Fait très rare et insigne honneur pour des architectes étrangers, Romain Viault, à Paris, et Xavier Laumain, à Valence, ont cette année été invités à participer aux Fallas de Valencia, en Espagne. Leur création, intitulée PostNatura, symbolise la fragilité de la Nature qui se consomme et se consume. L’œuvre s’embrasera bientôt.
7 heures du matin. Après quatre petites heures de sommeil, nous nous rendons à la falla afin de finaliser les détails. Le jury peut passer à tout moment, dès 8 heures.
Nous semons une myriade de Y comme autant de jeunes pousses exprimant le renouveau et l’espoir, comme cette arrivée du printemps célébré par les fallas. D’aucuns peuvent au contraire y voir des feuilles tombées de l’arbre, image d’une nature qui se meurt, en accord avec la critique que nous avançons avec Postnatura.
Chaque falla s’accompagne d’un texte explicatif. Nous décidons d’apposer la description de notre concept en quatre langues (espagnol, valencien, anglais et français) sur le ‘ninot’. Cette «figurine», qui fait partie de la composition finale de la falla, fut exposée plus d’un mois au Musée des Sciences Principe Felipe et fut rapportée hier sur le site par les falleros.
Afin d’exprimer la dimension industrielle de notre projet, nous déposons à même le sol les panneaux de MDF dans lesquels ont été découpés les Y. La falla est enfin mise en oeuvre. Passons à la mise à l’épreuve.
En attendant le jury, nous répondons aux questions des curieux qui s’interrogent, tant sur la conception réalisée à Paris que sur la fabrication assurée à Valence. Un détail nous interpelle : sur le sable lisse, une colombe a laissé ses empreintes en forme de Y !
Le premier jury se présente à 13h. Il attribuera les prix liés à notre catégorie, laquelle est définie selon la dimension et le coût de la falla. Nous nourrissons peu d’espoir car notre oeuvre expérimentale ne peut rivaliser avec les fallas traditionnelles. Un membre nous félicite poliment. En tout, 381 fallas ont été créées cette année.
Une heure passe. Apparaît le second jury, celui dédié aux fallas expérimentales. Nous captons leur attention et relevons quelques signes d’approbation. Les résultats sont attendus vers 20h.
Nous nous rendons au centre culturel del Carmen, invités par Miguel Arraiz Garcia pour un événement son et lumière autour de la falla qu’il conçut et présenta au festival Burning Man du Nevada.* Un spectacle spectral !
Le téléphone de Xavier vibre. Il écarquille les yeux et me crie «nous avons gagné le 1er prix dans la catégorie Ingéniosité et Grâce» ! Nous sautons littéralement de joie, stupéfaits d’avoir remporté un prix, de surcroît le 1er dans cette catégorie !
S’ensuit un autre message : le jury expérimental nous attribue le 4ème prix ! Nous nous embrassons chaleureusement et nous nous félicitons d’avoir obtenu une distinction dans chaque commission.
De retour à la falla Castielfabib, des percussionnistes costumés closent cette belle journée par des rythmes endiablés.
A demain!
Romain Viault, avec Xavier Laumain
PS : Pour l’occasion et durant toutes les festivités des Fallas de Valencia, Chroniques d‘architecture devient quotidien afin de tenir le journal de l’évènement, chronique relatée au jour le jour par Romain Viault. Jusqu’à la «crema» donc, retrouvez-nous ici tous les jours vers 18h.
*Le festival Burning Man est une grande rencontre artistique qui se tient chaque année dans le désert de Black Rock au Nevada (USA). Elle a lieu la dernière semaine d’août. En 1986, à San Francisco, un dénommé Larry Harvey propose la crémation festive d’un mannequin géant sur la plage de Baker Beach. En 1990, l’événement est déplacé dans le Nevada pour permettre l’accueil, dans une sorte de ville temporaire en plein désert, d’installations (Art Camps) et de participants (Burners) de plus en plus nombreux. (Wiki)