Le Prix Versailles a dévoilé en juin 2025 le nom des seize réalisations constituant la Liste 2025 des Plus beaux hôtels du monde lesquels, nouvellement ouverts ou rouverts, se démarquent chacun par un alliage des plus réussis entre patrimoine et innovation. Découverte (2nde partie).*
« Ces hôtels d’exception ont pour trait commun d’avoir sublimé les savoir-faire et le patrimoine local. Plus que cela, on relève chez tous une recherche en matière de design extrêmement poussée, reflet d’une émulation certaine et transversale entre d’une part les créateurs, et d’autre part les territoires. Rendre lisibles les influences multiples, apporter douceur, clarté et sens : lorsque la démarche artiste se met au service de l’hospitalité, elle forme à n’en pas douter les signatures des plus belles destinations au monde », souligne Jérôme Gouadain, secrétaire général du Prix Versailles.
Palazzo Talìa, Rome, Italie

Le latin de Rome a donné au monde entier le mot palazzo (palatium), l’épitome du luxe et de la culture. Construit au début du XVIe siècle, le Palazzo Talìa était la résidence d’Angelo Colocci, humaniste et secrétaire du pape Léon X. Le bâtiment, acquis par le cardinal Michelangelo Tonti, « il Nazareno », devint ensuite le « Collegio Nazareno ».
Situé au 25 Largo del Nazareno, l’hôtel a ouvert en mai 2024, la restauration minutieuse réalisée par le Studio Luca Guadagnino lui ayant redonné tout son éclat et insufflé, sans ostentation, un esprit parfaitement contemporain.
Pour les visiteurs des vingt-six chambres et suites, impossible de décrire de façon exhaustive la richesse artistique déployée sur les 5 000 m² d’espace : des façades ornées de bagues Médicis au Bar Musa et ses plafonds grotesques du XVIIe siècle, des gueules de lion aux têtes de buffle, des fresques aux luminaires, en passant par les sculptures, la liste des oeuvres et des artistes donnerait le vertige aux exégètes. Jusqu’à la piscine, ouvrage épique en soi, qui parachève la stature romaine du Palazzo Talìa.

Romeo Roma, Rome, Italie

Comment, dans un palazzo daté de 1590, faire dialoguer le passé et le présent ? Zaha Hadid Architects est parvenue à écrire un chapitre particulièrement abouti, publié en décembre 2024, où le vocabulaire de l’agence anglaise manipule et réécrit la construction existante dans un geste fluide qui se permet toutes les audaces contemporaines, quasi organiques, sans jamais attenter à l’identité profonde du bâtiment séculaire.
Le mobilier sur mesure, réalisé par des artisans de renommée internationale, magnifie les intérieurs parfaitement restitués. De fait, l’esprit d’avant-garde de Zaha Hadid se retrouve dans la voluptuosité des courbes et l’esthétique futuriste.
Élément distinctif, la vue au travers de la piscine transparente, qui permet aux clients d’observer les découvertes archéologiques réalisées lors des travaux de rénovation, résume à elle seule cette diagonale historique. Sur une petite terrasse, se trouve un olivier centenaire.

MGallery Sosei Sapporo, Sapporo, Japon

À l’image de sa façade industrielle et de son intérieur d’exception où se côtoient de nombreuses oeuvres d’art, le MGallery Sosei Sapporo brille de mille contrastes, mêlant salons de style occidental et espaces de vie japonais. Rien n’est plus authentique, historique, que cet aménagement qui fait se percuter les époques comme ce fut le cas sur l’île de Hokkaidō durant l’ère Meiji (entre 1868 et 1912) quand le pays s’est ouvert à l’Occident et a jeté les bases de sa modernité industrielle.
En effet, berceau de la bière Sapporo, la brasserie Kaitakushi – fondée en 1876 sur les rives de la rivière Sōsei qui lui donne son nom – était déjà un symbole, aujourd’hui séculaire, de la modernisation de la région. Elle est devenue aujourd’hui un boutique-hôtel alliant patrimoine, design et luxe discret.
Son minimalisme chaleureux et l’élégance dans l’agencement des matières, comme brassées par Taiji Fujimoto du Studio Crowe, assurent une expérience raffinée.

Todos Santos Boutique Hotel, Todos Santos, Mexique

Le Todos Santos Boutique Hotel est un véritable joyau de la Basse-Californie du Sud, alliant design soigné et caractère authentique. La fusion harmonieuse des intérieurs et extérieurs est réalisée grâce aux arcades en briques et aux couloirs ouverts, typiques de l’architecture régionale.
La façade préservée de l’hôtel rend, quant à elle, hommage au patrimoine de la ville. Ici, comme partout dans le pays, la fresque est le medium culturel de célébration de l’histoire par excellence. Cette ancienne école du village de Todos Santos (« Tous les saints ») en témoigne dès le hall d’entrée, où une fresque originale, restée intacte, est encore marquée par des impacts de balles préservés, écho des tumultes de l’histoire.
Les dix chambres, serties dans une nature exubérante, comptent encore chacune une fresque murale unique, peinte à la main, qui raconte l’héritage des missions catholiques ayant autrefois façonné la culture de la péninsule. Comme au bar La Copa, où se contemple l’histoire des missions, des sucreries, de la flore et de la faune indigènes de la région. Ensemble, ces espaces revus par Alejandra Sarmiento Legorreta créent un sanctuaire de culture et d’élégance.

Shebara, Île de Sheybarah, Arabie saoudite

Une réalité tout droit sortie du futur : voilà la surprise que l’agence Killa Design a réservée aux plus grands amateurs d’innovation et d’insertion dans la nature, en donnant vie à Shebara. L’éco-complexe – avec parc solaire et usine de dessalement et de traitement de l’eau – illustre la rencontre entre design visionnaire et luxe.
Située à 25 km des côtes de l’Arabie saoudite, l’île abrite des mangroves denses, une flore désertique, des dunes de sable ondulantes, des sites de nidification de tortues et des récifs coralliens.
Inspirées par la formation naturelle des perles dans la mer, les villas, fabriquées en acier inoxydable poli, reflètent et réfractent le ciel et la mer, semblant se fondre dans l’horizon. Ces globes, suspendus au-dessus de l’eau, donnent l’impression de flotter en apesanteur.

Raffles Sentosa Singapore, Singapour, Singapour

Connue pour chercher à construire la campagne dans la ville, Singapour dispose désormais, à 15 minutes du centre-ville, d’un sanctuaire de villas inédit pour l’île, tranquille et luxuriant, conçu par Yabu Pushelberg. Pour la mise en abîme, avec la mer de Chine comme horizon, s’évader à nouveau de l’urbanité futuriste pour, au terme d’une arrivée spectaculaire au sommet d’une falaise sur l’île de Sentosa, (re)découvrir l’accueil stylé du Raffles Sentosa Singapore. Un écrin verdoyant pour la marque qui a justement été fondée en 1887… à Singapour.
S’étendant sur 100 000 mètres carrés de jardins, les 62 villas offrent un havre de paix. Des chemins mystérieux mènent aux espaces de restauration et aux recoins cachés jusqu’en bord de mer. Deux ficus centenaires et les lustres en cristal inspirés de l’orchidée Papilionanthe Miss Joaquim, la fleur nationale, font le lien entre l’histoire et le futur, quand ville et campagne ne font plus qu’un.

The Manner, New York, États-Unis

Si le quartier de SoHo n’est plus celui des lofts et des artistes, The Manner, qui a ouvert ses portes en septembre 2024, semble redonner vie à cette époque révolue. Derrière l’entrée discrète d’un bâtiment qui ressemble à une résidence de standing, l’hôtel découvre un bric-à-brac artsy extraordinairement réjouissant dans sa profusion et sa générosité.
Dans un vibrant hommage à l’Italie, l’architecte milanais Hannes Peer confère à chaque pièce un rendu éblouissant. Les tons ocre, bleus profonds et sable qui contrastent avec les boiseries sombres, et les finitions laquées rouge et bleu marine affirment l’unité et la personnalité de l’ensemble.
Le mobilier artisanal et les oeuvres d’art, dont celles de Nicholas Shurey, Giovanni de Francesco et Alex Proba, donnent à chaque espace sa qualité : ici une atmosphère résidentielle, là l’impression d’être dans un club pour gentle(wo)men. Les fresques d’Elvira Solana achèvent de raconter un voyage new-yorkais mêlant nostalgie et modernité.

Namia River Retreat, Hội An, Viêt Nam

Le séjour régénérateur est l’un des nouveaux paradigmes du luxe. Face aux désordres du monde, en témoigne Namia River Retreat, une retraite en effet, lovée dans le labyrinthe de la rivière Thu Bồn au sein d’un village de pêcheurs.
Ici, la phytothérapie traditionnelle vietnamienne – à base de plantes – et des rituels de bien-être quotidiens honorent les rythmes du corps et de la terre, et évoquent l’esprit des cures thermales prisées au XIXe siècle : la grâce et le coeur. L’âme architecturale et le génie du lieu, pensés par T3 Architects, sont inscrits dans ces villas à ossature en bois sur pilotis qui préservent faune et flore indigènes.
Chaque détail, de la décoration artisanale aux jardins d’herbes aromatiques, raconte une histoire de résilience, de beauté et de sagesse locale. Un art de vivre avec des ateliers culinaires et artisanaux, des promenades en bateau panier et des moments de calme sous les étoiles.
Une histoire du Viêt Nam, réimaginée pour les voyageurs attentifs.

* Lire Prix Versailles 2025 : les plus beaux hôtels du monde (1ère partie)
– (re)découvrir Prix Versailles 2024 des plus beaux hôtels et restaurants du monde : les lauréats français
– La rubrique « Hôtel » de Chroniques d’architecture