Le palmarès des Global Award 2022 a été dévoilé en octobre 2022. Depuis 2007, ce prix récompense chaque année cinq architectes qui innovent pour faire face au défi crucial de notre siècle : préserver l’habitabilité du monde.
Le jury de ce Global Award 2022, consacré à la relation entre architecture et territoire a attribué, à l’unanimité, un prix d’honneur à Bruno Latour, figure majeure de l’écologie politique.
Créé en 2007 par l’architecte et professeur Jana Revedin, les Global Award for Sustainable Architecture récompense chaque année cinq architectes qui partagent l’éthique d’un développement plus durable et qui ont construit une démarche innovante, là où ils sont : en Occident et dans les pays émergents, dans les villes développées et les quartiers précaires, dans les mégalopoles et les territoires.
La Global Award Community rassemble les lauréats, 75 architectes à ce jour, travaillant dans le monde entier, qui partagent l’éthique d’une architecture durable. La Global Award Community poursuit des travaux de recherche, d’expérimentation et de transmission dans les domaines de l’architecture, du renouvellement urbain et de la responsabilité sociale académique.
L’architecture des Global Award 2022 y est définie comme un acteur déterminant de l’émancipation des sociétés, et de la maîtrise de leur développement et de leurs droits civiques dans l’espace habité.
Gilles Clément, paysagiste – France
Ingénieur horticole, botaniste, paysagiste, Gilles Clément est une figure du débat écologique mondial. Appuyée sur de solides connaissances, son oeuvre propose de nouveaux arts et métiers du paysage, fondés sur la libre évolution des espèces plutôt que leur asservissement. S’il aime intervenir dans les grands sites naturels ou historiques, Gilles Clément travaille beaucoup sur la réparation écologique et sociale de la ville ordinaire, ses friches et ses délaissés. Cet activiste a transformé la vision des paysagistes, des responsables publics et des architectes avec ses livres et ses Traités. Écrivain, il a le sens de la formule, qu’elle soit émouvante – Le Jardin planétaire – ou politique – son Manifeste du Tiers-Paysage fait de la nature un alter-ego du Tiers-Etat selon l’abbé Sieyès : un Tout traité comme un Rien.
Anupama Kundoo, architecte – Anapama Kundoo Architects, Inde, Allemagne
Architecte indienne d’origine bengali, Anupama Kundoo a fait ses études à Bombay puis à Berlin. Son agence est basée à Berlin et à Auroville, la célèbre ville expérimentale construite en Inde par Roger Anger et dont elle est aujourd’hui urbaniste en chef. Anupama Kundoo fait partie des architectes pour qui, en écologie, le mot développement compte autant que le mot durable. Elle refuse que l’innovation ne soit accessible qu’à une minorité. Elle invente pour cela des matériaux et des techniques, bien pensés et robustes, right-tech plutôt que high-tech, avec des entreprises locales et pour les faire progresser car elle est une partisane résolue du micro-développement.
Dorte Mandrup, architecte – Dorte Mandrup A/S, Copenhague, Danemark
Dorte Mandrup a gagné une renommée mondiale par la beauté des projets qu’elle édifie, dans des climats extrêmes et sur des sites qui, comme les glaciers du Groenland, ont une valeur universelle et qu’elle-même qualifie d’« irremplaçables ». Dorte Mandrup aborde la construction écologique comme une science. Si elle utilise le bois et le chaume plutôt que des matières énergivores ou polluantes, ce n’est pas par nostalgie. Elle étudie leurs propriétés, elle pousse l’innovation technique pour concevoir avec eux une architecture capable d’aider les sociétés à affronter une rupture brutale, le dérèglement climatique.
Martin Rauch, constructeur – Lehm Ton Erde Baukunst GmbH, Autriche
C’est une matière sculpturale qui a conduit le céramiste Martin Rauch vers la construction et l’architecture : la terre. C’est d’abord en Afrique que le jeune apprenti Martin Rauch, parti en volontariat, a découvert les huttes d’argile. Puis il a découvert et sorti de l’oubli l’architecture de terre européenne et sa richesse culturelle et technique. Sa société ‘Lehm-Ton-Erde1’ se consacre à la construction en terre. Écologiste convaincu autant qu’esthète, il extrait l’argile du site même de ses chantiers, pour rétablir le lien entre édifice et paysage. Cet autodidacte refait de la terre un matériau contemporain, inventant des machines pour préfabriquer les murs et lancer des constructions en terre de grande dimension.
Ömer Selçuk Baz et Okan Bal, architectes – Yalin Architectural Design, Turquie
En turc, ‘Yalin’ signifie simplicité, humilité. Fondée par l’architecte Ömer Selçuk Baz et l’urbaniste Okan Bal, la sobriété que YALIN recherche est une démarche esthétique mais aussi politique. En Turquie, l’agence combat ce qu’elle nomme des crimes urbains : une absence de règles et d’éthique qui fait qu’on rase la ville ancienne au profit d’une « architecture de vitrine », tandis que la périphérie tourne au chaos. Pour faire école de simplicité, Yalin se consacre beaucoup à l’aménagement de sites naturels et culturels. La méthode est que chaque projet s’enracine dans son territoire, lequel est aussi un milieu humain car pour construire les édifices, Yalin visite les carrières et les briqueteries avoisinantes, ravive des métiers et des façons de bien faire.