
Pour cette deuxième journée de reconnaissance* au cœur des Alpes, un petit arrêt par la capitale verte 2022 et l’un de ses bâtiments emblématiques : Grenoble (Isère) et le projet IntenCity, nouveau siège social de Schneider Electric réalisé par Groupe 6.
La treizième étape, le vendredi 15 juillet permettra au peloton de se décrasser après l’arrivée la veille au sommet des 21 lacets de l’Alpe d’Huez qui viennent conclure plusieurs journées dantesques dans les Alpes. Cette étape de transition permettra aux prétendants au maillot vert ayant réussi à passer la montagne de prendre des points précieux ou à une échappée de prendre le large sous l’autorité des leaders.
Cette étape est l’occasion de profiter des balcons de Belledonne ou de la Chartreuse pour découvrir des cols plus amicaux que ceux des dernières étapes. En arrivant à Grenoble depuis Bourg d’Oisans un petit crochet par La Tronche permet de contourner le centre-ville par le col de Vence. La montée au-dessus de Grenoble offre une vue spectaculaire sur la métropole.
L’un des derniers virages est célèbre pour avoir, dans le sens de la descente, été le lieu d’une chute mémorable de Bernard Hinault dans le Critérium du Dauphiné 1977. Une fois le col passé le suiveur redescend sur le nord de Grenoble et peut voir en surplomb, le long de l’Isère, l’imposant bâtiment IntenCity de Schneider Electric réalisé par Groupe 6 et livré en 2020.

Cette première vision depuis la descente permet de prendre de prendre conscience du site et de ce bâtiment de 26 000 m² qui s’étire du sud au nord sur une parcelle longiligne. Le projet, situé dans la ZAC Presqu’île, agit comme une porte d’entrée symbolique de l’agglomération puisque son gabarit et son implantation le rendent lisible depuis tous les axes nord de desserte.
Au sein de la métropole, la presqu’île scientifique opère comme un écosystème composé d’universitaires, de chercheurs et de salariés. Le bâtiment, ambitieux sur le plan environnemental, offre une facture architecturale à la résonance toute helvétique qui tranche avec les productions Grenobloises récentes. L’ouvrage est composé avec rigueur, tramé et sous-tramé, sans gesticulation… c’est bien simple, on se croirait sur la route de Lausanne où les bâtiments tertiaires impeccables s’enchaînent à l’infini.
Groupe 6, mastodonte de l’architecture française (régulièrement dans Top 10 du classement au chiffre d’affaires réalisé par D’Architecture), a livré dans sa ville d’origine un projet sobre qui rend hommage au travail du designer Frédéric Beuvry, vice-président du Design dans le groupe. La parenté helvétique est évidente puisque le projet propose une palette de matériaux réduite au minimum, verre et aluminium anodisé, qui contraste avec le catalogue de matériaux à ciel ouvert qu’offre la ZAC. Groupe 6 rompt avec cette logique ‘Batimat à la montagne’ avec un projet de grande tempérance.
L’arrivée sur le bâtiment par la piste cyclable qui le borde le long de l’Isère permet au suiveur de le découvrir par sa partie sur le parc en îlot ouvert. Ici, l’imposante façade se déploie avec subtilité et laisse à voir en filigrane un grand escalier, matérialisation d’une grande rue intérieure qui traverse l’édifice longitudinalement. Lequel demeure grenoblois d’un point de vue de la hiérarchie de ses façades puisque les deux plus grandes s’adressent soit à la rue historique, classique (trottoir, piéton, voirie, transport en commun), soit aux nouveaux modes de déplacement (piste cyclable, berge, parc).


La façade située avenue des Martyrs, considérée comme principale dans le plan de la ZAC, étire le projet et sa trame au travers d’un jeu de composition subtil fait de niveaux, de retraits opportuns et d’écrêtements. Elle fabrique avec justesse le dessein du lieu, un siège statutaire dédié à l’innovation, une vitrine élégante et la perception de la maîtrise d’un savoir-faire.
Schneider Electric propose des solutions permettant de mieux et de moins consommer d’électricité, le bâtiment IntenCity est donc à la fois un showroom habité et un prototype à très grande échelle. La frugalité a guidé la conception et dépasse ici le simple ressort des matériaux pour se déployer jusqu’au réglage fin des technologies embarquées. « Nous savions dès le début qu’il faudrait deux ans pour le maîtriser et pour faire monter en puissance tout le système de gestion énergétique », explique Xavier d’Esquerre, directeur des sites de Schneider Electric à Grenoble.
On ne compte plus les bâtiments chauffés à 22°C mais conçus à 19°C qui valent aux maîtrises d’œuvre des reproches infinis sur l’écart entre les projections de consommations et le réel. Schneider Electric adopte ici une position volontariste en tant que maître d’ouvrage en donnant du temps au temps pour prendre en main son bâtiment afin d’en révéler l’efficacité. Une démarche à propos des modalités d’acquis d’expérience d’un ouvrage qui pourrait inspirer plus d’un maître d’ouvrage.
Groupe 6 réussit le tour de force de proposer de nouvelles modalités d’usage du tertiaire au sein d’une opération élégante qui apportent une sérénité dans une urbanité assez bruyante et bien excitée par des architectures hétéroclites et démonstratives.


Le projet propose également une vision claire du high-tech : sa disparition et sa miniaturisation. La technologie aborde une nouvelle étape de son affirmation, son efficacité passe par son invisibilité. Son absence physique mais son efficacité ressentie deviennent les meilleurs témoins de cette quête de résultats à l’horizon d’un monde décarboné. Manifeste à très grande échelle et à très haut niveau d’incorporation technologique, l’ouvrage témoigne que l’architecture demeure le lieu de la synthèse et qu’elle est remarquable lorsqu’elle sait produire des spatialités dignes et ambitieuses.
Ces réflexions ne font pas oublier qu’il faudra pour les suiveurs reprendre des forces avant de rejoindre Saint-Etienne en juillet. Direction donc Les Badaboués, à quelques encablures en périphérie de la ZAC, où Sergio accueille à bras ouverts. Ce restaurant connu et fréquenté par de nombreuses entreprises du bâtiment permet de prolonger la discussion au contact de ceux qui fabriquent les ouvrages contemporains.

Un gratin dauphinois maison et sa pièce du boucher du jour accompagnés d’une Mondeuse de 2012 devraient permettre de reprendre la route et de méditer sereinement à propos des bureaux du futur.
Guillaume Girod (en reconnaissance d’étape)
Pour les suiveurs, retrouver :
– Les reconnaissances d’étape du Tour de France contemporain 2022
– Toutes les étapes du Tour de France contemporain 2021.
– Le Tour de France contemporain 2020 : Le départ ; La suite ; La suite de la suite ; L’arrivée.
– Le Tour de France contemporain 2019 : 1ère semaine ; 2ème semaine ; 3ème semaine.
– Le Tour de France contemporain 2018
* Comme les coureurs et leurs équipes du Tour de France 2022, qui s’élancera de Copenhague au Danemark le 1er juillet pour une arrivée à Paris le 24 juillet, reconnaissent leurs étapes, les suiveurs du Tour de France contemporain de Chroniques, pour leur cinquième participation, procèdent aussi désormais à des étapes de reconnaissance.