
Première grande étape de montage avec au programme trois cols de 1ère catégorie toujours plus hauts au fur et à mesure que le peloton se rapproche de l’arrivée. Les cadors ne vont évidemment pas encore dévoiler leur jeu, juste montrer un peu leurs muscles.
Mais, quand les sprinteurs calculeront les délais pour finir au chaud dans le grupetto, l’étape s’offrira peut-être au casse-cou qui volera au-dessus de la descente du Col de la Colombière. Si les conditions sont dantesques, une étape pour les opportunistes.
En tout cas, pour les suiveurs amateurs d’architecture contemporaine, départ aux aurores pour faire un crochet avant le lancement de l’étape prévu à 11h10 à Oyonnax. C’est en effet juste le temps qu’il faut pour se rendre à Ambérieu-en-Bugey, encore dans l’Ain, et découvrir l’extension et la réhabilitation du gymnase fraîchement livré par les impeccables agences lyonnaises DLD architectes (Doucerain, Lièvre et Delziani), mandataire, avec Link Architectes (Romain Chazalon, Jérôme Glairoux, Gerald Lafond).
« La spécificité du gymnase existant réside dans l’inclinaison de ses façades en bardage métallique qui jouent d’une ambiguïté entre toit et façade. Ce type de façades que nous retrouvons également sur le lycée relèvent d’une même expression architecturale. Le projet d’extension réinterprète ce principe constructif car il permet l’intégration simple du projet en continuité du gymnase existant. Le futur gymnase (existant + extension) sera perçu comme un seul bâtiment recouvert d’une même enveloppe », expliquent les architectes.


Le projet intègre avec malice le système structurel et formel du gymnase existant. Tel une robe à panier, il prolonge la structure existante, l’armature et unifie l’ensemble d’une vêture commune, le tissu. L’approche de Link permet de resituer le bâtiment dans son époque et son histoire et d’inscrire Ambérieu-en-Bugey dans un rapport savant et amical à l’architecture contemporaine.
Une fois arrivés en Haute-Savoie, les suiveurs peuvent dépasser la caravane et sortir à Menthonex-en-Bornes. Prendre la direction d’Evires et, arrivé là, pour ceux qui ne le connaissent pas encore, découvrir le groupe scolaire réalisé par Vincent Rocques Architectes, nominé au prix de la première œuvre en 2008.
Le projet introduit un dialogue avec le centre-bourg et assume une position contemporaine dont la parenté Voralbergeoise est évidente. Il est un des projets qui incarnent le tournant pris par l’architecture française dans les Alpes dans l’ombre portée de sa consœur autrichienne. Le bois, en structure et vêture, s’y déploie largement et, époque oblige, sans traitement. Les vitrages participent d’une logique de vide pour plein et abandonnent parfois la question même de menuiserie pour devenir uniquement un vide maîtrisé en façade.


« Un bâtiment qui intègre la technologie pour mieux la faire disparaître sous un habit empreint de l’esprit de simplicité de ces granges agricoles qui donnent son caractère singulier au plateau des Bornes », précise le CAUE 74 dans son travail d’inventaire du patrimoine contemporain haut-savoyard.
Il est temps alors pour les suiveurs de retrouver le convoi pour pénétrer avec lui dans les Aravis au pied du col de Romme. Puis remonter le cortège et prendre de l’avance sur les coureurs jusqu’au lieu-dit Le Reposoir, au pied du col de la Colombière. Grimper le col sans traîner puis plonger vers l’arrivée au Grand-Bornand et, l’espace d’un instant, revivre la descente victorieuse de Julian Alaphilippe en 2018, la souffrance en moins et la lucidité en plus.
Arrivés au Grand-Bornand, une fois la voiture du sponsor garée dans le parc du village, les suiveurs peuvent rejoindre à pied La Maison de la Vie à la Montagne et l’espace culturel « La Source ». Cette réhabilitation – extension livrée en 2021 par la jeune agence Silo Architectes réussit l’exploit de proposer une architecture contemporaine qui s’affranchit du diktat de la mythologie du chalet suisse devenu la référence locale.


L’extension appartient au sol et le soulève en partie arrière pour venir abriter un large espace vitré en partie avant. La dualité du neuf et de l’existant démontre que l’intelligence dépasse souvent l’expérience et qu’il convient de rester optimiste sur la capacité des villages alpins à embrasser une modernité située en construisant un paysage bâti contemporain qualitatif et progressiste.
Il sera temps alors pour les suiveurs de rejoindre leur hôtel et de déguster une bière locale si fraîche qu’elle semble sortir tout droit d’un névé voisin. Des nems de Reblochon parsemés de feuilles de menthe feront un encas salutaire et aérien en cette fin de journée alpine.
Guillaume Girod (dans la caravane)
Pour les suiveurs, retrouver :
– Toutes les étapes du Tour de France contemporain 2021.
– Le Tour de France contemporain 2020 : Le départ ; La suite ; La suite de la suite ; L’arrivée.
– Le Tour de France contemporain 2019 : 1ère semaine ; 2ème semaine ; 3ème semaine.
– Le Tour de France contemporain 2018