A Lille, Canal Architecture (Patick Rubin, Annie le Bot) et l’architecte Guillaume Nicolas ont transformé l’ancienne halle de l’usine Blan-Lafont en trois plateaux de bureaux et showroom pour chercheurs. Cette restructuration (d’un budget de 3, 57M€ht) a notamment permis de tripler la surface de plancher (2 740m²) et d’affirmer une transition apaisée entre patrimoine et contemporanéité. Communiqué.
Le bâtiment Place a été construit et réaménagé entre 1896 et 1923. Autrefois, ce volume de 1000 m², d’une hauteur de 8m sans plancher, offrait un double usage : salle des fêtes et cinéma à l’Ouest, grand magasin de stockage à l’Est. Un pont roulant reliait autrefois l’usine Le Blan-Lafont et la construction.
La transformation réalisée en 2018 respecte le volume d’origine et couronne l’ancienne toiture d’une surélévation dont l’écriture graphique traduit une expression aérienne. La surface de plancher est triplée pour accueillir désormais les chercheurs de l’Inria (Institut national de recherche en informatique et en automatique) qui opéreront sur les plateaux de bureaux et bénéficieront d’une plateforme événementielle de 270 m² en showroom sur la place de Bretagne.
Densifier
Plutôt qu’une démolition-reconstruction, la transformation du bâtiment Place conforte l’enveloppe de sa structure originelle en accueillant de nouveaux usages pour offrir les avantages suivants :
– Triplement de la surface : les règles du PLU (emprise au sol maximale) n’auraient pas permis d’atteindre une telle densité avec un projet neuf sur une parcelle ceinturée d’espace public ;
– Continuité historique : le maintien de la volumétrie et de la matérialité de la façade en briques prolonge le récit de la construction ;
– Économie et environnement : les démolitions mesurées ont permis de maîtriser la mise en décharge des matériaux et d’optimiser l’économie financière de l’opération ;
– Configuration spatiale intérieure adaptée aux nouveaux usages.
Intervenir sur les façades
Afin d’apporter de la lumière sur les plateaux, les ouvrages maçonnés, à l’aplomb des baies existantes en demi-lune, ont été déposés par procédé de sciage. Des vitrines géantes, posées en saillie sur la maçonnerie d’origine, réunissent dans un même ensemble le rez-de-chaussé et le premier étage du bâtiment.
L’ancienne toiture a été démolie pour conquérir un nouvel étage, entièrement vitré sur sa périphérie, couronné par une série de brise-soleil verticaux en aluminium. Seule interruption, l’édicule originel marquant le lien historique à l’usine Le Blan-Lafont.
Libérer les plateaux
L’unique mur de refend intérieur a été démoli. Un noyau distributif, réalisé en blocs de béton apparents, est implanté longitudinalement au centre du bâtiment. Relié aux façades briques par un réseau de poutres métalliques, cet ouvrage porte les nouveaux planchers. Cette étroite barrette loge les distributions verticales (escalier et ascenseur) ainsi que tous les services (réseaux, sanitaires, locaux techniques).
Le dispositif favorise toute liberté d’implantation sur les plateaux périphériques et garantit, pour le futur, toutes les réversibilités.
La transformation du bâtiment Place répond à plusieurs enjeux contradictoires. Il préserve l’ouvrage comme mémoire du site tout en le transformant pour un usage contemporain, il fonder la juste échelle d’intervention confirmant la position du gabarit en perspective de l’avenue de Bretagne et décide d’un statut de signal urbain et d’une transition de proximité entre les maisons ouvrières et la monumentalité de l’ancienne usine Le Blan-Lafont.
La réponse unitaire à l’ensemble de ces questions engageait une expression extérieure contemporaine. Ne pas s’obliger, sur le sujet des façades, à s’insérer benoîtement dans les figures cintrées des arcs, ce qui aurait caricaturé le bâtiment et altéré son échelle. Depuis l’extérieur, de grandes vitrines en relief sont appliquées confirmant la modénature de la façade en briques et la verticalité des lames supérieures couronnant la surélévation.
Ces éléments sériels confirment l’ancienne image industrielle du site. Les lames se prolongent plus haut que l’égout de toiture pour élancer le bâtiment vers le ciel et s’ajuster à la présence des donjons du château voisin.
Le contraste patrimonial entre le passé et le présent est lisible. La présence des maçonneries réinterprétées contraste avec l’univers intérieur constitué par les nouveaux plateaux et le noyau construit en blocs de béton assemblés à joints secs. Au cœur de cette barrette centrale, le grand escalier à double volée contrariée, métallique et lumineux, se développe dans une ambiance de rouge argileux.