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Accueil > Chroniques > Psychanalyse de l'architecte > Psychanalyse de l’architecte – Saison 3 > L’espace public, et privé, pour l’architecte, ce n’est pas le genre

L’espace public, et privé, pour l’architecte, ce n’est pas le genre

3 novembre 2020

genre

L’architecte ne sait pas ce qu’est un espace public non genré. Ethel Hazel savoure plus qu’elle ne le voudrait une vengeance inattendue. Dr. Nut se documente sur la traite des femmes.

***

« L’amour est un genre de suicide ». Jacques Lacan

***

Pour Ethel Hazel, ça a commencé avec un appel de son frère : « Bernard est mort, il a été sauvagement assassiné. On a retrouvé son corps dans une église. Je n’en sais pas plus pour l’instant. La famille est sidérée et dévastée. Il avait cinq enfants tu sais ». « Je sais », pensa froidement la psychanalyste. « Je ne sais pas encore quand auront lieu les obsèques, c’est un peu la pagaille en ce moment mais est-ce que tu ne pourrais pas descendre ? » Ethel Hazel resta silencieuse, le temps de comprendre que Bernard était mort – elle éprouva malgré elle un sentiment de joie mauvaise qui la fit frissonner de fièvre pendant quelques secondes – et de comprendre la requête de son frère. Descendre en Vendée ? « Ce sera difficile, surtout avec le confinement, et puis j’ai des rendez-vous », répondit-elle, sachant qu’elle était de mauvaise foi, c’est le cas de le dire. Elle n‘avait aucune envie de retrouver la famille, surtout après ce qui s’était passé avec cet en…. de Bernard. « Tu es sûre ? Cela ferait plaisir à tout le monde tu sais », insista son frère. « Oui, je te promets, je ne peux pas partir en ce moment et c’est mieux comme ça, avec le confinement et tout, et puis je ne le connaissais pas bien en fait Bernard, ni sa famille non plus ». « Très bien Ethel. On essaye de se voir bientôt ». « Oui, c’est ça ». Bises, bises, clic.

Le lendemain, elle avait reçu un appel de la police, de Vendée. « Ethel Hazel ? » C’était une policière. Ils doivent penser qu’il vaut mieux une femme pour annoncer ce genre de nouvelles, se dit-elle. « Elle-même », dit-elle. « Bonjour. Je suis le Lieutenant Eleanor Mondale, de la brigade de recherche de la Roche-sur-Yon ». « Bonjour ». « Vous connaissez le nommé Bernard Lévesque, n’est-ce pas ? ». « Oui, c’est, enfin c’était, mon beau-frère », répondit Ethel et elle sentit à quel point elle était nerveuse. « Je sais qu’il est mort mais que lui est-il arrivé ?», demanda-t-elle et elle tremblait comme si elle avait froid en attendant la réponse. « Vous savez sans doute qu’il a été assassiné mais, à ce stade, je ne peux pas vous donner les détails. Un commandant vous rappellera si nécessaire. Moi je suis là juste pour vous poser quelques questions parce que nous avons vu dans son agenda qu’il avait rendez-vous avec vous plusieurs jours avant sa mort. On voudrait savoir si vous avez alors noté quelque chose de particulier, un détail qui pourrait nous mettre sur une piste quelconque. C’est un travail de routine mais on ne sait jamais ». Ethel eut un moment d’hésitation. Tout dire maintenant ? C’était l’occasion. Mais dire quoi ? « Ecoutez non, nous avons dîné à la maison puis il est reparti ». « Rien dans vos discussions qui aurait pu vous mettre la puce à l’oreille ? ». Ethel se raidit, son cœur battait la chamade et d’une voix plus hésitante mais calme : « vous savez nous avons parlé de la famille – on ne se voit pas souvent – et du travail, il était à Paris pour affaires, à cause du salon de l’agriculture qui était annulé je crois, et du Covid et du couvre-feu qui allait arriver, des choses comme ça. Rien de spécial ». « M. Lévesque était dans son état normal ? » La psychanalyste fut surprise par la question : « écoutez, Je ne sais pas quel était son état normal mais je n’ai rien noté de particulier ce soir-là ». « Très bien. Merci. Si vous pensez à quoi que ce soit, vous avez mon numéro ». « Dois-je m’attendre à d’autres appels de votre part ? » Ethel avait l’impression que sa question puait l’anxiété. « Je ne pense pas, votre famille aura bientôt tous les détails et pourra récupérer le corps. Quant à vous, c’est bon pour nous je pense », conclut Eleanor Mondale. Clic.

Ethel ne savait trop que penser quand, le lendemain encore, elle découvrait toute l’histoire dans les faits divers du Parisien. Vendée ! Un homme d’affaires retrouvé assassiné sur l’autel de l’église de Neuil-le-Dolent. Elle savait déjà à peu près tout des informations de l’article mais elle apprit quand même ainsi que Bernard avait été retrouvé le corps nu, « lacéré de mille entailles », la cause de la mort étant cependant un coupe-papier enfoncé jusqu’à la garde dans son œil gauche. « UN COUPE-PAPIER ENFONCE JUSQU’A LA GARDE DANS SON ŒIL GAUCHE ?????? ». La police s’interrogeait d’ailleurs sur ce détail. Pour Ethel, soudain, ce n’est pas un détail. Maintenant que Bernard est mort, et elle s’aperçoit qu’elle ne le regrette en rien, elle ne connaît qu’un seul autre homme au courant de l’histoire du coupe-papier. Se pourrait-il ? De nouveau, elle éprouve un accès de fièvre qui l’échauffe de la tête aux pieds. Elle sait, ou croit savoir, ce dont cet homme est capable, et il vient de s’installer pour sa séance !

Ethel Hazel (qui ne montre rien de son trouble mais ne peut s’empêcher de considérer l’architecte sous un œil nouveau) – Vous avez l’air préoccupé …

L’architecte – Ha bon, vous trouvez ? J’allais vous dire la même chose… Non, c’est juste que je n’ai pas un moment à moi en ce moment. Le couvre-feu, puis le reconfinement, comme si je n’avais que ça à faire.

E.H. – Justement, le reconfinement peut être une chance, le temps de faire une pause. Vous n’auriez pas envie de passer du temps dans votre bergerie par exemple ?

L’architecte (surpris qu’elle lui parle de sa maison isolée) – Oui, on en rêve toujours, d’un moment tranquille où nous n’aurions rien à faire, que le temps de lire du matin au soir par exemple. Je suis sûr que cela peut être plaisant deux ou trois jours mais bon je ne peux pas rester sans rien faire. Sinon je ne serai pas architecte. Et en ce moment il y a toujours beaucoup à faire même si on sent bien dans les agences d’architecture que chacun se prépare à des mois difficiles.

E.H. – Vous avez encore du monde à l’agence, la dernière fois que je vous ai vu, vous tiriez des plans sur la comète, une morgue, des bureaux, un centre commercial ?

L’architecte – Non là, pour le coup, je suis désormais assez souvent seul ; comme vous le disiez, ce nouveau confinement me permet de faire souffler l’équipe, on a bossé comme des fous ces dernières semaines, et puis comme je suis chez moi à l’agence, cela me va bien finalement de me retrouver seul de temps en temps. Et puis cela permet de faire autre chose, j’étais par exemple dans un jury de PFE dernièrement.

E.H. – PFE ?

L’architecte – Projet de fin d’études, c’est le diplôme des jeunes architectes. J’aime bien assister à des jurys. C’est toujours intéressant et on peut y faire des rencontres imprévues.

E.H. (elle qui s’était longtemps demandé comme Dubois choisissait ses victimes a une sorte de révélation. Elle sait que l’architecte n’enseigne pas. Mais des jurys ? Elle n’y avait pas pensé. C’est comme ça qu’il les repère ? se demande-t-elle) – Je vous écoute puisque vous semblez vouloir en parler

L’architecte – En effet, alors que justement, l’autre jour, j’avais plutôt passé une bonne journée à l’école d’archi, comme un fait exprès, le dernier PFE portait sur « Espaces publics et égalité des genres ». Suivit une démonstration militante pleine de certitudes. Mais qu’est-ce qu’un espace public non genré, i.e. non masculin ? C’est celui, nous dit-on, qu’une femme ne doit pas avoir peur de traverser. Mais ce n’est pas l’espace qui fait peur, ce sont ceux qui l’habitent, et quand une femme a peur de traverser un tel espace, c’est en réalité tout le monde qui a peur, les gamins qui sortent de l’école, les papis et mamies qui rentrent du parc, les gays, les gros, les nains, les femmes n’ont pas le monopole de la peur.

E.H. (qui revit son agression. Pincée) – C’est quand même plus difficile pour les femmes, convenez-en, ne serait-ce que pour une question de masse musculaire…

L’architecte – Certes mais la question est : être architecte pour qui ? On ne peut pas être architecte pour femmes ou architecte pour hommes comme chez le coiffeur. Un architecte ne doit pas se poser la question d’un espace non genré mais celle d’un espace qui convient à tous. L’architecte par principe travaille pour tout le monde, quel qu’il soit. Je me souviens d’une phrase de Mario Botta, un architecte suisse qui construisait de très belles maisons. Un jour quelqu’un lui a demandé ce qui se passerait si les propriétaires arrivaient avec leurs meubles de chez Ikea et leur mauvais goût dans sa maison si belle. « Si la maison ne marche pas à cause du mauvais goût des propriétaires, c’est la faute de l’architecte », répondit-il. Il a raison.

E.H. – (à écouter l’architecte, elle se dit que si tout ce que les femmes avaient à craindre dans l’espace public, c’est le regard lubrique des hommes, avec la certitude que ça n’aille jamais plus loin, ça pourrait encore aller. En réalité, c’est dans l’espace privé, à la maison, que les femmes sont en danger et le problème du regard louche il est souvent réglé à grands coups de poings dans la figure. Et puis ça vaut pour des hommes aussi, et bien sûr plein d’enfants qui s’en prennent plein le portrait. Rien que d’y penser, elle en frissonne et ne peut s’empêcher de penser que son agression aurait pu beaucoup plus mal finir. Elle repense alors à l’appel de la police – elle imagine le corps lacéré de Bernard et de nouveau elle sent son propre corps s’en réjouir – et, malgré son appréhension, décide d’en avoir le cœur net. C’est donc le cœur battant qu’elle tente de reprendre le fil de la conversation) – Vous avez pu vous déplacer dernièrement, avant l’instauration de reconfinement je veux dire ?

L’architecte (qui ne voit pas son trouble, poursuit tranquillement) – Oui mais, entre couvre-feu et confinement, c’est passé juste.

E.H. (tentant de cacher son excitation) – Qu’est-ce qui est passé juste ?

L’architecte – Mon voyage en Bretagne. J’ai revu ce maire dont je vous ai parlé, et de son projet contemporain dans son village… Il m’avait invité à une réunion du Conseil municipal pour que j’explique à tous où j’en étais du projet. J’aime bien ces réunions pédagogiques, avec des gens qui ne se la pètent pas, attentifs, pas toujours d’accord mais sincèrement intéressés au devenir de leur commune. C’est un plaisir d’expliquer notre travail et d’écouter leurs remarques. Comme en plus le maire il est sympa, j’étais heureux d’accepter son invitation. Ils m’ont bien proposé de le faire en visio mais je leur ai dit que j’aimais autant venir, que ça me ferait sortir de Paris avant le confinement. Ils ont rigolé et dit qu’ils seraient heureux de m’accueillir. Et ça s’est super bien passé. On a mangé tout en poursuivant la discussion et le temps que je rentre à Paris il était tard. Mais personne ne m’a demandé mon attestation.

E.H. (ne sachant si elle veut vraiment connaître la réponse) – Et vous êtes allé à la pêche pendant ce voyage ?

L’architecte (qui sourit) – Non, pas cette fois car je devais faire un détour. J’avais peut-être une affaire en Vendée, un bâtiment agricole.

E.H. (En Vendée !!!! Horrifiée – lacéré de toute part, avait dit la police – Ethel ne peut cependant s’empêcher d’éprouver un chaud sentiment de reconnaissance. Hésitante) – Et l’affaire s’est conclue ?

L’architecte – Dans un sens, on peut dire ça comme ça, elle s’est conclue.

Un long silence s’ensuit, l’architecte ne faisant pas un mouvement ni ne cherchant le regard de la thérapeute.

E.H. (son cerveau court à 100 000 à l’heure. Elle sent bien au fond d’elle l’admiration qui pointe pour l’architecte. De lui-même il est allé régler son compte à ce salopard de Bernard et elle ne parvient pas à se sentir compatissante, il a mérité son sort ce connard. Mais comment Dubois l’a-t-il retrouvé ? Comment s’y est-il pris pour l’approcher et le lacérer ? Pour autant, le coupe-papier dans l’œil gauche ne lui laisse aucun doute. Son sentiment de vengeance un peu primaire accompli, elle considère cependant enfin l’horreur de la situation. Car le pauvre Bernard n’en méritait pas autant. Certes, à moitié saoul, il l’avait violemment agressée et arrivés dans sa chambre, il lui avait arraché ses vêtements, avec difficulté, et s’il n’y avait eu pas le coupe-papier près de l’œil, elle l’aurait repoussé facilement mais il aurait été capable de faire un mauvais geste ce con et elle aurait perdu un œil, ou pire. Toujours est-il qu’avant même qu’il ait maladroitement, avec sa seule main gauche, fini de sortir son truc, qu’elle n’a jamais eu le temps de voir d’ailleurs, il en avait déjà mis partout sur elle et sur son lit. Il en avait perdu toute son énergie et, tandis qu’il haletait, il baissa la main. Le coupe-papier disparu, elle le gifla et le repoussa en criant. Il a repris ses esprits et, sans lui accorder un autre regard, il est parti, penaud, sans demander son reste, en tenant son pantalon souillé. Furieuse elle avait mis ses vêtements, ses draps, sa couette, la nappe de la table, tout ce que ce salopard avait touché dans un grand sac-poubelle, le fermant serré, regrettant de ne pouvoir tout brûler directement. Elle avait pris une longue douche, sorti des draps et du linge de maison frais avant que la fatigue ne prenne le pas sur la colère et la frustration. De là à ce que Bernard se retrouve avec un coupe-papier planté dans l’œil gauche… Elle s’était même assurée que ce n’était pas le sien de coupe-papier, que le sien était bien toujours chez elle. Elle sait qu’elle peut désormais dénoncer l’architecte puisqu’elle n’a maintenant plus aucun doute quant à sa vraie nature. Mais à quoi bon ? se dit-elle, d’autant qu’elle se sent confusément immensément flattée et que son corps lui envoie des signaux d’une force incroyable. Après tout, ce n’est pas souvent qu’un serial killer fait sa fête à l’un de vos agresseurs. Elle regarde Dubois, qui semble également perdu dans ses pensées et s’en veut soudain de l’avoir imaginé en satyre pervers quand il se révèle en ange gardien) – …

DRINNNN, DRINNNN

La sonnerie qui indique la fin de la séance les ramène tous deux à la réalité. Dubois est déjà debout.

L’architecte (en sortant son portefeuille pour payer la consultation, il plonge son regard dans les yeux d’Ethel) – On se revoit bientôt comme d’habitude, n’est-ce pas ?

E.H. (qui n’a pas le temps de réfléchir, elle bafouille) – Oui, oui, bien sûr.

Avant qu’elle n’ait le temps de réagir, l’architecte était parti, la dernière image qu’elle gardait de lui étant le sourire chaleureux – et complice ? pensa-t-elle – qu’il lui avait adressé avant de remettre son bandana et son casque.

Dr. Nut (d’après les notes d’Ethel Hazel)
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***

Dans sa prison sans lumière du jour, Dr. Nut est assis sur le sofa, un livre ouvert devant lui, et son carnet de notes à côté. Il lit avec intensité, faisant tourner son crayon entre ses doigts.

L’architecte – Hello inspecteur. Que lisez-vous donc avec autant d’attention ?

Dr. Nut (sans lever les yeux de son livre) – Cet essai d’une journaliste mexicaine à propos des filières de traite des femmes.

L’architecte – Oui, je m’en souviens, un récit qui fait frémir, n’est-ce pas ?

Dr. Nut (frémir, c’est le mot, pense-t-il. Du fait de son métier, affecté aux personnes disparues, il a souvent eu affaire aux proxénètes de tout bord et tenté de percer des filières de toute nationalité, les mafias russes, slovaques, hongroises, italiennes rivalisant de cruauté. Il sait que l’hydre est immortelle. Il n’apprend donc rien de vraiment nouveau dans ce livre mais la description des connexions entre réseaux européens et réseaux mexicains et latino-américains est précise et s’il était au courant des réseaux qui alimentaient l’Espagne, il n’avait jamais pris la mesure que l’Espagne n’était dans certains cas qu’une étape de transit. Ce ne sont plus donc des centaines mais des milliers de femmes qui sont transbahutées d’un pays à l’autre, au-delà des océans même, se disait-il) – Oui, c’est votre documentation je présume, pour pouvoir mener tranquille vos petites affaires.

L’architecte (souriant) – Ne soyez pas sarcastique, j’aime à penser que j’ai un peu plus d’élégance que ces sauvages qui font de la traite d’êtres humains par wagons plombés. Il n’y a chez moi ni violence ni mauvais traitement.

Dr. Nut (toujours penché sur son livre) – Oui je sais que vous avez une haute opinion de vous-même.

L’architecte (souriant de plus belle même s’il sait que l’inspecteur ne le voit pas) – Je suis architecte ne l’oubliez pas.

Dr. Nut – Peut-être mais pour moi vous êtes surtout un assassin et je ne sais pas ce qu’en pensent vos victimes de votre élégance à les tuer.

L’architecte (joyeux)– Ca dépend lesquelles mais vous seriez surpris ! Il y a en fait une variété de situations, plus nombreuses vraiment que je ne l’avais imaginé au départ. La variété, c’est une forme de biodiversité, non ? D’ailleurs, de l’une de ces situations, je crois par exemple Ethel reconnaissante.

Dr. Nut (imaginant soudain le pire, fait un gros effort pour ne pas montrer que son cœur vient de s’emballer) – Ha, et en quoi vous serait-elle reconnaissante Ethel ?

L’architecte (fier en quelque sorte) – Disons qu’elle comprend ce que d’aucuns font pour elle. Il y a des femmes qui ne se rendent pas compte, elle, elle se rend compte. Vraiment une femme remarquable.

Dr. Nut (soulagé : elle est donc vivante. Les yeux toujours sur son livre) – Sans doute.

L’architecte (qui a lu dans les pensées de Nutello) – N’ayez crainte pour elle. C’est Justement ce que je voulais vous dire : tant que je suis là, vous n’avez rien à craindre pour elle. Je vous l’ai déjà dit, je m’occupe de tout. C’est ce dont elle m’est, je crois, désormais reconnaissante.

Dr. Nut (qui ne peut s’empêcher de cracher tout le mépris dont il est capable) – Tant mieux pour vous.

L’architecte – Voilà que vous redevenez désagréable.

Clic.

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Par Christophe Leray Rubrique(s) : Psychanalyse de l’architecte – Saison 3

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