Ambiance : « Atmosphère matérielle et morale qui environne une personne ou une réunion de personne », explique le Petit Robert. L’importance de l’ambiance où nous vivons est déterminante à bien des égards : notre qualité de vie, nos conditions de travail, nos relations avec nos voisins ou nos collègues, et bien d’autres choses encore, sont conditionnées par l’ambiance.
Les ambiances au pluriel pourrait-on dire. Celle que nous créons chez nous, celle que nous trouvons dans la ville ou le quartier, celle de nos lieux de travail et de tous les espaces que nous fréquentons. Et puis une ambiance générale, décrite tant bien que mal par des sondages et des études d’opinion qui évoquent des ambiances au beau fixe ou, au contraire, moroses.
Toutes ces ambiances se combinent, se renforcent mutuellement, se neutralisent ou s’équilibrent et produisent notre environnement tant physique que psychologique. Une qualité totale d’ambiance générale est un rêve difficilement réalisable, alors cherchons des lieux ou des tranches de vie où nous pourrions trouver en toutes circonstances une ambiance sympathique, accueillante, qui nous permette à tout le moins de se ressourcer quelque temps.
Les espaces publics sont à la disposition de chacun. Quelles que soient sa fortune et sa situation personnelle, ils peuvent nous offrir ce refuge face aux aléas de la vie. Faut-il encore qu’ils aient été conçus pour cela. La qualité d’une ville est celle des ambiances quelle offre à ses habitants et à ses visiteurs.
C’est un cocktail savant. Non seulement les ingrédients sont multiples et de natures très diverses mais leur appréciation dépend de chacun d’entre nous et des situations où nous nous trouvons. Pas de recette incontournable dans ces conditions mais des pratiques qui permettent de réaliser le dosage de ces ingrédients et de les adapter en continu aux modes de vie.
Comment répartir dans la ville ces lieux où chacun pourra trouver l’ambiance dont il rêve ? Une directive européenne* propose de créer des « zones calmes », sans en définir le détail, lequel dépend bien évidemment du contexte local. Des zones définies à partir de leur environnement sonore mais qui dans la pratique incorporent bien d’autres paramètres. Le bruit d’un manège par exemple peut contribuer au calme recherché, de même que les jeux des enfants ou le ressac de la mer voisine. C’est un sentiment général de bien-être, de tranquillité, de sécurité, qui est recherché, plus que de silence.
Le concept d’oasis a également été invoqué pour désigner des quartiers ou des morceaux de quartier favorables à notre ressourcement. « L’oasis urbaine peut être vécue comme un espace qui reconnecte le citadin au rythme des saisons, de la journée, des présences de la faune et de la flore ».** Dans un monde qui tourne vite, en perpétuelle accélération, la possibilité de s’arrêter un instant, à défaut de revenir à la lenteur, offre un instant de bonheur, libère l’esprit, redonne envie de s’intégrer dans le milieu environnant, humain et naturel. Des parenthèses dans la vie et dans la ville, pour reprendre son souffle et s’ouvrir au monde, où nous trouvons une forme de protection contre toutes les agressions physiques ou mentales dont nous sommes l’objet.
Interrogé sur ce qu’est un écoquartier, l’ancien maire d’Angers Jean-Claude Antonini disait : « c’est un quartier où les gens sont heureux ». L’idéal serait que les villes entières produisent ce bonheur mais, à défaut, la présence de ces oasis répond à ce besoin, même partiellement.
Ces lieux dont l’ambiance revigore et réconcilie avec la ville existent souvent spontanément, fruits d’une évolution naturelle étalée sur des dizaines d’années, voire des siècles. Hélas, souvent, l’extension rapide des villes et la nécessité de construire vite ont fait oublier le besoin de qualité.
L’urgence n’est pas toujours bonne conseillère. Il faut donc créer ces espaces dans le tissu urbain existant. Offrir une ambiance calme, un microclimat agréable en toute saison, une présence affirmée du végétal et par suite des animaux qui l’accompagnent, notamment les oiseaux qui nous raviront de leurs chants. Une ambiance conviviale aussi, favorable aux rencontres, aux échanges, aux événements imprévus qui donnent du piment à la vie quotidienne. Des oasis qui ne peuvent être conçus et animés sans un dialogue permanent entre les habitants et les représentants des villes, pour intégrer le ressenti aux données physiques comme le niveau sonore et la qualité de l’air.
L’ambiance a cette particularité de combiner des aspects matériels et moraux, les uns n’allant pas sans les autres. Ce caractère composite provoque une difficulté pour tous ceux qui se trouvent enfermés dans des secteurs étanches mais c’est toute la richesse du concept. Nous voici dans la complexité, avec les interférences que nous pouvons imaginer entre ces deux sphères.
Pour apprivoiser cette complexité, il n’y a pas de règle absolue mais des sortes de recettes qui donnent des repères que chacun saura adapter aux circonstances. Une pratique ouverte, à enrichir par l’expérience. Le développement durable est un pari sur le génie humain, mariage d’intelligence et de sensibilité.
Dominique Bidou
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* Directive 2002/49/CE sur le bruit dans l’environnement
** TRIBU, CASA et CAUE 74, Oasis urbaines. Projet co-financé par l’ADEME dans le cadre de l’APR MODEVAL URBA 2015.