Comment se fait la sélection d’une agence d’architecture dans le Kentucky, pour la construction d’une école élémentaire par exemple ? Le projet, sur environ 25 000m², est une extension de la Henry F. Moss Middle School de Bowling Green dans le Kentucky et doit accueillir 750 élèves. Coût estimé ? Entre 15 et 16 millions de dollars. Trois agences sont candidates : Stengel-Hill Architecture, Clotfelter-Samokar, et Sherman Carter Barnhart. Comment sont-elles départagées ?
Première surprise, le ‘jury’ reçoit les trois agences sélectionnées l’une après l’autre dans le cadre d’une rencontre publique de trois heures et demie, à laquelle peut donc assister la presse. Bref, du moins jusqu’à ce stade, une sélection en toute transparence.
Deuxième surprise, les trois agences sont toutes trois du Kentucky. Bowling Green est pourtant à la frontière du Tennessee et Nashville est plus proche que Louisville. Bref, trois agences retenues, toutes du Kentucky, ce n’est pas un hasard. Un peu comme si des architectes bretons construisaient les écoles à Rennes et Nantes, des architectes alsaciens celles de Strasbourg et Mulhouse, etc. Sans doute que pour les grandes tours des centres-villes fait-on appel à des stars venues d’ailleurs mais pour une école à Bowling Green, cela semble couler de source que ce soient les architectes locaux qui travaillent.
Troisième surprise, les agences ne sont pas auditionnées sur un projet, pas même une esquisse. Les architectes se pointent les mains dans les poches avec leur porte-folio et, au fil d’un entretien sous forme de questions-réponses, les architectes doivent expliquer pourquoi leur agence devrait emporter le morceau et pas les deux autres.
Le jury est composé exclusivement par des officiels du système éducatif de l’Etat du Kentucky : le directeur de l’école existante, les membres de son conseil d’administration et d’autres membres de l’administration de l’éducation des autres districts de l’Etat. Première question clé posée à tous les candidats à l’issue de leur présentation : serez-vous capables de vous dépatouiller de toutes les normes et règles du système éducatif du Kentucky suffisamment tôt pour que l’école ouvre comme prévu en août 2018 ?
Deux remarques : la première, il y a des règles et des normes, contraignantes sans doute, mais ce sont celles édictées par l’éducation nationale locale, et seulement celles-là, qui importent. L’urbanisme ou l’architecture, la ville n’a pas son mot à dire, hormis pour les problèmes d’assainissement, puisque cela se passe sur le terrain de l’école.
Seconde remarque : la rencontre avec les agences a lieu le 28 septembre 2016 et le directeur de l’école attend que son nouveau bâtiment – pour 750 élèves souvenez-vous – soit livré moins de deux ans plus tard !
Bradford P. Stengel, principal associé de l’agence Stengel-Hill à Louisville, était le premier à s’exprimer. Il a expliqué que son agence était parfaitement capable de réussir ce projet étant donnée l’expérience de l’agence dans la construction de cliniques. «Nous travaillons beaucoup dans le domaine de la santé et dans ce domaine, chaque jour de perdu correspond à une perte de revenus. Personne ne peut préparer un permis de construire plus vite que nous. C’est dans la nature de ce que nous faisons, nous avons toujours un pistolet sur la tempe». Si construire un bâtiment en France est un marathon, dans le Kentucky, c’est un sprint. Aucun des architectes n’a l’air surpris d’une telle échéance.
Puis d’autres associés de Stengel-Hill ont poursuivi la présentation avec des images de leurs réalisations : Graves-Gilbert Clinic, Western Kentucky University et The Medical Center parmi d’autres dans la région. Bradford P. Stengel a reconnu n’avoir encore jamais construit d’école mais expliqué n’avoir, «en 20 ans, jamais perdu un client». «Donnez-nous l’opportunité de construire notre première école», conclut-il.
A l’inverse de l’agence Stengel-Hill, les représentants de l’agence Clotfelter-Samokar, basée à Lexington, ont mis en exergue leur expérience dans la construction d’écoles, de la maternelle au lycée et collège, partout dans le Kentucky. Ils ont mis en avant notamment un lycée dans Harlan County, un collège dans Martin County et plusieurs écoles élémentaires. Au cours de sa présentation, l’agence a montré côte-à-côte les perspectives et les photos des projets pour démontrer que ses réalisations correspondent bien aux dessins.
La présentation de Sherman Carter Barnhart (SCB architects), une grosse firme locale avec des bureaux à Louisville, Lexington et Paducah, était directe et plus habituelle. Les architectes de l’agence, après avoir mis en avant leur expérience dans une dizaine de domaines, du logement à l’hospitalier, ont mis en exergue quelques-unes des 63 – 63 ! – écoles élémentaires construites par l’agence aux quatre coins du Kentucky, dont deux déjà dans ce district : Richardsville Elementary School et Jody Richards Elementary School. «Nous pensons que l’expérience est ici une vraie valeur», a conclu Kenny Stanfield, l’un des associés de SCB architects.
Christophe Leray
A l’heure où nous mettons sous presse, la décision n’a pas encore été prise. Nous ferons une brève pour vous informer du résultat. D’ici là, quel serait votre choix ?