Didier Bonnefoy et Julien Grenot sont deux jeunes architectes installés à Paris. à Boulogne-Billancourt (92), confrontés à une petite maison existante de 50 m² seulement, ils sont parvenus, dans le cadre d’un budget somme toute modeste en regard des coûts de construction en proche banlieue parisienne, à concevoir une belle maison contemporaine de 185 m².
Présentation de Didier Bonnefoy et Julien Grenot (DJBG, Paris)
« La maison d’origine est constituée d’un rez-de-chaussée de 50 m². Le potentiel d’agrandissement au sol était réduit car il n’y avait qu’une courette en cœur d’îlot de 15 m² et une portion de terrain de 1,5m de large sur un côté. Comme quoi, la masse de travail n’est pas proportionnelle au nombre de m² car notre cliente souhaitait retrouver un usage spatial lui rappelant son ancienne maison, beaucoup plus grande. Si les espaces de bureaux sont faciles à interpréter, nous avons parfois le sentiment qu’il faut avoir fait cinq ans de psychologie pour concevoir une maison individuelle (rires). En effet, le maître d’ouvrage y apporte tout son passé, va y vivre 24 heures sur 24 sur une très longue durée. Tel détail ou telle innovation lui conviendront-ils encore dans quelques années ?
Nous avons pris le parti de rehausser la maison sur deux niveaux, en préservant la façade existante, qui datait de 1910 et constitue une mémoire de cet ancien quartier ouvrier boulonnais. Cela nous paraissait important car c’est aujourd’hui la dernière façade d’origine du quartier. Pour la conserver, nous avons conçu un système de construction classique, en béton, avec des poutres allèges pour soutenir le premier et le second étage ainsi que la mezzanine. Du coup, l’ancienne façade ne supporte rien et nous avons pu monter en hauteur sans l’endommager.
Nous avions un problème pour la préparation du permis de construire car nous étions entre deux POS (plan d’occupation des sols) et il nous fallait donc travailler de telle sorte que le projet soit en accord avec l’un et l’autre. Le projet est finalement passé à la mairie mais nous étions venu avec la maquette complète pour convaincre (rires).
Les trois niveaux s’articulent autour d’un escalier central, vaste volume vertical reliant l’extension à l’existant par la lumière provenant du ciel grâce à des fenêtres de toit. Cet escalier à voûte sarrasine est ainsi aussi bien un élément central de décoration qu’un élément structurant apportant un équilibre à l’ensemble. Nous avons triché un peu car le véritable escalier à voûte sarrasine n’a pas de noyau central et tient avec la première et la dernière marche en vrillant sur lui-même. Mais, en mettant un poteau central, cela nous a permis de créer ce bel escalier avec des marches de série et ainsi d’en réduire le coût.
Nous avons aussi sciemment créé de grands vides, tel celui du séjour qui donne sur le jardin. Cela permet d’offrir le sentiment de vastes espaces dans une maison somme toute pas très grande si l’on considère qu’elle est sur trois niveaux. Ainsi, nous trouvons au rez-de-chaussée un séjour, une cuisine, une salle de bains et un petit atelier. Au premier se trouvent trois chambres et deux salles de bains, dont la chambre de la maîtresse de maison, d’environ 20 m² ; chambre extravertie par un bow window, une fenêtre théâtralement ouverte sur la ville.
Au troisième, nous avons gardé un grand espace libre, d’environ 50 m² qui peut ainsi être aménagé au gré des besoins. Nous avons également beaucoup travaillé sur la salle de bains du maître d’ouvrage qui reçoit une profusion de lumière grâce à un ‘skydome’ tout en offrant une vue sur le jardin au travers du vide du séjour. La multiplicité des sources lumineuses en toiture et en façade sur rue permet d’avoir différentes d’ambiances lumineuses.
De couleur terre de sienne à l’extérieur, le bow window (la baie de la fenêtre) de la chambre principale en forme de cube permet aussi de rompre la monotonie de la façade tout en la faisant passer au second plan. De cette façon, cette façade enduite acquiert un caractère chaleureux et particulier qui lui confère un aspect contemporain. A l’intérieur, les pièces sont en parquet massif flottant. Surtout, nous avons cerclé les pièces d’une belle pierre calcaire, sur environ 20cm, servant d’écrin à ce parquet. Cela permet de dégager les murs et, surtout, d’offrir visuellement une impression d’espace.
Au final, notre cliente possède aujourd’hui une maison de 185m², neuve et pourtant chargée d’histoire. L’ensemble a coûté 221.000 euros HT ».
Propos recueillis par Christophe Leray
Cet article est paru en première publication sur CyberArchi le 30 mai 2007