A Bonifacio, le programme commandait 20 box pour les 20 pêcheurs de la commune (zone de rangement et espace de travail). Livré en 2016, l’Ortu Duzzi conçu par la jeune agence fondée en 2014 en Corse et à Paris par Isabelle Buzzo et Jean-Philippe Spinelli raconte une autre histoire avec ce bâtiment hybride support de jardins endémiques, de matières et de rencontres. Communiqué.
La volonté des architectes a été d’élargir le programme technique des box pour pêcheurs par un dispositif d’espaces publics permettant de valoriser et d’observer le métier de pêcheur (espaces publics en continuité des box au RDC, esplanade paysagée au R+1 et création d’un étal de vente pour la pêche du jour). Suite aux échanges entre les architectes et le maître d’ouvrage, le programme a été enrichi par des bureaux pour la SNSM et la prud’homie ainsi qu’une salle polyvalente communale.
Enserrés au fond d’un goulet, bordés par des falaises calcaires de grands blocs de pierre ont fait le choix de se jeter dans le port. Arrachés à la falaise, ils rappellent que Bonifacio appartient à la mer. L’Ortu Duzzi, qui signifie en bonifacien «Les jardins où l’eau douce coulait», est le site choisi pour offrir un véritable lieu de vie à ceux qui continuent de raconter un pan de l’histoire de cette ville : les pêcheurs.
De par la présence d’une source et d’une configuration favorable, à l’origine occupé par des jardins, ce site propice à la végétation offre un lieu paisible pour venir perpétuer des gestes ancestraux. L’édifice, qui s’étend tout au long de la parcelle, épouse les courbes de la falaise et fait sien l’ensemble de l’espace imparti dans l’intention de générer un projet tant urbain qu’architectural.
La prud’homie s’ouvre à la vie de la citée en ménageant entre ses blocs des espaces extérieurs, en continuité avec l’espace public. Ainsi, la réparation des filets et la vente à la criée réinvestissent les quais et animent les rives.
Adossé à la falaise le bâtiment de 320 m² libère devant lui un parvis conçu comme un espace de mise en abyme de ces pratiques autrefois sauvages. Dans un corps à corps, le bâtiment offre la falaise au toucher.
Empreint par la minéralité environnante, la construction se veut rugueuse. Coffré à la planchette, le béton arbore fièrement, comme les tatouages des marins, les cicatrices induites par ce procédé.
Ces empreintes laissées dans le béton entrent en vibration avec les lignes des persiennes coulissantes et perpétuent les strates calcaires.
Constitués de lames horizontales, les brise-soleil animent les façades, leurs conférant un effet cinétique. Le vocabulaire naval, introduit par les éléments de bois, donne à l’étage des allures de pont. L’acrotère de béton blanc se détache du fond de par sa blancheur et son aspect lisse pour donner de la profondeur au projet. L’ombre projetée profite aux pêcheurs et au banc de vente.
En porte-à-faux, elle matérialise l’avancée de la ville sur la mer.
En partie supérieure, la végétation a repris ses droits. L’étage est conçu comme un véritable belvédère planté d’essences issues du plateau bonifacien. Comme suspendue, l’esplanade offre à la prud’homie un lieu de convivialité et de partage, se destinant à devenir le proue de ce navire urbain.
Coût : 1 079 723,90 € HT