L’agence Petitdidierprioux Architectes (Cédric Petitdidier, Vincent Prioux) a livré en juin 2023 à Paris (IXe), pour le groupe Leitmotiv maître d’ouvrage, « La Fantaisie », un hôtel 5* doté de 73 chambres, 1 bar/café et un restaurant au RDC, un bar au rooftop (R+7), d’un spa, etc. Surface : 3 324 m² SDP ; Coût des travaux : 25 M€ HT. Communiqué.
Hôtel urbain, hôtel jardin
Dans une ville dont l’offre hôtelière est des plus riches, réfléchir à une nouvelle proposition implique forcément une recherche de différenciation. Pour autant, comment ne pas tomber dans une surenchère formelle, une abondance de signaux marquants qui tiennent souvent lieu de recette commerciale ?
Ancré dans sa ville et son histoire, le nouvel hôtel « La Fantaisie » propose un rapport modernisé à la rue, derrière une façade généreuse et raffinée. Plus que par un geste spectaculaire, il cherche à marquer par le dialogue fin qu’il établit avec son contexte et l’expérience urbaine qu’il offre au voyageur.
Le IXe arrondissement, central et touristique, est à la fois un des arrondissements les plus denses de Paris, mais aussi parmi ceux qui possèdent le moins d’espaces verts. Pourtant, à l’origine, la rue Cadet, ouverte au XVIIe siècle, était un chemin de desserte de parcelles maraîchères, et les frères Cadet, dont la rue porte le nom, des maîtres jardiniers depuis Charles IX.
Un hôtel préexistait sur la parcelle depuis la fin du XXe siècle. Son architecture, vaguement pastiche d’un d’hôtel particulier classique, avait mal vieilli et créait une rupture d’échelle et d’homogénéité dans cette partie étroite de la rue. Peu qualitative dans ses matériaux et ses proportions, elle détonnait dans le contexte dynamique de la rue. Les accès, peu visibles et étriqués, ne permettaient pas une animation des rez-de-chaussée sur rue, et le jardin en fond de parcelle, apparaissait comme un espace résiduel.
Faire avec le déjà-là
Il a donc fallu remanier en profondeur l’existant en déconstruisant les signes d’une architecture dépassée tout en conservant une grande partie de la structure, par ailleurs saine. Réinventer le bâtiment sur lui-même et le transformer a permis, d’une part, une meilleure acceptation des travaux de la part du voisinage – car il n’y a pas eu de démolition lourde – et d’autre part, une économie des ressources.
Cette attitude a garanti la meilleure approche environnementale durant le chantier : les ajouts ont été décidés avec précision et parcimonie et chaque intervention a été pensée avec justesse afin de débloquer des situations sans générer de production inutile.
Une parenthèse animée
« La Fantaisie » a ainsi été pensé comme une parenthèse entre l’animation de la ville et la quiétude d’un lieu de villégiature urbain. Pour ce faire, un des enjeux a été notamment de proposer des lieux de respiration, offrant un parcours organisé comme une promenade ainsi qu’une vie hors de la chambre : un jardin arrière agrandi et replanté ; un rez-de-chaussée entre ville et jardin, largement ouvert et offrant de nouveaux services (commerces) ; des espaces de bien-être en lieu et place d’un ancien parking sous-terrain inexploité ; un accès public aux niveaux de toiture proposant un panorama sur les toits de Paris.
L’ensemble des chambres a été agrandi et leur géométrie a été revue afin de leur offrir un rapport direct soit avec la rue, soit avec le jardin. La silhouette urbaine a été complétée et simplifiée, afin de la rendre harmonieuse et en lien avec son environnement. La façade sur rue est ainsi pensée comme un grand filtre, clair et élégant, faisant office de signature urbaine. Elle révèle l’organisation simple et géométrique des chambres et offre de très grandes baies vitrées compensant en apport de lumière la relative étroitesse de la rue.
Afin de préserver l’intimité des usagers, des petits balcons ont été installés : ils tiennent lieu d’espace extérieur comme de brise-vue horizontal et sont une occasion complémentaire de bénéficier de l’animation de la rue.
Autour du végétal
Le rez-de-chaussée de « La Fantaisie » a été imaginé comme un lieu permettant de passer progressivement de la sphère publique à la sphère intime, d’une place animée à un jardin calme. Côté rue, le linéaire commercial est ainsi maximisé et mis en valeur par un travail de menuiserie, mêlant bois et métal, tandis que côté jardin, une grande verrière occupant la largeur de la parcelle, offre l’expérience depuis le restaurant d’être plongé dans un paysage bucolique loin du bruissement de la ville.
En toiture, le projet exploite un espace vide – jusqu’ici délaissé – contre les héberges des bâtiments voisins, et recompose un alignement urbain renforçant la Skyline de la rue. Un volume très vitré est proposé, accueillant bar et rooftop comme point culminant de la balade architecturale.
Matière parisienne
La matérialité de la façade, faite de zinc prépatiné de teinte gris-vert est déclinée en plusieurs mises en œuvre (pliée ou nervurée) et rend hommage au paysage parisien : le zinc et le cuivre de ses toits, bien sûr, mais aussi, la richesse de ses modénatures et la recherche d’un équilibre entre cadre bâti et végétal. Les grandes fenêtres en acier aux montants fins et au compartimentage élancé, évoquent le lointain passé des serres maraîchères.