
À Paris (XIe), avenue Parmentier, pour Quadral Promotion et Batigère Habitat maîtrise d’ouvrage, Atelier Téqui Architectes a livré en 2025 la transformation et surélévation d’un ancien garage en 63 logements et un commerce. Surfaces : 4 707 m² (sdp) dont 2 886 m² réhabilités et 1 821 m² créés en surélévation. Coût : 10,5 m €
Le quartier Parmentier – Saint-Ambroise
Le garage Peugeot est situé au 58-60 avenue Parmentier dans le XIe arrondissement de Paris. Densément construit, dynamique et familial, le quartier Saint-Ambroise offre à ses habitants de nombreux lieux culturels, de services et de loisirs. Les vastes travaux de végétalisation des rues de Paris viennent amoindrir l’emprise bâtie du secteur et permettent d’adoucir les déplacements des résidents, en lien avec la proximité immédiate du square Maurice Gardette et du jardin Truillot. Le garage occupe l’ensemble de la parcelle selon un gabarit décroissant allant de R+6 sur l’avenue à R+3 en fond de parcelle, et R+1 dans l’excroissance en cœur d’îlot.
L’ancien garage Peugeot
Construit en 1957 par l’architecte Claude Béraud, premier Grand Prix de Rome, le garage était initialement composé d’un rez-de-chaussée et d’un étage. Il a été surélevé à deux reprises, gagnant deux étages en 1960, puis deux autres en 1964. Un cinquième étage sera réalisé par la suite pour lui donner sa volumétrie actuelle. Organisé par demi-niveaux reliés par des rampes à chaque extrémité, le bâtiment offre de grands plateaux libres. En effet, la structure est constituée de six poteaux intérieurs et d’un réseau de poutres principales et secondaires, portant des dalles béton relativement fines. Ce mode constructif offre donc une grande capacité d’adaptation à des usages variés.


Une façade totem
Sur l’avenue Parmentier, le garage comporte de larges ouvertures en bandeaux sur toute la longueur du bâtiment, identiques du R+1 au R+6. Sur les parois latérales et en fond de parcelle, toutes situées en limites séparatives, les façades sont aveugles, laissant apparaître de vastes pignons en béton.
Côté rue, la façade est constituée de poutres – allèges à chaque niveau permettant de s’affranchir de porteurs verticaux et donc de libérer de larges baies. Ces éléments constructifs sont suspendus aux dalles béton et génèrent un effet de légèreté, accentué par les poutres à inertie variable en encorbellement. Cette écriture architecturale est particulièrement associée aux garages urbains des années ‘60. Ainsi, la façade agit comme un totem maintenant la mémoire du lieu, marque de la présence automobile dans l’histoire de Paris et de l’évolution des politiques urbaines.

Un projet de transformation profonde
Le projet prévoit la réhabilitation lourde et la restructuration de l’ancien garage ainsi qu’une surélévation de trois niveaux pour la création de 63 logements et d’un commerce. Le volume existant est conservé, surélevé et percé de cours et jardins, permettant la création de vues et l’aménagement de logements lumineux et traversants. Les dalles existantes du garage, et donc les niveaux de référence du bâtiment, sont conservées. Le projet prévoit ainsi le maintien de la structure du garage, dans sa quasi-totalité.
L’opération permet au bâtiment de se reconnecter à l’ensemble de l’îlot environnant, transformant un garage désaffecté et une masse bâtie opaque repliée sur elle-même, en un immeuble d’habitation avec un porche d’accès débouchant sur un jardin, des cours plantées et de généreuses terrasses en fond de parcelle.
Ainsi, par son architecture et sa volumétrie, le garage transformé s’intègre dans le quartier et offre aux riverains un visage aimable.
Une démolition partielle
La majorité de la structure existante du garage est conservée dans le projet de réhabilitation. Afin de créer des vues dans la masse bâtie du garage qui occupe l’intégralité de la parcelle, les rampes reliant les demi-niveaux sont démolies sur toute la hauteur du bâtiment, créant ainsi des cours au cœur de l’îlot. Ce parti pris s’appuie sur des justifications structurelles – les rampes ne participant pas à la tenue du bâtiment – et de changement d’usage. Deux autres cours sont créées dans le volume initial par la démolition partielle du plancher existant. Les réseaux de poutres sont conservés, afin de maintenir notamment les voiles périphériques.
Le garage est construit par demi-niveaux accessibles par deux rampes situées à chaque extrémité des plateaux. Cette particularité structurelle est conservée et permet de dissocier deux cages dans le projet de logements. Cependant, un seul axe central assure la circulation verticale entre ces deux bâtiments. Ainsi, en s’appuyant toujours sur la structure existante, les extrémités des plateaux en porte-à-faux sont démolies pour créer des planchers neufs et y insérer escaliers et ascenseurs.

Le renforcement structurel
Afin de ne pas solliciter les fondations existantes du garage, les charges de la surélévation s’appuient sur une nouvelle structure qui s’intègre à l’existant. Ses fondations consistent en un réseau de micropieux et longrines réalisés sous les niveaux bas des bâtiments. La partie réhabilitée du garage est ensuite traversée sur toute sa hauteur par des nouveaux poteaux en béton qui portent directement la structure de la surélévation. Ces poteaux neufs sont judicieusement implantés afin de ne pas perturber les plans de logements. Ce principe structurel permet aux charges de la surélévation de traverser le bâtiment existant sans lui transmettre d’efforts supplémentaires.
La surélévation
Le système constructif de la surélévation est basé sur une structure poteaux poutres en métal, avec des murs et des acrotères en ossature bois. Le plancher est constitué de panneaux en bois massif lamellé croisé, recouvert d’un isolant et d’une chape en béton abritant le système de chauffage par le sol. Ce complexe participe au niveau phonique à une obtention des standards d’affaiblissement acoustique. La surélévation de trois niveaux est revêtue d’un bardage bois à lames verticales, selon un ordonnancement régulier donné par les positions tramées des baies. Cette vêture apporte une vibration et une matérialité qui contraste avec le caractère lisse et uniforme du béton des façades initiales conservées.


Les logements
Le projet propose la création de 63 logements répartis dans trois cages, allant du T2 au T5 et incluant deux T3 en duplex. Concernant les cages A et B, la structure de l’immeuble existant, sous forme de demi-niveaux, permet de distinguer deux paliers disposant chacun d’un ascenseur propre pour 3 à 5 logements par niveau. L’escalier est commun aux deux bâtiments, desservant les demi-niveaux à chaque palier intermédiaire. La cage C est quant à elle indépendante et fonctionne en autonomie dans l’excroissance en fond de parcelle. Grâce à la particularité de la structure et du gabarit existant, les logements ont quasiment tous un lien avec l’extérieur atypique : jardin d’hiver, loggia ou encore de généreuses terrasses sur l’arrière. De plus, la majorité des appartements sont traversants et les cours créées offrent des jardins privés pour les logements du rez-de-chaussée.
La conservation des poutres apparentes de la structure existante dans la partie réhabilitée, permet de valoriser l’histoire du bâtiment en créant des logements singuliers, emplis de la mémoire du lieu.