Sur une surface totale : 6 000 m² SP (4 427 m² SHAB), l’opération Adoma Péan/Masséna, une résidence sociale de 230 studios livrée en juin 2018 par l’agence Philippon – Kalt Architectes, s’inscrit dans le plan de traitement engagé par Adoma et la Ville de Paris pour transformer les foyers de travailleurs migrants. Pour un coût de 12,6 M€ HT, une vision sensible de l’accueil. Communiqué.
L’ensemble immobilier de deux tours de neuf étages réunies par un escalier commun datait des années 70. Il comportait à l’origine 360 lits répartis en 120 chambres individuelles et 80 chambres de 3 personnes. L’opération Masséna/Péan, initiée en 2013, comprendra en 2021 380 studios répartis dans deux bâtiments.
Les travaux seront réalisés en 4 phases : la démolition de la tour de 120 lits, la construction de la Résidence Péan de 230 studios, la démolition de la tour de 240 lits, la construction de la Résidence Masséna de 150 studios.
La mission confiée à Brigitte Philippon et Jacques Kalt (Philippon – Kalt Architectes) comporte l’établissement du plan d’ensemble et une mission d’AMO pour accompagner Adoma dans le choix de l’architecte de la deuxième résidence. La première résidence est confiée à l’agence Philippon – Kalt, la seconde à l’agence Saison – Menu.
Dialogue avec l’environnement
Le projet urbain proposé sur l’ensemble de l’îlot reprend les caractéristiques des îlots HBM : îlot ouvert sur un jardin intérieur, bâtiments implantés à l’alignement, gabarits en R+6, traitement en pans coupés à l’angle des rues.
Le nouveau projet souligne le contour de l’îlot par le front bâti de deux bâtiments indépendants : Péan qui vient d’être livré et Masséna dont les travaux vont débuter.
Le premier, Péan, présente une écriture contemporaine qui fait écho aux HBM environnants, construits entre 1926 et 1939. Cette seconde génération d’HBM se caractérise par des façades briques au soubassement en ciment gris et aux baies soulignées par un encadrement blanc.
Le projet réinterprète ce vocabulaire par une façade en tôle perforée dans la tonalité des briques environnantes. Dans les étages, le pare-pluie noir crée une impression de densité et matérialité qui fait ressortir la lecture de lignes horizontales.
En rez-de-chaussée, le fond noir fait place à une tôle en aluminium poli. Ce matériau pérenne, justifié pour le soubassement plus exposé aux détériorations, offre une perception changeante de la façade en fonction de l’ensoleillement et des points de vue.
En toiture, la silhouette aux lignes brisées de l’acrotère, réalisée en tôle perforée, s’estompe dans le ciel parisien.
Le traitement des percements fait écho aux bow windows des HBM. Les débords de fenêtres animent la façade par le jeu des ombres portées. Les menuiseries, traitées en aluminium anodisé naturel, créent un encadrement clair autour des baies sombres.
Le regroupement des percements et le rythme irrégulier des baies facilite l’intégration de ce programme social dense dans le quartier en rendant indécelable le nombre de logements. Les bandeaux vitrées sont constitués de baies et shadow box, ces dernières ne sont révélées que la nuit par l’éclairage intérieur des studios.
Qualité du cadre de vie
Les espaces collectifs en RDC sont largement vitrés. Ils participent ainsi à l’animation de l’espace public. Le bois est décliné dans tous les espaces : pour qualifier les portes d’entrée des logements et réchauffer les ambiances intérieures en habillant les tableaux des baies vitrées. En rez-de-chaussée, le plafond des parties communes est recouvert de lames de bois qui masquent l’éclairage artificiel. En cœur d’ilot, le jardin intérieur suit la topographie du terrain offant un tapis végétal.
Des circulations communes
Pour améliorer la qualité des espaces collectifs et limiter le recours à l’éclairage artificiel, chaque section de couloir intérieur ainsi que la cage d’escalier en métal sont éclairées naturellement, ouvrant des vues sur ce quartier arboré. Les lignes brisées des couloirs les animent et les dilatent.
Les couleurs claires sont plébiscitées : béton brut et murs peints en blanc, rehaussés par une signalétique de lignes dorées qui relie tous les studios. Un choix collégial a permis de retenir deux couleurs pour les sols des couloirs, facilitant le repérage des étages pairs et impairs : un vert acide lumineux et un rouge profond.
Logements dilates par les vues
Les logements en rez-de-chaussée, tirant profit de la déclivité du terrain, sont surélevés de 1,20 m minimum par rapport à l’espace public extérieur. 30 studios bénéficient d’une double orientation avec deux ou trois baies ; aucun studio n’est mono-orienté nord.
Les baies en saillie, implantées sur allèges, s’étirent sur la largeur des pièces de vie pour dilater les espaces intérieurs, garantir le meilleur ensoleillement et préserver l’intimité des résidents. Elles possèdent un voilage et un store intérieur occultant à enrouleur. Une large tablette en bois de la largeur des fenêtre dilate l’espace appropriable par les résidents.
Un espace optimisé
Les baies, implantées en débord par rapport au nu de la façade, offrent une large tablette appropriable par les résidents ; un espace en plus non comptabilisé dans les calculs shab.
A la demande des futurs résidents, une porte a été ajoutée entre la kitchenette et la pièce de vie du studio. Coulissante comme celle de la salle d’eau, elle peut s’escamoter complètement, sans empiéter sur l’espace intérieur. Un vitrage fixe est inséré dans la cloison séparant pièce de vie et kitchenette afin que la lumière naturelle puisse pénétrer dans tout le studio, une fois la porte de séparation fermée.
Le miroir posé sur la porte d’entrée reflète la lumière et le paysage, et agrandit visuellement l’espace intérieur. Le chauffage réalisé en plancher chauffant libère totalement les murs des studios afin d’optimiser l’espace de vie.
Flexibilité ultérieure du bâtiment
Le système constructif retenu sans refend porteur permet l’évolution ultérieure des typologies, du studio aux T2 ou T3.
Des charges réduites
L’isolation extérieure renforcée favorise l’inertie du bâtiment, classé en Plan Climat. Des capteurs solaires en terrasse fournissent de l’eau chaude sanitaire, première source de dépense énergétique dans un bâtiment bien isolé. L’éclairage naturel des pièces en premier ou second jour, pour limiter le recours à l’éclairage artificiel, est un leitmotiv du projet.
La préfabrication au service de la qualité des finitions
Le choix de systèmes normalisés et préfabriqués a été dicté par un double objectif, une qualité irréprochable des finitions et un gain de temps à la livraison. Elle est déclinée sur différents composants de la construction : l’ossature porteuse de prémurs et prédalles, les parements de façade en tôle emboutie et les 230 salles d’eau préfabriquées.
Le dessin de ces dernières a été réduit à deux modèles : le modèle de base et celui pour les résidents handicapés, soit 5% des unités. Réalisées au début du chantier suivant une mise en œuvre traditionnelle des différents composants, elles ont été livrées emballées à l’avancement des planchers.
Technicité et savoir faire des entreprises
La façade est composée de plaques d’aluminium perforées. Les trous oblongs créent une vibration visuelle et donnent à percevoir des lignes horizontales qui font écho à celles de la brique. Les plaques sont laquées selon un procédé manuel d’application de trois couches successives de poudre pour créer la matière et la diversité de tons.
Au droit des bow-windows, la tôle est perforée puis emboutie sans déformer la trame régulière des percements. En rez-de-chaussée, des plaques d’aluminium poli brillantées viennent fermer les perforations et éclaircir la façade. Les effets changeants de la matière polie allègent le socle du bâtiment.
La cinquième façade
Un soin particulier a été apporté à la toiture technique du bâtiment, traitée comme la cinquième façade de la résidence. Des tubes solaires recouvrent 12 % de la toiture. Ils permettent de générer 30,4 % des besoins des résidents en eau chaude sanitaire. Implantés à 90 cm du sol, ils masquent les bouches et les gaines de ventilation.
Afin de s’inscrire en continuité de la façade, la tôle perforée file devant les gardes corps de sécurité. Ajourée, elle laisse transparaître les végétaux qui couvrent toutes les parties libres de la toiture terrasse.