A Nantes (Loire-Atlantique), des masses aux multitudes : une communauté de travailleurs dans la Tour Bretagne de Louis Fiolleau est un projet total qui ajoute à l’acte de réhabiliter une portée, utopique, sociale et politique. Premier prix ex-aequo du concours Construire Acier 2022 pour cette utopie coopérative.
Le thème du concours Construire Acier 2022 interrogeait les étudiants sur une thématique brûlante d’actualité pour laquelle les étudiants ont présenté des projets pertinents et justes s’imposant pour la plupart comme d’authentiques manifestes de la transformation.
En construisant la Tour Bretagne de 1971 à 1976, Nantes suivait une logique claire : pendant que les industries disparaissaient et que la classe ouvrière se délitait, les m² de bureaux et le secteur du service devaient voir leur hégémonie grandir. Il s’agissait pour la ville de manifester une compétitivité économique sur tout le territoire français.
Néanmoins, à la livraison, les trente glorieuses étaient terminées. Les prix ont grimpé. Les conglomérats projetés ne sont jamais venus s’installer, le temple de la consommation du socle n’a jamais pris place et le parking n’a jamais été utilisé à son plein potentiel. Restée coquille vide, la Tour a logiquement fermé en 2020.
Ses plateaux ont été vendus par la ville à des promoteurs pour un désamiantage…
Face à cet abandon, le projet propose une alternative sans aucun doute plus politique. La structure socio-économique ayant évolué, il s’agit de faire en sorte que la tour engage le même mouvement.
Ce projet raconte donc l’histoire d’un basculement, celui d’un objet nantais iconique, comme celui d’une masse vers une multitude.
On y proclame haut et fort l’existence de travailleurs hétérogènes, écrasés par l’ethos du capitalisme néo-libéral.
Au-delà du fait d’entretenir une dialectique du système productif, il s’agit ici de retrouver une forme de cohésion de classe.
Les vestiges de béton du passé et les poutres métalliques du présent s’entrechoquent alors pour accueillir une communauté autonome de 200 membres, copropriétaires de leurs espaces de travail, de leurs logements et de programmes collectifs : parlement, centre énergétique, plateforme logistique, unité agricole… Ceux-là viennent se loger aussi bien dans la tour et les abris souverains de sa greffe, que dans le socle remanié et ses espaces typologiquement contraints.
Ce projet s’emploie ainsi à détourner les conditions d’autonomie de la multitude dans un jeu d’équilibre – symbolisé par la structure – entre mobilité individuelle et ancrage collectif.
L’avis du jury : une utopie coopérative
A propos du CONCOURS ACIER
Authentique laboratoire d’idées et de création, le concours « Acier » de ConstruirAcier s’est imposé au fil des ans comme un événement majeur et valorisant dans le cursus des étudiants inscrits en école française d’architecture et d’ingénieurs.
L’objectif est de donner aux candidats l’opportunité de découvrir et explorer les possibilités architecturales et techniques de l’acier en concevant un ouvrage avec ce matériau. Depuis plus de dix ans, des étudiants ont ainsi pu présenter leurs projets devant un jury composé d’architectes, d’ingénieurs, de journalistes et de spécialistes de la construction en acier et de membres de ConstruirAcier.
Les lauréats du concours sont récompensés par un prix de 10 000 €, leurs projets sont publiés dans la revue MATIÈRES et dans le book des prix de l’architecture acier et présentés au public lors de la Steel.in en octobre à Paris.
ConstruirAcier, c’est aussi la Revue Matières, magazine de référence de l’architecture acier.
En savoir plus sur ConstruirAcier : https://www.construiracier.fr