site à protéger tout en le mettant en valeur. Il était aussi demandé que les méthodes constructives soient hautement durables et écologiques.
Elizabeth de Portzamparc aura en charge notamment la construction de l’hôtel avec le centre de bien-être et d’un certain nombre de maisons tandis que les composantes de sa proposition seront transcrites dans un cahier des charges qui s’appliquera à toutes les constructions de la vallée. Elle aura une mission de conseil pour l’ensemble du site et la bonne application du cahier des charges, les constructions étant réparties entre plusieurs architectes.
Living in the Leaves, l’esprit du projet
Elizabeth de Portzamparc a pensé ce projet comme un « Manifeste contre la déforestation », thème très cher à son coeur de Brésilienne et qu’elle défend depuis longtemps en raison de la destruction de la forêt amazonienne. Sa proposition Living in the Leaves se veut une architecture fédératrice d’écosystèmes – être abrité par le lieu, par la nature qui l’entoure avec laquelle se tisse une harmonie – pour la cohabitation entre les humains et leur environnement dans les forêts ancestrales de Huizhou.
Ce travail est guidé par la notion d’architecture des liens, des interactions et la réponse à la compétition dans la vallée a été un terrain d’expression idéal pour la mise en œuvre de cette pensée.
La réflexion pour le projet de Huizhou part du constat de l’effet destructeur des constructions sur leur environnement et de manière générale de la société moderne sur son espace naturel. Dans la région de Guangdong-Hong Kong-Macao Greater Bay Area, où l’économie industrielle est très active, le projet fait référence à la notion d’abri.
Living in the Leaves cherche à établir par un vocabulaire architectural se référant aux branches d’arbres et à l’eau, ce dialogue total avec chacun des sites – bord du lac, forêt, hautes cimes de la vallée – pour façonner un seul et unique paysage abolissant toutes les frontières entre le bâti et la nature. Un projet pour vivre dans la présence magique et sacrée des arbres millénaires entre vallons, forêt et plans d’eaux.
Face à ce paradis, la proposition est celle d’une architecture fusionnelle pour conserver le paysage, le protéger, s’y intégrer, en fonction des diverses morphologies du site. Ainsi, à grande échelle, plusieurs strates d’interactions se créent entre l’architecture et son environnement :
– habiter les cimes, dominer la vallée et flotter au-dessus de la canopée de la forêt, habiter le ramage, fusionner avec les branches et les feuilles, s’étourdir dans la nature luxuriante des arbres ;
– habiter la terre, s’entourer de la présence verticale des troncs et être en relation avec les sols et la faune, sentir la présence de l’eau, écouter la musique des ruissèlements.
La notion de cabane, flottant au-dessus du sol s’est imposée. Contrairement à l’idée de disparition évoquée par la grotte, la cabane affirme la notion d’intégration avec le lieu, par le bâti qui se devine à travers les branches.
Les éléments architecturaux et les matériaux pensés dans une logique d’intégration à l’environnement sont présents dans toutes les constructions que ce soit l’hôtel, les villas ou les cabanes. Les fins piliers en bois ont une fonction structurelle et filtrent les vis-à-vis. La composition des différents éléments reflète l’aspect aléatoire et naturel des branches d’arbres avec lesquelles ils se confondent.
De grandes terrasses surélevées au-dessus du sol protègent de l’humidité de la forêt. Les toits sont déclinés en fonction des études d’ensoleillement. Librement inclinés, ces pans de toits forment un langage commun à l’ensemble des éléments construits, et leurs formes évoquent parfois la silhouette de villages traditionnels chinois.
Cette proposition renoue avec le mode d’habiter ancestral : « la cabane », un rêve d’enfant : Living in the Leaves.
Intégration et dialogue avec la nature
Les activités humaines créent des conflits avec la nature, l’innovation ne serait-elle pas de renouer avec un mode constructif simple, rigoureux et contemporain qui freinerait la destruction ?
La cabane
La proposition est celle d’un nouveau mode de vie, à la recherche d’un équilibre entre modernité et tradition. Elle trouve sa source dans le rêve d’enfant, l’impulsion primaire de vivre dans les arbres. À la recherche de l’origine, il y a la cabane, abri présent depuis que les êtres humains existent. À l’opposé de la figure de la grotte et de la disparition, la cabane représente par excellence la notion d’intégration. Le travail de conception du bâti se met au service de la nature, c’est la force du dialogue qui crée la beauté du projet.
Un langage commun
Dans une logique d’intégration à l’environnement, des éléments architecturaux sont présents dans toutes les constructions, formant un langage commun où le bois est prépondérant. Telles les tiges en bois qui se confondent avec les troncs des arbres et dont la fonction structurelle favorise l’intimité, telles les toitures inclinées en bois, typiques de l’architecture chinoise traditionnelle, ici déclinés en fonction des études d’ensoleillement, sur un mode contemporain et simple. Enfin toutes les constructions disposent de grandes terrasses surélevées qui permettent de s’éloigner du sol pour se protéger de l’humidité.
La composition de ces éléments entre eux reflète aussi le hasard, l’aspect aléatoire des branches des arbres.
L’eau
L’eau toujours en mouvement – plans d’eau, cascades – avec son murmure sonore est omniprésente dans tous les éléments du projet, hôtel, suites, maisons ; elle contribue à son identité et reflète l’idée de l’impermanence des éléments naturels et humains.
Le programme, de la grande à la petite échelle
Dans ce vaste programme, Elizabeth de Portzamparc construira l’hôtel et des maisons.
L’hôtel – 8000 m² répartis sur quatre niveaux dont un centre de bien-être de 1 800m² – constitue le noyau central du site, on y accède par une grande allée bordée d’arbres millénaires et d’eau qui coule de la route vers le lac.
Les maisons de 200 m², dans l’esprit de cabanes, sont une addition de petits volumes qui interagissent entre eux, les liaisons entre les espaces et les niveaux formant un jeu de déambulations à la fois naturel et ludique. Ces volumes forment huit ensembles de 200 m² chacun. Tous les aménagements et les infrastructures techniques sont bioclimatiques. Le nombre de piliers nécessaires à la portée se décompose en petits piliers ayant vocation à préserver l’intimité des intérieurs.
*organisation du concours
Le concours international de design du centre de bien-être et de retraite Kaisan Ancient Tree est initié par le Royal Institute of British Architects (RIBA), organisé par Kaisen Holding Group, exécuté par RIBA WFOE et livré par Designverse et Young Bird Plan.
** Composition du jury
Azlina Bulmer – Director of International, RIBA
Jianmin Meng – Academician of Chinese Academy of Engineering
Benedetta Tagliabue – Jury member for the Pritzker Prize, Co-founder of EMBT and 2013 RIBA Jencks Award recipient
Nishizawa Ryue – 2010 Pritzker Prize winner and Co-founder of SANAA
Chien Chung Pei – Founding Partner, PEI Architects
Thomas Heatherwick – Founder, Heatherwick Studio
Roberto Bannura – Partner, Steven Holl Architects
Steven Smit – Director, MVRDV Asia
Yibin Yang – Design Director, Kaisen Holding Group