Le Covid-19, une histoire ancienne ? Il y a toujours un fond d’ironie dans les photos de Jean Pierre Porcher qui décrypte ici avec patience le rôle des médias promoteurs, sans discernement le plus souvent, d’une fascination morbide pour le catastrophisme. C’est la guerre comme dirait l’autre ?
Le soir de la déclaration d’Emmanuel Macron de mise en confinement de la France, le 16 mars 2020 je décidais de réaliser un projet photographique entre quatre murs. Il s’agissait tous les soirs de surfer face à mon écran d’ordinateur sur les journaux télévisés de France 2 et de TF1 et de photographier les pages d’actualité qui défilaient inlassablement sur le même sujet, le Coronavirus qui muta en Covid.
L’état de guerre contre le virus, la France à l’arrêt, l’interdiction de circuler, l’absence de masques, les gestes barrières, le télé-travail, les personnels soignants en première ligne, les services de réanimation en sous effectif, les déclarations contradictoires des experts, les comptabilisations journalières des malades en réanimation et des décès…
Durant cette période hors du temps, un élan de solidarité et de reconnaissance a grandi en soutien aux soignants et aux travailleurs de la première et la deuxième ligne. Parallèlement des réflexions et des espoirs sur » Le monde d’après » a émergé.
Le 11 mai 2020 date du premier déconfinement, je décidais de clore, non sans un certain soulagement, cette série photographique.
Quelques milliers d’images ont sommeillé dans mes disques durs depuis trois ans.
Pour cette carte blanche, une sélection de douze images à laquelle j’en ajoute quatre réalisées en avril 2023.
Ces quatre images illustrent un sentiment de honte, de désespoir et de révolte contre une situation d’abandon.
Lors d’une mission photographique à Alfortville, j’ai rencontré les oubliés de la deuxième ligne qui ont continué à travailler pendant la crise sanitaire.
Ils sont dix-huit, Sénégalais, Maliens, tous sans papier et pourtant ils ont travaillé en 2020 pendant le confinement pour Chronopost. Personne n’était dupe de leur situation non régulière mais l’entreprise nationale avait besoin de main d’oeuvre. Sous couvert d’intérim et de cascades de sous-traitances, les chargements et les déchargements des camions étaient assurés. Des conditions de travail rudes, des horaires de nuit, des cadences insoutenables, l’absence de pause…
A l’automne 2020, « Monde d’après « , ils ont été remerciés sans préavis.
La France reconnaissante pour ses travailleurs de l’ombre !
Depuis deux ans, ils demandent la régularisation de leur situation devant les grilles de Chronopost à Alfortville.
Chroniques d’architecture, chronique d’un habitat précaire et indigne, chronique sociale pour ces travailleurs qui ont contribué à apporter les services indispensables pendant la pandémie.
Jean Pierre Porcher
(Re)découvrir les Chroniques de Jean Pierre Porcher
Lire l’ouvrage De Saint-Lazare à Shanghai ou l’histoire d’une disparition (Editions Chroniques)
Découvrir plus avant le travail de Jean Pierre Porcher