Cette étape de Saint-Etienne (Loire) jusqu’à Mende (Lozère) n’a rien d’une étape de transition, encore moins d’une promenade de santé. Sans monter très haut, les efforts seront incessants sur presque 200 km. L’étape idéale pour baroudeurs à grosses cuisses. L’étape (195 km) partira donc au quart de tour car ils seront nombreux à vouloir être dans l’échappée avec l’espoir pour l’un d’eux de la mener au bout. Se méfier cependant de l’appétit des cannibales, comme dirait Eddy Merck.
Saint-Etienne ville de départ et d’arrivée, les suiveurs sont donc arrivés la veille et peuvent démarrer leur étape du Tour contemporain de Chroniques avant même l’échauffement des coureurs. Allez un MateFaim pour se caler l’estomac jusqu’au soir et c’est parti !
Pour leur propre séquence nostalgie et se remémorer leurs folles années étudiantes, les suiveurs peuvent démarrer par la visite d’un petit projet livré en janvier 2020 de huit colocations étudiantes serties dans un ancien bâtiment industriel, œuvre de l’agence stéphanoise A-MAS architectes (Stéphanie David et Eric David).
« Les formes construites fabriquent une part de notre mémoire collective, par l’expérience physique, la trace qu’elles laissent dans nos souvenirs ou la persistance visuelle de leurs singularités formelles, typologiques. Mais parfois, elles apparaissent comme « obsolètes » par l’abandon de leurs usages initiaux ou l’évolution de ces derniers », soulignent les architectes.
Se pose alors la question de la conservation, transformation ou disparition, au regard de la capacité des formes à accepter un renouvellement des fonctions et des usages.
« On peut être tantôt respectueux, tantôt irrévérencieux, mais nous considérons que l’architecture est redevable à la mémoire des lieux, des gens et des formes et à ce titre doit permettre la filiation entre héritage et époque contemporaine. Nous considérons la trace, l’empreinte, la mémoire comme éléments fondateurs d’un renouvellement possible », explique A-MAS.
Difficile de le décrire en quelques mots et quelques images n’y suffiront pas. Les suiveurs se feront donc leur propre opinion éclairée.
Puisque nous sommes à Saint-Etienne et que le sujet est la restructuration de bâtiments industriels, les suiveurs poursuivront la promenade avec une visite à La Comédie, livrée en 2016 par Studio Milou dans une ancienne usine de constructions mécaniques. Sur 8 000 m², cet héritage industriel est devenu un des équipements les plus performants de France au service de la création et de la transmission.
Pour la Ville de Saint-Etienne et EPASE, respectivement maître d’ouvrage et client, le projet de la Nouvelle Comédie visait à installer dans une friche industrielle de la seconde partie du XXe siècle toutes les composantes d’une grande institution théâtrale, dédiée à la production, la présentation et à la formation théâtrale.
Le projet dessiné par Jean-François Milou glisse les composantes du programme dans l’unité spectaculaire des volumes de l’ancienne usine, révélée et amplifiée par une monochromie rouge qui signe partout la reconversion du site.
Dans la continuité du travail du studio sur la réutilisation du patrimoine industriel, le projet utilise le vide des grands espaces libérés sous les structures métalliques de l’usine, comme de grandes « artères » qui permettent au public de déambuler vers de grands jardins ouverts sur les paysages alentour.
Les différentes nuances de rouge, le croisement des parcours des visiteurs au travers du site, la signalétique, ainsi que le paysage environnant sont autant d’éléments qui participent à cette image d’une vie nouvelle qui prend racine et s’insinue au sein du site.
La grande nef constitue un vaste espace de circulation pour le public, un passage couvert au sein du site, qui distribue tous les espaces publics. De larges structures en forme de boîtes sont placées à intervalles réguliers et marquent cette rue intérieure spacieuse, en soulignant l’ampleur du bâtiment tout en donnant accès aux divers espaces dédiés au public : les vestiaires, le bar, la librairie.
Après un café au bar de La Comédie, il sera déjà temps pour les suiveurs d’aller faire un tour dans un gymnase lumineux – non pour faire de l’exercice, ils n’ont pas le temps – mais parce qu’ils aiment le sport et ce doit bien être le premier gymnase qu’ils visitent depuis le début de ce Tout de France contemporain.
Un petit projet, certes – 2 470m², 3,9M€, pour l’EPA Saint-Etienne, maître d’ouvrage – livré par LINK Architectes associés (Romain Chazalon, Jérôme Glairoux, Gérald Lafond) en 2016 mais « un bâtiment qui prend bien la lumière », selon Milène Servelle, auteure du reportage photographique. Si c’est une photographe qui le dit… Voyons.
Le programme commandait une grande salle de sport, une salle d’escalade (vouée à la compétition), une salle d’entraînement, des tribunes pouvant accueillir 500 personnes, un foyer, une salle de réception et vestiaires. Un gymnase donc.
Pourtant, le projet rayonner au-delà de ses limites propres, l’échelle urbaine devenue le moyen de ponctuer le volume principal et de l’ancrer dans le site et dans la ville.
C’est par l’intermédiaire de fenêtres urbaines que le bâtiment s’oriente, se repère et s’articule dans la ville. « Ces fenêtres, volontairement hors d’échelle, s’expriment par des étirements ponctuels du volume principal. Axées sur des évènements contextuels et paysagers existants (jardin, grand Sequoia, crassier), ces ouvertures deviennent prétextes à ouvrir les vues et favoriser la lumière naturelle », explique l’agence.
Ces fenêtres forment ainsi les creux et les reliefs du projet. Les déformations qu’elles engendrent répondent à plusieurs fonctions du programme : le porte-à-faux sud abrite l’entrée, l’étirement Est prolonge le foyer en terrasse, la grande fenêtre nord éclaire la salle de blocs en cadrant le grand Sequoia existant.
Bref plus qu’un gymnase.
Parce que le matefaim du matin est déjà loin, les suiveurs peuvent se restaurer sur le pouce d’une salade de Barabans et sa râpée – une entrée typique et presque légère – bien arrosée d’eau minérale. Il est temps alors pour les suiveurs de foncer jusqu’à Mende pour ne rien manquer de la poursuite entre le peloton et les échappées dans les 50 derniers kilomètres.
Christophe Leray (dans la caravane)
Pour les suiveurs, retrouver :
– Toutes les étapes du Tour de France contemporain 2022
– Toutes les Reconnaissances d’étape du Tour de France contemporain 2022
– Toutes les étapes du Tour de France contemporain 2021.
– Le Tour de France contemporain 2020 : Le départ ; La suite ; La suite de la suite ; L’arrivée.
– Le Tour de France contemporain 2019 : 1ère semaine ; 2ème semaine ; 3ème semaine.
– Le Tour de France contemporain 2018