On prend les mêmes et on recommence. Paris veut sa collection de Pritzkers et tous les projets parisiens sont dévolus aux starchitectes, asséchant totalement l’espoir de la nouvelle génération française de dynamiser la scène architecturale de la capitale. En effet, encore faudrait-il qu’elle puisse concourir. La compétition pour une tour à Masséna en témoigne encore.
Une tour de 180m à Masséna ; cinq équipes. Le choix convenu, pour ne pas dire frileux, de Bertrand ne laisse pas d’étonner.
Voyons.
Masséna/Bruneseau fut le lieu, entre autres (Bercy, La Chapelle), d’études livrées en 2008 et réalisées sous l’égide de Bertrand Delanoë, maire de Paris, par dix équipes d’architectes, dont deux étrangères. Thème de l’objet : la hauteur à Paris (comprendre ‘les tours’). Le débat était audacieux, il fut animé.
En 2010, la mairie de Paris a, en dû calendrier, laissé entendre qu’un concours d’architecture sera lancé pour la conception d’une tour de 180m à Masséna. Puisque désormais chaque concours de cette dimension s’adresse à une équipe architecte/promoteur – ou inversement -, des architectes et des promoteurs, comprenant que dans ‘concours d’architecture’, il y a architecture, ont pris langue.
Dans un premier temps, les investisseurs putatifs sont, en effet, logiquement allés puiser dans le vivier élaboré par la ville en 2008, sinon à quoi sert d’entretenir un réseau et d’anticiper sur l’avenir ?
Puis, promoteurs et architectes ont eu vent d’informations contradictoires. En 2011, le résultat des courses : du côté des agences étrangères, Diller Scofidio et Neutelings, c’est pas mal, Arquitectonica, moins. Pour les agences françaises : Jean Nouvel et Christian de Portzamparc. Bravo le concours ouvert aux… Pritzkers.
Cocasse, non ?
A quoi servit donc l’argent du Parisien contribuable qui a financé pendant six mois, chichement certes, ces études remarquées pour la hauteur à Paris quand, au final, ce sont Nouvel et de Portzamparc qui sont retenus ? A tout prendre, il aurait été plus élégant et moins onéreux d’offrir alors aux cinq nominés d’aujourd’hui d’envisager cette tour dès le premier appel d’offres, en 2008. Chacun y aurait gagné du temps et la communication de la ville aurait été plus claire.
C’est vrai quoi ! Et demain, pour un gymnase dans le 16e, on invite Sir Foster et on construit une piste d’hélicoptère ? Et puis qui ? Renzo Piano pour la salle des fêtes ? Et SANAA qui a du mal à sortir ses logements à Paris.
Et dans cent ans, si la France ne compte toujours que deux Pritzkers, on fait comment ?
Christophe Leray
Cet article est paru en première publication sur Le Courrier de l’Architecte le 07 septembre 2011