
Chacun peut aujourd’hui grâce à l’intelligence artificielle (IA) donner vie à de vieilles cartes postales et animer cette scène avec l’illusion du mouvement, comme une très courte vidéo parfaitement adaptée au temps de cerveau disponible des tiktokeurs. Plutôt que de se laisser happer par une image intrigante en noir et blanc, le confort bourgeois en images couleurs façon Disney en somme.
Cela vaut aussi pour les photos de familles et il suffit de retrouver puis passer à la moulinette de l’IA la photo de mariage de l’arrière-grand-mère pour avoir soudain l’impression de la voir vivante, comme dans un rêve… Un mirage surfacturé plus certainement. Cela vaut encore pour la photo en grand uniforme de l’arrière-grand-oncle qui peut à nouveau se tortiller trois secondes devant la caméra avant de se faire exploser sur le front dans les 48 heures. Bonjour les séquences émotion !
Ou encore se la faire façon barricades, La Liberté guidant le peuple en quelques sourires bienveillants. Ou façon Picasso… Ou Gauguin… Etc.
Toujours est-il que chacune de ces scènes de vie réanimées propres à impressionner le bon peuple nostalgique et consommateur ne peut exister que parce qu’un artiste, photographe ou peintre, en a eu l’intuition et le talent pour l’exprimer.
Malgré ce qu’en disent ces humains qui tombent d’amour pour leur machine bavarde, ce qui équivaut à s’amouracher de sa voiture ou de son grille-pain, l’intelligence artificielle n’a pas plus d’intuition que d’affect : la planète serait sinon déjà sauvée, une quelconque intelligence intelligente nous aurait prévenus…
Quand il devient difficile de faire la part du faux et du sincère, face à un outil malvoyant, sinon malveillant, il convient sans erreur de se tourner vers les photographes en général, ceux d’architecture en particulier. Les premiers parce qu’ils sont autant de témoins directs de l’instant réel, les seconds parce qu’ils pérennisent jusque dans l’histoire en marche l’objet de leur désir, la durée de vie de leur propos se comptant en décennies. « Photographier c’est mettre sur la même ligne de mire la tête, l’œil et le cœur », soutient Henri Cartier-Bresson.
Aussi ténu soit le lien, l’architecture est pour ces photographes le prétexte d’un art subtil pour, en peu de mots, parler de mondes – le leur, le nôtre – qui se côtoient, inextricablement liés entre eux et pourtant chacun un peu hors-champ des autres.
À l’occasion de cette 7ème Edition Spéciale Photographes de Chroniques, les cartes blanches de ces hommes et femmes de l’art évoquent visions, passions et rêveries intimes, chaque photo une fiction originale et une histoire inédite.
Merci encore à tous les photographes d’architecture sans lesquels nous serions aveugles.
Christophe Leray
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