Le programme consistait en la revalorisation touristique du fort l’Écluse à Léaz (Ain). Un petit projet consistant en une salle d’exposition de 140m² et un accueil de 100 m². l’atelierpng – Antoine (Pedro) Petit, Nicolas Debicki et Grichka Martinetti, partagés entre Paris et Voiron (Isère) – en le reconstruisant sur lui-même offre une seconde vie aux pierres de l’ouvrage. Communiqué.
Un lien affectif puissant lie les habitants du pays de Gex à leur fort. Ce territoire vivant, détruit, reconstruit, agrandi, a souvent changé d’usage. S’il est aujourd’hui associé au paysage et au génie civil, le gabion est aussi intimement lié à l’architecture militaire. L’utiliser à nouveau, dans une opération de valorisation touristique, c’est faire entrer cette opération en résonance avec la roche, le site et l’ouvrage. Utiliser une maçonnerie sèche, la matière même du site faite de pierres déconstruites, c’est contenter un désir d’innocuité.
Un fort reconstruit sur lui-même
Construit au XVIIe siècle aux confins du pays de Gex, le territoire du fort et le fort lui-même sont vivants. Leurs usages oscillent au gré des périodes de guerre et de paix, entre atout paysager et joyau militaire.
Atelierpng questionne la nature des ouvrages et leur datation, s’en saisit pour s’intégrer au mieux dans les couches historiques successives de cette imposante construction, à même la roche du Jura.
Un fort pour voir le paysage et l’histoire
Historiquement logé à flanc de colline, pour mieux voir arriver l’adversaire, le fort montre aujourd’hui un paysage d’exception : les rives du Rhône, les massifs de l’Ain et ceux de Haute-Savoie. La revalorisation du fort raconte l’histoire militaire du lieu, de son architecture et de ses matériaux, de sa position singulière ancrée dans le massif.
Requalifier les espaces d’accueil
La première intervention est la requalification des espaces d’accueil, au rez-de-chaussée d’une des casemates. Sans perturber la rigueur de la pierre savamment taillée qui fait l’identité du fort, le choix des architectes s’est porté sur l’installation mesurée d’éléments métalliques qui s’intègrent aux voûtes et résistent aux conditions climatiques particulièrement difficiles.
Réinvestir la casemate
Un restaurant accueille les visiteurs désireux de s’arrêter au sein de l’espace voûté de la casemate. Celle-ci est éclairée indirectement pour mettre en évidence les aspérités de la roche.
Une nouvelle circulation verticale
La nouvelle circulation verticale du fort se perçoit depuis l’entrée de la Porte de France pour l’oeil aguerri, tandis qu’elle se montre franchement depuis la cour haute intérieure.
Cadrer des vues
L’opération se targue d’une géométrie sans fard, en résonance avec la rigueur du fort l’Écluse, taillée pour résister aux hivers les plus rudes. Les meurtrières négociées entre les gabions cadrent des vues vers l’environnement tout à la fois paysager et militaire.
Le gabion, une évidence
Intervention la plus visible, la circulation verticale est réalisée en gabion choisi pour son lien matériel indéfectible avec le fort l’Écluse, patiemment construit à même la roche du Jura. Les cages d’acier galvanisé ont été remplies exclusivement avec les produits des démolitions liées à l’intervention, dans une logique vertueuse de recyclage.
Le gabion est intimement lié à l’architecture militaire. On le trouve dans les traités militaires dès le XVIe siècle et notamment celui de Vauban, maître à penser du Général Haxo, constructeur du fort l’Écluse.
Originellement constitué d’un panier en osier tressé rempli de gravats, il amortissait les balles et les éclats jusqu’à la Première Guerre Mondiale. Il est remplacé par sa version moderne inventée par le chaudronnier italien Gaetano Maccaferri qui substituera en 1893 la cage de fils d’acier rigides et inoxydables à l’osier et les gravats par des cailloux à la granulométrie contrôlée.
Un chantier sec
Les conditions délicates du chantier, au coeur d’un fort haut perché, ont amené à privilégier la préfabrication et la notion de chantier sec. Les découpes et déposes nécessaires à l’installation de la structure ont été réalisées dans une logique de parcimonie et d’économie de moyens. Les pierres issues des déposes ont été triées et concassées afin d’obtenir la matière première du projet. Deux murs fins de gabions ont été dressés et remplis en place avec ces produits de démolition.
Le même principe de préfabrication et de montage «à sec» a été proposé pour la réalisation des planchers : des cadres métalliques galvanisés sont remplis par du pavement de sol.