Dimanche 9 juillet, étape 9 – Saint-Léonard>Puy-de-Dôme : CSP+?

Puy-de-Dôme Aubusson terreneuve — @Daniel Rousselot

Etape champêtre mais difficile entre Haute-Vienne, Creuse et Puy-de-Dôme. Pour les suiveurs du Tour de France contemporain de Chroniques, il s’agit de ne pas faire tapisserie.

Pour son retour dans le Puy-de-Dôme après 35 ans d’absence, le Tour offre aux coureurs une étape de montagne usante sur les reliefs de l’Auvergne avant l’assaut de ce redoutable sommet, classé hors catégorie. Après une journée à 3 600 mètres de dénivelé, ses quatre derniers kilomètres où la pente moyenne flirte avec les 12 % écœureront nombre des impétrants. Avant la journée de repos, ce devrait donc être le site d’une belle bagarre au sommet. À moins qu’un groupe de baroudeurs sans danger pour le maillot jaune n’ait pris la poudre d’escampette, sans la rendre…

Avant de quitter la Haute-Vienne, ayant passé la nuit à Limoges, les suiveurs du Tour de France contemporain de Chroniques, qui sont aussi des amateurs de sport, ne manqueront pas juste après le petit-déjeuner composé d’une tarte à la caillade ou d’un clafoutis d’aller faire un tour à Beaublanc.

Le Palais des Sports de Beaublanc est implanté dans un quartier historiquement ouvrier à l’entrée ouest de Limoges. Il est placé le long du boulevard de contournement de la ville. Il a par ailleurs la particularité d’être implanté dans un grand parc urbain et paysager dans lequel sont positionnés des équipements et des espaces sportifs : « A Beaublanc on y vient pour se promener ou faire du sport » disent les Limougeauds.

C’est là en effet qu’évolue le Limoges Cercle Saint-Pierre, ou CSP, club mythique du basket-ball français, créé en 1929 mais qui évolue à Beaublanc depuis 1981, une salle aux gradins vertigineux qui s’élèvent à plus de 17 m construite par l’architecte Jean‐Louis Marty. En 1988, le club remporte le championnat de Pro A, organisé pour la première fois par la ligue nationale de basket. La même année, il renforce son palmarès européen en gagnant la coupe des Coupes. Le 15 avril 1993, il devient le premier club français de sport collectif à remporter une coupe d’Europe des clubs champions, toutes disciplines confondues. En 2000, le club réussit un extraordinaire triplé championnat, coupe de France et coupe Korać et redevient champion de France en 2014 puis en 2015. Imaginez l’émotion et la fierté des Limougeauds…

À son palmarès, le Limoges CSP compte onze titres de champion de France, et six coupes de France et avec cinq trophées européens, il est le club français masculin de sport collectif, toutes disciplines confondues, qui possède le plus important palmarès européen, à égalité avec le Stade Toulousain au rugby. Par ailleurs, ayant remporté la coupe d’Europe des vainqueurs de coupe (coupes Saporta puis Eurocoupe), ayant gagné trois coupes Korać, et ayant gagné la prestigieuse coupe d’Europe des clubs champions (Euroleague) le Cercle Saint-Pierre fait partie des très rares équipes européennes, toutes disciplines confondues, à être sacrées dans l’ensemble des épreuves européennes de leur sport. Imaginez l’émotion et la fierté des Limougeauds…

Autant dire que pour les suiveurs, la visite ressemble à un pèlerinage et que l’armoire aux trophées est incontournable. Ce d’autant plus que Chaix & Morel et Associés (CMA), avec Spirale Architecture, architecte associé, ont gagné le concours pour la transformation du parc municipal de Beaublanc et du palais des sports.

Le projet prévoit en plus de la restructuration de la salle historique, la construction d’une nouvelle salle ainsi que l’ensemble des locaux d’entraînement pour le club de basket et celui de handball. Livraison prévue 2028.

Il s’agit pour les suiveurs maintenant de traverser la Creuse et ils feront une première pause, quasiment sur la route du Tour, à Mansat-la-Courrière pour aller visiter, si les propriétaires les laissent entrer, une étonnante maison de 220 m² où l’acier et le châtaignier ne sont que les éléments les plus visibles. En effet, l’ouvrage comprend en réalité deux logements et une piscine couverte et tire son énergie du soleil et de la géothermie, le tout dans un budget serré. Une réalisation signée en 2007 de l’agence parisienne SOA des architectes Pierre Sartoux et Augustin Rosenstiehl.

« Il s’agit d’une maison qui fonctionne comme un petit collectif avec une entrée commune donnant accès à un appartement de 60m² environ et à un autre beaucoup plus grand (quatre chambres) destiné à recevoir les enfants et petits-enfants. C’est d’ailleurs dans cet esprit – nous sentions que le maître d’ouvrage tenait à ce que ses petits-enfants parisiens aient plaisir à venir à la campagne – que nous avons proposé une piscine couverte sous la maison plutôt qu’à l’extérieur, qu’elle puisse être utilisée tout le temps, même en plein hiver. Pour les mêmes raisons d’ailleurs un sauna est désormais prévu », soulignent les architectes.

L’aménagement intérieur permet aux occupants des deux appartements de profiter d’un maximum d’intimité tout en étant ordonné par la trame structurelle des aciers. Une grande part des énergies nécessaires à l’habitation est prise en charge par des panneaux de cellules photovoltaïques et une centrale géothermique qui permet également de chauffer l’eau de la piscine.

Pourquoi, au-delà de son design, cette maison est-elle si intéressante ? Parce qu’elle contient en germe une réflexion engagée dès le début des années 2000 par SOA, bien avant que nos gouvernements ne se soucient des vertus de l’habitat bioclimatique. Agence pionnière, SOA, depuis plus de vingt ans désormais, poursuit inlassablement son travail de pédagogie au travers d’ouvrages autrement plus impressionnants, dont une tour en pierre à Beyrouth (Liban), que cette première maison qui déjà disait tout d’une intelligence constructive : vernaculaire et contemporaine.

Ensuite, toujours quasiment sur la route du Tour, les suiveurs feront étape à Aubusson pour visiter la Cité Internationale de la Tapisserie, qui assure la préservation et la diffusion d’un savoir-faire vivant reconnu par l’Unesco en 2009 comme patrimoine culturel immatériel de l’humanité. C’est dire l’importance de cet équipement culturel qui, depuis l’époque où Colbert accorda à Aubusson le titre de Manufacture Royale, rayonne désormais internationalement.

Il est vrai que Terreneuve architectes (Nelly Breton & Olivier Fraisse) a livré en 2016 à Aubusson (Creuse) la transformation de l’ENAD en musée contemporain. Au programme : exposition & réserves, plateforme de création contemporaine, ateliers professionnels, atelier de restauration de tapisseries du Mobilier National, centre de ressources, salles de formation, auditorium.

« Nous imaginons la Cité de la Tapisserie et de l’Art Tissé comme une cathédrale aux lignes élancées et multicolores, reflet d’un monde de l’art du grandiose et de la mise en scène née de la tension des fils de la chaîne et de la vibration chromatique. (…) Tout laisse à penser que la Cité est appelée à devenir l’un des principaux symboles de la ville d’Aubusson. Sa visibilité participe au repérage du visiteur, mais la situe également dans la mosaïque des lieux de la tapisserie, et lui confère un rôle de pôle urbain structurant dans la ville », explique Terreneuve.

L’agence s’est attachée à remodeler les anciens bâtiments de l’école (ENAD) pour ouvrir la Cité vers la ville. Mettre en communication l’avant et l’arrière du bâtiment, via un unique hall d’entrée, impliquait de redessiner le profil du socle. Côté est, un parvis ouvert remplace l’ancienne cour fermée de l’École. Côté ouest, le creusement d’un jardin clos en pente relie en douceur le hall d’entrée et le parking créé dans le haut du terrain. La Cité s’ouvre ainsi sur la ville en bénéficiant d’un double accès traversant avec un accueil unique et central. La démolition partielle du plancher haut dégage une double hauteur libre pour la présentation de tapisseries.

Creusé sous l’aile ouest du bâtiment, à l’emplacement de l’ancien préau de l’école, le volume libre de la nef des tentures, de sept mètres de haut et plus de douze mètres de large, a constitué le principal enjeu constructif. Des portiques en béton armé remplacent le quadrillage de la trame de poteaux tous les quatre mètres pour supporter les étages supérieurs. Au lieu d’ajouter une extension neuve contemporaine démonstrative, l’inscription de l’ensemble des espaces de la Cité à l’intérieur de l’épure emblématique de l’ENAD préserve les emprises libres des espaces extérieurs ainsi que l’économie du projet.

A noter qu’en 2021, l’agence parisienne Projectiles est lauréate d’un nouveau projet d’extension de la Cité. Cette deuxième tranche de travaux s’articule autour de l’extension des espaces d’expositions et le développement d’un pôle professionnel.

Le projet comprend la réalisation de 1 600 m² de constructions neuves et 470 m² de restructuration. De nouvelles salles d’expositions permettront d’étendre le parcours de visite afin d’exposer les œuvres contemporaines de son Fonds contemporain, ses grandes tentures et d’organiser des expositions temporaires plus longues et diversifiées.

Ce programme d’extension vise également à disposer d’espaces aménagés permettant le traitement de fonds d’archives et de cartons de tapisseries. Il s’agit aussi de proposer des conditions de conservation équivalentes à celles des grandes institutions partenaires de la Cité de la tapisserie, favorisant le prêt d’œuvres exceptionnelles dans le cadre de normes « Musée de France ».

Ce projet comprend également le développement d’un pôle professionnel à la Cité, qui sera abrité dans un ancien garage automobile de 480 m² structuré sur trois niveaux. Grâce aux futurs espaces entièrement rénovés, la Cité approfondira ses recherches dans la préparation et la présentation des tissages et poursuivra ses réflexions autour de la tapisserie et sa présence dans les arts décoratifs.

Après un fondu et un gâteau creusois avalés sur le pouce et les autres doigts, restera aux suiveurs à doubler le peloton et rejoindre leur salle de presse au sommet du Puy-de-Dôme pour assister aux (presque) premières loges, vers 18h30, à la victoire du héros du jour.

Christophe Leray (dans la caravane)