« Notre capacité de travail est la même sauf qu’il nous faut coucher les enfants et retourner à l’agence, ou travailler avant qu’ils ne se réveillent. On s’ajuste mais on a tendance à négliger autant les adultes que les enfants« . La phrase revient comme une antienne. Ce qu’elles en pensent, avec leurs propres mots.
« J’ai appelé mon fils Adrien, comme l’empereur des architectes ». Jocelyne Behrend
« C’est difficile pour les enfants d’avoir une mère patronne d’une agence. Je sens bien que je ne suis pas assez souvent là. Je ne peux que me féliciter de l’avènement des nouvelles technologies qui ont permis une évolution du métier dont les femmes sont les premières à bénéficier ». Cristina Conrad.
« Travailler jusqu’à la veille de l’accouchement ne m’étonne pas. C’est un vrai problème. Toutes mes copines qui n’exercent plus ont cessé leur activité après avoir eu des enfants. Je voulais rester architecte libérale et je pensais qu’avec des enfants je ne m’en sortirai pas. J’ai repoussé d’année en année. Cette année est la bonne, je suis prête, les choses sont mieux installées ». Corinne Vezzoni
« Le danger aussi, quand la femme est chargée de famille, est de faire de l’alimentaire. Après le plus souvent c’est cuit, on n’a plus envie de perdre ce confort. Souvent les hommes peuvent s’appuyer sur une épouse qui a tout assumé, voire qui s’est sacrifiée ; les enfants, les réceptions, l’intendance. Je constate parfois chez eux une forme de désinvolture dans la réponse plastique sur les projets parce qu’ils n’ont au fond aucun souci et peuvent se permettre de prendre des risques. Et désinvolture aussi quand, le succès étant au rendez-vous, ces hommes divorcent. La femme est de fait collée à la réalité et se révèle peut-être moins aventureuse, moins ‘loufoque’. Car le fait est que, question intendance, c’est rarement l’inverse ». Une architecte.
« Les enfants sont assez fiers de leur mère. Quand ils sont devenus adolescents, ça va, mais entre 6 et 12, on est toujours dans l’urgence. Sortir est quasiment impossible et les conférences ont lieu en général à 18h30, la plus mauvaise heure, celle du bain, des devoirs, du dîner. Le mari met la pression sur le quotidien. On se pose des questions vis-à-vis des enfants. J’étais crevée ». Brigit de Kosmi
« Les problèmes d’organisation se posent au même titre que pour une autre profession libérale. Nous sommes dans une société où il y a une relative répartition des tâches ménagères, et où les femmes travaillent à plein temps au même titre qu’un homme. Ce résultat confortable a été obtenu grâce aux combats menés auparavant ». Raphaëlle Hondelatte
« Aujourd’hui chacun a ses forces et ses faiblesses. Il faut rétablir un rapport de force où l’homme à sa place. Notre génération a le souci de concilier famille et boulot. On ne peut pas rentrer à 11h du soir, s’absenter les week-end, ça passe mal. Avant l’engagement des ‘amazones’ impliquait un choix de vie énorme. Aujourd’hui on peut être libre, compétente et conserver tous les attributs de la féminité. Ce n’est pas l’un ou l’autre. Pour moi l’enfant est un faux problème. Les artistes qui sont tous les soirs sur scène ont des enfants. Tout concilier : ça ne veut pas dire qu’on y arrive mais on essaye. On n’est pas complètement décalé du reste de la population. Le métier fait partie de notre vie, ce n’est pas ce qui nous définit ». Nathalie Blaise.
Propos recueillis par Christophe Leray
Cet article est paru en première publication sur CyberArchi le 19 avril 2006