De la case à terre à la case en l’air, en juin 2021, la Maison de l’Architecture de La Réunion / Mayotte a décerné ses Prix de l’architecture de la Réunion, les PAR, dont c’était la quatrième édition. Découverte des projets lauréats.
Prix Case à Terre – Maison Buson Ligorred
Maître d’oeuvre : Olivier Ehresmann
Comment transposer les concepts de ventilation, d’ouvertures et de générosité qui caractérisent l’habitat tropical au contexte urbain ? Pour cette demande d’habitat bioclimatique en ville, l’architecte a imaginé un habitat composite de volumes et d’espaces fractionnés.
La morphologie de cette parcelle étroite et profonde a inspiré une succession de séquences qui se distribuent l’une l’autre. L’habitation est organisée le long d’une artère traversante pour éviter toute impression de perspective fermée. On y trouve un premier volume diurne avec un séjour/cuisine agencé à l’image d’un loft qui se prolonge sur une terrasse couverte prise entre 2 patios (le braséro, la piscine). Un second volume nocturne regroupe trois chambres, deux salles de bains avant de se prolonger un jardin arrière privé avec jacuzzi et terrasse ombragée.
Cette succession de lieux intermédiaires enrichit l’espace, favorise une diversité des modes d’habiter tout en permettant de multiplier les possibilités de ventilation naturelle.
Case en l’air – Nout
Maître d’oeuvre : Cazarchi / Nathalie Bernard-Dahbi
Maître d’ouvrage : SCA NOUT
Il s’agit du premier immeuble d’habitation collectif participatif, partagé et en autopromotion à La Réunion. Car ici, les habitants sont à la fois les maîtres d’ouvrage, les usagers et les architectes. Ce projet a été l’occasion de poser un regard critique sur la qualité du logement en restituant, par la méthode participative, la place de l’habitant dans le processus de la conception.
Ce mini collectif intègre des locaux partagés (laverie, bureau) et des espaces interstitiels afin de ré-enchanter la domesticité. La ventilation naturelle est favorisée par la porosité de l’enveloppe et surtout par une fragmentation des volumes. Ces espaces interstitiels facilitent le lien social entre les habitants tout en proposant l’intimité nécessaire en collectif. Au cœur de ce processus participatif : le mieux-vivre ensemble.
Travailler – Accueillir – La Corem
Maître d’oeuvre : TT Architecture
Maître d’ouvrage : SNC Innoval
Un double challenge a présidé ce projet : réaliser un bâtiment exemplaire en termes de développement durable et respecter les principes du feng shui.
Confort et maîtrise de l’énergie trouvent un écho dans la construction à ossature bois avec une isolation renforcée et différents types de bardage en façade. Cette réflexion se retrouve également dans le traitement des espaces extérieurs avec le patio planté ou la végétalisation des places de stationnement.
Afin de maîtriser les dépenses énergétiques, on trouve peu de béton. Toute l’ossature du bâtiment est en bois, l’isolation est renforcée, les brasseurs d’air sont préférés à la climatisation et les sources naturelles d’éclairage sont privilégiées. Avec la mise en place d’un système de suivi énergétique et de surveillance des fuites d’eau, tout a été pensé pour consommer le moins possible. Au-delà des labels dont bénéficie cette construction, les utilisateurs du bâtiment sont eux-mêmes formés, informés et impliqués à la gestion de l’énergie.
Apprendre – se divertir – Piscine de Stella
Maître d’œuvre : Architectes de l’Éperon
Maître d’ouvrage : Commune de Saint-Leu
L’idée première était de penser le projet comme un révélateur du paysage à la manière du “land art”. Les lignes épurées sont soulignées par un traitement de façade unique de lames bois. Cette grande simplicité formelle confère une forte identité à l’équipement, immédiatement perceptible depuis la route des Tamarins. Le dessin même du projet, très lisse, très épuré, offre un effet de belvédère tout en s’intégrant au paysage environnant.
Cette arène aquatique fonctionne comme un filtre entre extérieur et intérieur. Le projet s’articule autour de l’axe mer-montagne qui traverse le hall d’entrée et borde les vestiaires côté plage. Cette composition révèle la topographie naturelle du terrain en recréant un effet de gradins et terrasses. Ce choix libère une vue optimale vers le paysage environnant tout en préservant l’intimité des baigneurs.
Recréer – Boutique de solidarité de la fondation Abbé Pierre
Maître d’œuvre : Altitude 80 Architecture
Maître d’ouvrage : Fondation Abbé Pierre
Il s’agit d’un accueil de jour pour les personnes en grande précarité et les sans domicile fixe. Ce projet mêle des extensions neuves à la réhabilitation d’une ancienne case créole. Il propose une nouvelle lisibilité de la maison d’origine en la dépouillant de tous ses rajouts. Autour du noyau dur qu’est la maison sont imaginées trois entités distinctes. Tous les volumes sont de plain-pied et interconnectés les uns aux autres. Les gabarits de ces constructions neuves sont tous inférieurs à celui de la maison, ce qui renforce le statut de cette dernière comme étant le lieu principal.
Le projet reprend les codes d’une parcelle réunionnaise dans son implantation et son rapport à l’extérieur. Ainsi le schéma “barreau-jardin/avant-maison principale/cour arrière-annexes” a été réinterrogé afin d’inscrire la nouvelle boutique solidarité dans sa contemporanéité. Le projet joue entre les relations intérieures/extérieures au travers de ses patios, de ses circulations ventilées et une grande porosité des façades.
Projet rêvé – Lycée polyvalent de Mamoudzou Sud
Maître d’œuvre : Laboratoire d’architecture climatique de La Réunion / Tand’m architectes
Maître d’ouvrage : Vice-Rectorat de Mayotte
Ce projet est remarquable notamment dans son intégration à l’environnement. L’intégration urbaine et architecturale s’appuie sur les cheminements existants et dégage une composition linéaire forte qui permet de proposer une implantation visible depuis l’entrée de la vallée.
Le projet travaille sur des registres d’architecture tropicale, de faible épaisseur, à grands toits climatiques protecteurs. Il est ventilé et éclairé naturellement. Solidement ancré dans un site, il est agrémenté de références locales. L’organisation linéaire est fédérée par les espaces de cours, par les circulations protégées et les volumes distincts. Elle apporte à l’ensemble une grande fluidité spatiale.
Prix de l’Océan Indien – Centre nautique de Mayotte voile
Maître d’œuvre : Dominique Bourgogne
Maître d’ouvrage : Mayotte voile Sarl
La base nautique de Bandrélé, avec ses baobabs remarquables, accueille sept bungalows pour l’hébergement hôtelier de sa clientèle. L’implantation sur ce site exceptionnel se veut volontairement éclatée afin de préserver l’intimité de chaque bungalow, d’éviter les vis-à-vis et de privilégier le panorama sur le lagon et l’îlot Bandrélé.
Sur le plan constructif, le projet se veut le plus simple possible ; adapté aux contraintes climatiques et aux savoir-faire locaux. Afin de ne pas bouleverser le site, chaque bungalow émerge du sol pour ne pas l’impacter et pour permettre une ventilation sous le plancher de chaque construction.
Bien qu’identiques, les bungalows se différencient par un jeu d’assemblage de bois en façade et par la présence de voiles et de filets tendus en prolongement des terrasses qui permettent à la tombée de la nuit de s’y allonger pour mirer les étoiles au travers des ramures des baobabs.
Projet remarquable dans l’Océan Indien – Maison Raharivelo à Antananarivo (Madagascar)
Maître d’œuvre : Miora Raharivelo
Maître d’ouvrage : Harilaza et Miora Raharivelo
Situé à l’intérieur d’un site patrimonial en périphérie d’Antananarivo, ce projet de maison s’inspire des anciens villages malgaches de forme concentrique avec un « hadivory », fossé imaginé pour protéger l’enceinte du village. Le projet reprend l’orientation des maisons malagasy qui se font traditionnellement vers le nord-est, le Nord étant considéré comme la direction honorifique et l’Est comme la direction sacrée.
La référence à l’architecture malgache est symbolisée également par l’utilisation de briques apparentes mais aussi dans la volumétrie simple. Le rez-de-chaussée accueille un espace de réserve ainsi qu’un studio. Les deux niveaux supérieurs desservent deux appartements identiques composés de deux chambres et un séjour ouvert. Les séjours comme l’escalier sont semi-fermés par un jeu de claustra permettant de regarder l’extérieur tout en étant protégé du regard, et offrant une vibration d’ombres et de lumières.