Etape 4 – Dax > Nogaro (182 km) : collines russes ?

Des Landes au Gers, des paysages engageants. Pour les suiveurs du Tour de France contemporain de Chroniques, les pépites d’architecture contemporaine demandent quelques détours.

Après un début de course sans doute langoureux, les équipes de sprinteurs vont ensuite accélérer et tenter de contrôler cette étape. Rien n’est joué cependant sur les montagnes russes du Gers où des échappés peuvent tenter de se faire oublier. Sauf que la ligne d’arrivée est précédée d’une ligne droite de 800 m, autant dire que les bolides du peloton devraient se montrer sans pitié pour les aventuriers du jour.

Pendant que les coureurs en sont encore au petit-déjeuner, les suiveurs du Tour de France contemporain de Chroniques sont déjà à pied d’œuvre. En effet, une fois dans les Landes, surtout comparé à la fiesta des jours précédents, question architecture contemporaine, c’est un peu le désert et il leur faudra faire quelques détours avant de rejoindre l’arrivée à Nogaro, dans le Gers.

Pour autant, une fois à Dax, puisque la veille Patrick Arotcharen expliquait pourquoi construire sur pilotis, aller découvrir « la crèche aux Girafes dans les arbres des bords de l’Adour », ouvrage signé des architectes Bernard Saillol (Périgueux) et Alexandre Saillol (Bordeaux) ayant ouvert ses portes en janvier 2012.

La crèche, gérée par le Centre Communal d’Action Sociale de la ville, est destinée aux enfants de dix semaines à quatre ans, et peut accueillir 60 enfants simultanément en accueil régulier à temps plein, partiel ou très partiel. Impossible d’en savoir beaucoup plus, il faut voir l’ouvrage pour le croire.

Crèche aux girafes A. & B. Saillol — @Marie-Hélène Cingal

Quant à Bernard Saillol, c’est un architecte autodidacte, agréé par le ministère de la Culture en 1979, ayant construit plusieurs maisons en Aquitaine. Les suiveurs pourront d’ailleurs sur la route aller visiter la maison d’Aire-Sur-Adour à l’architecture organique. Après la légèreté de la crèche, s’imprégner ici de la puissance des éléments dans un ouvrage en galets et tout en courbes.

Maison Galet B. Saillol — @Architecture de collection

Puisqu’il est question de maison d’architecte, c’est un détour mais les suiveurs peuvent pousser jusqu’à Hossegor, royaume de la « villa basquo-landaise », où il leur faudra chercher une petite maison implantée sur une dune plantée de pins et de chênes-lièges entre le lac marin et la mer.

De par son échelle, une maison d’architecte est-elle forcément un objet de style ? « Il s’agit en fait de la transformation d’une maison existante dont on a conservé seulement le soubassement encastré dans la pente du terrain », explique l’architecte Jean-Philippe Pargade. La nouvelle construction réalisée en bois et métal s’appuie donc sur une dalle de répartition en couronnement du soubassement existant.

« J’étais obsédé par l’idée d’avoir très peu de matériaux. Le carré collait bien par rapport au terrain et la maison est dessinée avec une géométrie pure de tous les éléments composant le carré », poursuit l’architecte. Une structure en bois était trop épaisse, le métal trop lourd, il a fallu concevoir une structure mixte bois/métal la plus légère possible pour ne pas avoir de reprise en sous-œuvre. Des poteaux de 7 cm de diamètre, aucun contreventement visible…, l’architecte rend grâce aux entreprises du Pays basque qui se sont « passionnées » pour ce chantier.

Ce plan carré compact organise le séjour, la cuisine ouverte et deux chambres autour d’un patio… carré, véritable refuge de l’intimité des habitants. Les deux niveaux communiquent par un escalier central. La toiture végétalisée est accessible par un autre escalier à partir du patio.

Arrivés dans le Gers, les suiveurs comme le peloton découvriront des reliefs relativement doux et réguliers. Ici, il est dit que le paysage est une « mer de collines » reliant Pyrénées et Garonne, Méditerranée et Atlantique. D’ailleurs, ces petites routes en montagnes russes laissent le temps d’admirer le paysage.

Sur la route de Nogaro, quasiment sur le parcours, s’ils sont attentifs, les suiveurs apercevront donc près d’Éauze le Réservoir du Duret, dessiné par Bardin et Julla architectes (Jean-Marie Bardin, Marc Julla). Ou comment édifier un château d’eau qui ne jure pas dans le paysage !

Réservoir de Duret, Eauze — @Bardin et Julla architectes

Pendant qu’ils sont à Éauze, les suiveurs en profiteront pour découvrir La Domus de Cieutat et Centre d’Interprétation, une interprétation justement livrée en 2013 et signée de l’agence grenobloise INCA Architectes. Singulière cité antique, Élusa est un lieu central pour le patrimoine archéologique du Gers : 2000 m² de vestiges d’une grande domus gallo-romaine.

Afin de révéler les lieux, désormais invisibles, INCA a conçu une structure de protection ouverte à l’échelle de la demeure. Au travers d’un jeu de toitures, elle recompose les pièces de la maison : atrium, patios, jardins… « La construction semble flotter délicatement au-dessus des vestiges, œuvrant pour la fluidité des vues, la transparence des espaces intérieurs et l’organisation naturelle du parcours de visite », soulignent les architectes. À côté du site, une ancienne gare est réhabilitée pour créer le centre d’interprétation.

Après l’arrivée à Nogaro, au sprint probablement pour les coureurs, une fois leurs comptes rendus terminés, les suiveurs reprendront la route jusqu’à Auch où ils passent la nuit.

Arrivés là, afin de profiter des longues soirées d’été, ils pourront faire un tour au Pôle national des arts du cirque. En 2001, le service culturel de la ville d’Auch et le festival du cirque ont fusionné en un seul service. En 2011 CIRCA a obtenu le label “Pôle national des arts du cirque”. En 2012, ouvre le CIRC (Centre d’innovation et de Recherche Circacien) destiné à l’accueil d’artistes en résidence de création ou de recherche sous chapiteau ou en salle et la diffusion des spectacles vivants.

Le projet global, qui compte CIRCa, réalisé par Atelier Doazan+Hirschberger & associés, et Ciné 32, signé Encore heureux architectes, est nommé à l’Equerre d’argent la même année.

Après cette longue journée, les suiveurs pourront enfin refaire le plein avec un bœuf gascon ou canard mulard ou une salade fraîcheur puis, pour finir, avec une croustade aux pommes arrosée d’Armagnac (sans excès).

Christophe Leray (dans la caravane)