En mars 2019, l’agence Taillandier Architectes Associés (TAA) a livré la réhabilitation d’une maison de ville dans le centre de Toulouse (Haute-Garonne). Il y avait quatre logements, demeure un habitat individuel de 257,9 m², intime et discret, proche du Canal du Midi. Communiqué.
La Villa T se trouve à Toulouse dans le quartier Montplaisir, entre le Canal du Midi et le jardin des Plantes, une zone de protection des monuments historiques puisque située entre le chemin de fer et le Canal se trouve le bassin du Radoub créé au XIXe pour entretenir les péniches.
La maison existante, R+1 plus combles, divisée en quatre logements, était extrêmement vétuste. Elle répond cependant à la plupart des critères d’une typologie spécifique à la région : corniche, brique en façade, toiture à deux pentes parallèles à la rue, encadrement de la porte et des fenêtres, rosaces au-dessus des ouvertures. Tout en conservant uniquement la façade historique de la «Toulousaine», le projet consistait en la réalisation d’une maison familiale neuve.
La maison est divisée en deux zones. La «partie nuit» occupe les deux étages supérieurs tandis que la «partie jour» fait le lien entre le niveau de la rue et celui du jardin. «On peut parler de deux duplex superposés, le duplex vie, et le duplex nuit», souligne Pierre-Louis Taillandier.
Le «duplex vie», en lien avec le rez-de-jardin, est composé d’une cuisine ouverte sur la double hauteur. Derrière une porte intégrée aux meubles de cuisine sont implantés les espaces servants : chaufferie, vestiaire, cellier, buanderie et cave. A l’étage du «duplex vie», salon et salle à manger, articulés par la cheminée, forment un seul espace ouvert en balcon sur le jardin et la double hauteur de la cuisine.
Le «duplex nuit», se compose au niveau inférieur de deux suites enfants articulées par le couloir bibliothèque et leurs toilettes. Au dernier niveau, jouant avec la pente du toit, la suite parentale, la chambre d’amis et le bureau complètent le programme.
Côté rue, le parti architectural a été de constituer une façade pouvant s’inscrire au mieux dans la séquence urbaine de la rue. Les hauteurs des corniches et des toitures viennent se caler sur celles des maisons mitoyennes. De ce fait la corniche historique est tronçonnée pour être surélevée au niveau de la corniche existante de la maison mitoyenne de droite, laquelle a un caractère patrimonial fort, ce qui n’est pas de cas de celle de gauche.
Cette façade est constituée de briques, la même que l’existante, couleur «paille». «Sa modénature caractéristique de la typologie de la ‘toulousaine’ est riche. Elle méritait donc d’être remise en valeur et débarrassée des éléments parasitaires apparus avec le temps, tels que des installations électriques apparentes», souligne Pierre-Louis Taillandier.
L’interstice entre la façade du rez-de-chaussée et la corniche, toutes deux conservées, est traité avec sobriété et neutralité. Les proportions verticales des ouvertures font écho aux existantes. Elles sont calées selon les trames déjà présentes. En référence au bâtiment voisin (28bis), un soin tout particulier est donné à la serrurerie : lisses, brise-soleil mobiles, grilles de soupirail.
Côté jardin, l’environnement est différent, plus intime car sans vis-à-vis. Le traitement de la façade est contemporain. Les rez-de-jardin et rez-de-chaussée, largement ouverts grâce à un mur rideau en double hauteur, laissent entrer la lumière naturelle dans le «duplex vie» et la diffusent grâce au plafond béton lasuré du plancher haut.
La façade jardin est en béton préfabriqué et reprend le rythme des ouvertures de la façade sur rue. Ainsi, l’ensemble est construit en murs bétons bilames à l’intérieur des mitoyens de la maison, à l’exception des planchers et de l’escalier qui sont coulés en place.
«De cette façon, la Villa T n’a pas besoin d’être climatisée, on joue sur l’inertie thermique. Grâce aux fenêtres de toits implantées au droit de la cage d’escalier, on fait du free cooling en périodes chaudes. Les fenêtres étant toutes occultées par des stores à lamelles orientables, on peut rafraîchir naturellement l’ensemble la maison», poursuit Pierre-Louis Taillandier.
Le calepinage des éléments bétons et des planches de coffrages dialogue avec les éléments en bois intérieurs, qu’il s’agisse de la cuisine intégrée, de la bibliothèque/garde-corps de l’escalier, du meuble de la cheminée et du mobilier des dressings. Les joints des uns et des autres filent bien que leur matérialité soit différente.
Le contraste entre le béton lasuré et le chêne clair met en relief la dualité de la maison, bâti historique/construction contemporaine, espace intime/ espace muséal, espaces vie et réception/ espaces nuit et intimité. La règle a été de ne rien implanter sur les murs bétons, ni interrupteurs, ni luminaires, ni tableau.
La conception de la Villa T fait appel à quelques grands classiques de l’imaginaire architectural, la bibliothèque qui s’enroule autour de l’escalier fait référence à la tour du savoir de l’antique Babylone, sa trémie étant évidée de 15 cm sur la hauteur des quatre niveaux. Par les quatre fenêtres de toit, elle permet de relier le ciel à la terre du rez-de-jardin et à tous les espaces de la maison, du premier au dernier niveau, pour n’en faire qu’une. La trémie favorise aussi la circulation de l’air du rez-de-jardin au dernier niveau.
Une rampe relie le rez-de-rue au rez-de-jardin. Elle a pour fonction de pouvoir facilement entrer et sortir vélos et bacs poubelles de la cave. En référence à la rampe du Guggenheim de New-York, le garde-corps de l’escalier devient cimaise pour les peintures de Raymond Espinasse. Les espaces de circulations qui s’enroulent autour de la trémie droite de l’escalier deviennent ainsi à la fois bibliothèque et espace muséal.
Le jardin est un vide engazonné, composé du couloir de nage de la piscine, implanté tel un bassin dans la continuité de la rampe qui prolonge la perspective depuis la porte d’entrée. Ce dispositif renforce la simplicité et l’abstraction du plan mais aussi, par son dépouillement, l’intimité du lieu. Le mur de fond est à nouveau un espace servant, à la fois local piscine pour moitié et poulailler pour l’autre. Une clôture en Xtend, permet d’isoler les poules du jardin. La jardinière, plantée de bambous, est surélevée, pour permettre de cacher la vue sur le talus de la voie ferrée.
La maison étant d’une largeur sur rue de six mètre, la Villa T cherche à optimiser les volumes et joue avec ceux-ci. Les hauteurs des étages ne sont volontairement pas constantes : plus hautes sur le niveau salon/séjour, plus basses sur le coin préparation cuisine, en double hauteur sur l’espace repas, intime dans les chambres des enfants, sous rampant dans la suite parentale.
«Le mobilier de la Villa T, conçu sur mesure tel celui d’un bateau, optimise les rangements pour ne pas encombrer les perspectives proposées par la conception», conclut Pierre-Louis Taillandier.